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"Quoi de neuf dans la mode ?" : l'esprit créatif japonais s'épanouit à la Maison de la Culture du Japon
La Maison de la Culture du Japon multiplie les événements autour de ses créateurs. Avec l'exposition "Quoi de neuf dans la mode ?", consacrée à trois designers de vêtements, The Japan Store Isetan Mitsukshi apporte une nouvelle lumière sur les valeurs de l'esthétique japonaise pour qui tradition et innovation vont de pair. Rencontre avec Sayuri Tanei, Kenta Matsushige et Irié.
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Sayuri Tanei, Kenta Matsushige, Irié : la tradition japonaise dans le sang
Sayuri Tanei est arrivée dans le sud de la France en 2009. Après avoir étudié au Studio Berçot à Paris, elle travaille chez Jean-Paul Gaultier en tant que dessinatrice de broderies, puis devient l’assistante de Kenzo pour les articles en maille. Elle crée sa marque franco-japonaise en 2017 sous le nom de Maison Marea. Ses vêtements féminins sont faits à partir de matières traditionnelles japonaises, tout en s’inspirant du style des Parisiennes. La créatrice crée également de la maroquinerie basée sur les techniques traditionnelles des fabricants de cuirs parisiens.En quoi reconnaît-on l’esprit créatif japonais dans votre travail ?
Mon concept, c’est de proposer aux business women un nouveau style de tailleur féminin inspiré par les Parisiennes. L'esprit japonais se retrouve dans la coupe japonaise : au Japon, on ne montre pas trop les hanches, il faut être à l’aise dans les vêtements. Ces derniers sont donc moins ajustés mais il y a cependant des pinces dans le dos de mes vestes. J’utilise des tissus traditionnels de la région de Bishu, une ville consacrée au tissage, et je réalise aussi des sacs en cuir pour compléter la silhouette. Au Japon, la working girl est souvent habillée dans un style mimi : je veux lui proposer une féminité plus apaisée.
Le créateur japonais Kenta Matsushige s’est formé à ESMOD Osaka puis à l’Ecole de la Chambre Syndicale de la Couture Parisienne dont il sort diplômé en 2011. Il a remporté le Grand prix du jury Première Vision du Festival de mode de Hyères en 2014. Il a fait ses armes chez Gianfranco Scotti, Anne Valérie Hash, Givenchy et au studio haute couture de la maison Christian Dior. Ses créations sont inspirées de l’équilibre entre la nature (concept du Hinabi) et l’urbain (concept du Miyabi). Ses créations minimales, épurées, architecturées, donnent à voir une grande maîtrise de la forme et un imaginaire poétique et délicat. Il est installé à Paris.
En quoi reconnaît-on l’esprit créatif japonais dans votre travail ?
Je veux créer un univers calme, silencieux et structuré duquel se dégage de la sérénité. J’utilise ainsi des tissus sobres, simples et zen. J’aime la chemise occidentale à laquelle j’apporte une réalisation en 3D grâce à la technique française. Je développe mon travail en puisant dans les deux cultures en même temps. Ici, en France, je suis plus interpellé par la culture japonaise que là-bas.
Après avoir fait ses études de design à Osaka, Irié a débuté en tant qu’assistant de Kenzo dans la capitale française. Il commence sa carrière de styliste à Paris en 1972. Sa boutique parisienne existe depuis 1983. Irie, qui aime particulièrement les imprimés, présente des vêtements pour femmes aux allures élégantes. Sa gamme Irie Wash, entièrement lavable en machine, permet à la femme d’affaires moderne de voyager tout en restant impeccable.
En quoi reconnaît-on l’esprit créatif japonais dans votre travail ?
J’aime Paris. J’aime la parisienne et sa façon de s’habiller. Quand je suis arrivé en France, j’ai été séduit par l’univers de Godard, de Truffaut… je ne pensais plus alors japonais mais peu à petit, c’est revenu naturellement. Mon esprit japonais se retrouve ainsi dans des coloris et des inspirations kimonos.
2018, une année culturelle japonaise
2018 marque le 160e anniversaire des relations diplomatiques entre le Japon et la France et le 150e anniversaire du début de l’ère Meiji lorsque le pays s’ouvrit à l’Occident. Résultat : une riche saison consacrée à la culture nippone est au menu.- Japonismes 2018 avec, entre autres, l’exposition Fukami qui propose une plongée dans l’esthétique japonaise en montrant des oeuvres issues de la tradition mais aussi des créations contemporaines. Parmi celles-ci, la robe-sculpture Roll du couturier Anrealage présentée avec la céramique Jomon (3500 av.J-C. - 2500 av.J-C.) qui en est la source d’inspiration (Hôtel Salomon de Rothschild, de mi-juillet au 18 août 2018).
- Paris et Tokyo lancent un Tandem culturel pour faire découvrir aux Parisien·ne·s et Tokyoïtes, une programmation culturelle croisée, entre tradition et modernité. Le but est de faire découvrir aux habitants des deux villes la vitalité de leurs scènes culturelles respectives. Le thème "Comment la modernité réinvente la tradition", permet non seulement de proposer la création artistique sous toutes ses formes mais également de mettre en valeur les traditions et le patrimoine des deux villes.
- Des designers européens vont à la rencontre des artisans, directement au Japon, afin de les observer, les questionner et travailler avec eux, dans le respect de leurs techniques et de leur savoir-faire. Kyoto Contemporary est un programme d’échanges de savoir-faire entre designers parisiens et artisans d’art japonais. Initié en 2014 et soutenu par les villes de Kyoto et Paris, il associe des professionnels des métiers d’art de Kyoto et des designers du réseau des Ateliers de Paris pour des collaborations de huit mois qui donnent naissance à des objets de décoration et des accessoires de mode destinés au marché européen. L’objectif : associer des compétences pour renouveler l’offre de professionnels japonais et permettre à des designers parisiens de découvrir les savoir-faire nippons.
- La ville de Kurashiki présente l’excellence de ses productions artisanales locales au travers de 14 marques, riches d’une histoire, d’une sensibilité et d’un esprit propres à cette région. Kurashiki doit sa renommée à son quartier historique Bikan où les habitants ont développé l’art populaire "Mingei", plein de sensibilité et de beauté, dont l’esprit transparaît dans la production d’objets de la vie quotidienne. Il y a 400 ans, la ville connait une forte croissance de son industrie textile. Elle est réputée pour ses cordons Sanada, ses tabis (chaussettes traditionnelles), ses sacs en toile, ses costumes d’écoliers et ses jeans. Kurashiki est devenue la capitale du denim au Japon et ses jeans de luxe. Les riches entrepreneurs du secteur textile ont même fait construire des musées privés, parmi les premiers du Japon, sur l’art occidental et l’art populaire Mingei, contribuant à la conservation du patrimoine. Cette exposition est l’occasion de mettre en avant des collaborations entre des designers vivant à Paris et certaines de ces marques (jusqu'au 17 mars. Discover Japan. 12, rue Sainte-Anne. 75001).
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