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Entretien avec la contralto Marie-Nicole Lemieux : "Chanter me délivre !"

Marie Nicole Lemieux se produit le 10 février à la Salle Gaveau, à Paris, pour un récital qu’elle a appelé « Passion Lemieux », comme son un nouveau disque, chez Naïve, anthologie d’airs d’opéras. En interview, entre deux éclats de rires, la contralto canadienne se livre.
Article rédigé par Lorenzo Ciavarini Azzi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Marie-Nicole Lemieux.
 (Lorenzo Ciavarini Azzi/Culturebox)
Culturebox : Qu’est-ce qui vous fait chanter ?
Marie-Nicole Lemieux : L’amour ! L’amour de la musique, du don. Quand je chante il y a un désir - qui me remplit, et en même temps, à l’inverse, un besoin de m’exprimer, qui me délivre. J’aime beaucoup la chanson populaire, mais elle ne me satisfait pas pleinement. En revanche, ce qui me reste de cette musique, est le fait qu'elle soit collée au texte, qu’il y ait du sens.
Passion Lemieux, son dernier disque
Comment avez-vous conçu votre récital « Passion Lemieux » ?
Je me suis remémorée mon parcours de chanteuse, en retenant les passions qui m’ont habitée. Ainsi les « arie antiche », et l’arietta « Caro mio ben », premier air chanté de ma vie, pour mon audition au Conservatoire. Puis d’autres découvertes qui m’ont touchée : Schubert et Brahms, mais aussi de l’opéra, puis Kurt Weil et enfin Manuel De Falla et l’amour douloureux. Ce dernier m’est proche ; qui dit passion dit également tourment et il est vrai que la musique qui m’a toujours plu est celle de la douleur.
 
Etes-vous toujours angoissée ?
Oui.
 
Le succès ne vous rassure pas ?
En ce qui concerne la maîtrise de la voix, je n’ai plus les mêmes crises de panique qu’il y a dix ans, en cas de fatigue. De même, la connaissance des chefs d’orchestre est rassurante, car une confiance s’installe. Mais il me reste des appréhensions, lorsque je me mets en danger, comme je le ferai, l’été prochain, au Festival de Salzbourg. En assumant le rôle d’Azucena dans « Le Trouvère » de Verdi, sous la direction de Daniele Gatti, je sortirai de ma zone de confort.
  (Lorenzo Ciavarini Azzi/Culturebox)
C’est une angoisse toute professionnelle…
Oui, j’ai gardé l’âme de la bonne élève. Mais, plus largement, mon angoisse réside dans l’appréhension de l’avenir. La connaissance de mon répertoire, la maîtrise de la voix, tout cela peut s’arrêter. Or, j’ai une responsabilité vis-à-vis du public qui, jusqu’ici, me suit. Mais je ne prends rien pour acquis.
 
Votre voix a-t-elle beaucoup évolué ?
Oui, la zone de « confort de la voix » s’est considérablement élargie, car en travaillant les aigus, j’ai également développé mes graves. Malgré ma voix de contralto, il m’arrive d’aborder aussi des répertoires de mezzos, comme pour mon disque Mozart.
 
Qu’est-ce qui vous manque aujourd’hui ?
J’aimerais réussir à être moi-même dans la vie autant que je le suis sur scène : libre et capable de tout assumer, y compris mes faiblesses en tant que chanteuse. Pourquoi suis-je si heureuse sur scène ? Il y a certes la relation avec le public, mais il y a sûrement autre chose. Sur scène, j’assume même mes rondeurs…
 
  (Denis Rouvre/Naïve)
On a même le sentiment que vous jouez de votre physique sur scène ou sur les photos…
C’est vrai. Mais le physique n’est pas secondaire, il est même au cœur de l’opéra. Je suis une ancienne sportive : j’ai fait du handball et de l’athlétisme et j’ai été championne de lancer du poids ! Aujourd’hui je me tiens en forme. C’est essentiel pour le souffle, car sur scène on ne cesse de courir et j’aime ça ! Tout est physique ! Lorsque je chante, je « ressens » la musique : les « respirations » de Wagner, la « pulsation » de Händel ; c’est un « beat » !


"Passion Lemieux", à la Salle Gaveau à Paris, le 10 février.
Concert,  à la Salle Pleyel à Paris, le 11 avril.
"Tancrède" de Rossini, au Théâtre des Champs Elysées à Paris, du 19 au 27 mai.


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