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Bob Dylan distribue piques et remerciements dans un discours fleuve

C'était vendredi soir à Los Angeles, en prélude aux Grammys, lors de la soirée de gala Musicares, une organisation caritative pour les musiciens en difficulté. Bob Dylan, honoré par l'organisation comme la personnalité de l'année, est monté sur scène pour prononcer un discours-fleuve de 30 minutes où il a donné son point de vue sur le monde de la musique et distribué bons points et soufflets.
Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Bob Dylan prononce un discours à la soirée Musicares, le 6 février 2015.
 (Frazer Harrison / Getty Images / AFP)

L'icône folk de 73 ans, l'un des artistes les plus vénérés aux Etats-Unis, a profité de cette tribune pour remercier ses inspirateurs et ses soutiens mais aussi pour critiquer ses détracteurs. 

Il a félicité notamment tous ceux qui ont repris ses chansons, des Byrds à Nina Simone, en passant par the Staples Singers, mais aussi son ancienne compagne Joan Baez ("la reine du folk alors et encore aujourd'hui", une femme "d'une honnêteté dévastatrice", dixit Dylan). Il a également remercié Peter Paul and Mary pour avoir fait de "Blowin in the wind" un hit en 1963 alors que ce titre avait été "enterré" dans les profondeurs de son second album.

L'hommage à Jimi Hendrix

Il a surtout rendu un hommage appuyé à Jimi Hendrix et à Johnny Cash. Il a rappelé que Hendrix avait fait un hit international de "All Along The Watchtower" (cette chanson figure sur l'album de Dylan "John Wesley Harding" sorti en 1967). "On ne peut pas oublier Jimi Hendrix", a-t-il dit, rapporte Rolling Stone.

"J'ai vu Jimi jouer lorsqu'il était dans un groupe baptisé Jimmy James and the Blue Flames. Un truc comme ça. Et Jimi ne chantait même pas. Il était juste le guitariste. Il a pris certaines de mes chansons auxquelles personne n'avait prêté attention et les a emmenées haut jusqu'aux limites de la stratosphère, les transformant toutes en classiques. Je dois remercier Jimi. J'aurais aimé qu'il soit là."

Ses souvenirs de Johnny Cash

"Johnny Cash a lui aussi enregistré certaines de mes chansons très tôt", a-t-il souligné. "je l'ai rencontré autour de 63, lorsqu'il n'avait que la peau sur les os. Il était un de mes héros. J'ai entendu beaucoup de ses chansons en grandissant. Je les connaissais mieux que les miennes. "Big River", "I Walk the Line", "How High's the Water, Mama ?". J'ai écrit "It's Alright Ma (I'm Only Bleeding)" avec cette chanson en tête."

"Johnny était une personnalité intense, et il a vu des gens me critiquer parce que je jouais de la musique électrique (à l'époque où Dylan est passé de la guitare sèche à la guitare électrique NDLR) . Il a écrit des lettres à des magazines, grondant les gens, leur conseillant de la fermer et de me laisser chanter. Dans le monde pétri de drames du Sud d'où venait Johnny Cash, personne ne disait à quiconque ce qu'il pouvait chanter ou non."
"Je chante comme une grenouille"

Mais Dylan ne s'est pas contenté de gentillesses. Il s'en est aussi pris à ses détracteurs, et en particulier à ceux qui critiquent sa voix.

Il s'est moqué des critiques qui se sont évertués à affirmer tout au long de sa carrière que "je ne peux pas chanter --coââ coââ, je chante comme une grenouille". "Pourquoi ne disent-ils pas cela de Tom Waits" qui est connu pour sa voix grave?, s'est-il interrogé. "Pourquoi ne disent-ils pas ça de Leonard Cohen? Pourquoi ai-je droit à un traitement spécial?".

Le Zim a réservé ses réflexions les plus dures à Thomas "Tom T" Hall, chanteur et musicien de country dont il a critiqué la tièdeur et la volonté désespérée de faire des chansons où tout un chacun se retrouverait. Il a ajouté que Nashville était dominée par Tom T Hall avant l'arrivée de Krist Kristofferson.

Ses chansons reprises sur scène par un aréopage de stars

Les chansons du héros de la contre-culture des années 1960 ont été interprétées sur scène par un défilé de stars, de Neil Young à Tom Jones ("What Good Am I ?"), de Alanis Morissette ("Subterranean Homesick Blues") à Bruce Springsteen, en passant par Nora Jones ("I'll Be Your Baby Tonight"), Aaron Neville ("Shooting Star"), Bonnie Raitt, Crosby, Stills and Nash ("Girl From The North Country"), Jackson Browne ("Blind Willie McTell"), John Mellencamp ("Highway 61 Revisited"), Jack White ("One More Cup of Coffee (Valley Below") et Beck.

"Quand "Tambourine Man" a été diffusé, c'était la première fois que quiconque mettait de la bonne poésie à la radio", a souligné David Cosby sur le tapis rouge, en évoquant l'influence de Dylan sur sa génération de musiciens de rock et de folk. "Il a changé le monde. Il a montré que le contenu était important. Avant Bob, les mots ne comptaient pas."
   
Bruce Springsteen et Tom Morello avaient choisi "Knockin' on Heaven's Door," tandis que Neil Young a opté pour un autre classique du répertoire de Dylan, "Blowin' in the Wind".
Explications sur "Blowin in the Wind"

Peu auparavant, Dylan avait expliqué que cette chanson ("Blowin in the Wind") qui interroge la nature de la liberté et est devenue un hymne anti-guerre du Vietnam, devait être replacée dans le contexte de "John Henry", une balade sur un afro-américain travaillant dur à casser du bitume en Virginie Occidentale.
   
"Si vous aviez chanté cette chanson autant que moi, vous aussi vous auriez écrit 'combien de routes un homme doit-il parcourir", a-t-il assuré.
   
Dylan avait été introduit sur scène par l'ancien président américain Jimmy Carter qui a salué "ses paroles de paix et de droits de l'homme (qui) sont beaucoup plus incisives, beaucoup plus puissantes et beaucoup plus durables que celles de n'importe quel président des Etats-Unis".

L'icône folk a sorti cette semaine un album de reprises de standards chantés par Frank Sinatra.

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