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"Le consommateur ne veut pas qu’on lui mente" : la marque de foulards Amédée Paris lance un code-barres pour plus de traçabilité

32 entreprises du textile, une des industries les plus polluantes au monde, ont signé le Fashion Pact lors du G7 de Biarritz fin août. Ce premier pas pour réduire leur impact environnemental ne doit pas faire oublier que la législation ne permet pas aujourd'hui de tracer les matériaux utilisés dans la confection des vêtements. 

Article rédigé par Corinne Jeammet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Foulard en laine Mérinos Amédée Paris, collection 2019 (AMEDEE PARIS)

D'où vient la laine composant votre dernier achat ? Les réglementations européennes n'imposent pas cette mention sur l'étiquette, seulement celle de la composition en fibres et le "made in"Face à un public de plus en plus curieux de la provenance et de la composition des biens qu'il consomme, des entreprises planchent sur la traçabilité. La marque Amédée Paris lance un code-barres qui permet au consommateur de connaître les lieux de fabrication de ses écharpes. Rencontre avec Deborah Berger, fondatrice d’Amédée Paris.

En 1851, l’industriel et entrepreneur Amédée Prouvost crée le peignage Amédée à Roubaix, qui sera racheté, en 1987, par Chargeurs. Ce groupe français lance en 2017 un label de laine Mérinos éco-traçable, le Nativa Precious Fiber, qu’il met à la disposition de la marque d’écharpes Amédée Paris, lancée sur internet fin 2018.

Foulard en laine Mérinos Amédée Paris, collection 2019 (AMEDEE PARIS)

Franceinfo Culture : Vous avez lancé un code-barres pour plus de transparence du process de fabrication. Pourquoi ?

Deborah Berger, fondatrice d’Amédée Paris : Donner des informations permet d’éduquer le consommateur. La solution, c’est la transparence : le consommateur ne veut pas qu’on lui mente, il veut la vérité. Je suis pour la logique des petits pas, personne n’est parfait du jour au lendemain. Je crois aux petites améliorations, il faut montrer que l’on peut faire mieux. 

Comment fonctionne ce dispositif ?

Ce code-barres est né du projet de Blockchain développé par Chargeurs. Ce groupe français - qui source la laine aux quatre coins du monde - a mis en place un label de laine Mérinos éco-traçable, Nativa Precious Fiber auquel adhèrent des fermiers en Argentine, Uruguay, Tasmanie et Nouvelle Zélande. Nous avons un engagement avec Contrôle Union, organisme indépendant, qui est chargé d'auditer nos 300 fermes fournisseurs. Du mouton qui produit la laine jusqu’à l’écharpe qu’achète le consommateur, le processus dans son intégralité est contrôlé pour assurer une transparence totale. Pour engager les fermiers à y participer, ils sont payés 5% plus cher.

En contrepartie, ils doivent confirmer, par sms, chaque livraison de laine aux usines de peignage, qui doivent elles aussi envoyer une confirmation. Il en sera de même pour toutes les autres étapes : à la filature, chez le tricoteur ou le tisseur. Cette certification électronique des données a permis la mise en place d’un code-barres. Aujourd’hui un seul foulard en est équipé mais à l’horizon 2020, notre objectif est que l’ensemble de nos produits le soient. Nous avons une cinquantaine de références, hors les modèles édités pour la collection capsule. Le processus est simple : le consommateur photographie le QR code qui lui donne accès aux informations récoltées par la Blockchain : nom du produit, emplacement de la ferme de production, lieu du filage de la laine, lieu du tissage et lieu de l’impression.

Parlez-nous de vos collections...
Chaque collection correspond à une destination de voyage, en référence aux croisières de luxe de la compagnie des chargeurs réunis. Les motifs sont une interprétation contemporaine de l’architecture Art Déco ou des peintures de Sonia Delaunay. Nous venons de lancer une première collaboration avec le calligraphe et directeur artistique Nicolas OuchenirC’est une collection de 7 foulards représentant 7 destinations qui seront distribués en exclusivité pour Noël. Nous avons développé avec des artisans imprimeurs italiens une technique d’impression sur laine, qui permet de restituer l’aspect aquarellé des dessins de Nicolas Ouchenir. Nous envisageons de faire une collection capsule au moins une par an. 

Foulard Amédée Paris en collaboration avec Nicolas Ouchenir,  2019 (ALMA_IISOLINA)

Vous revendiquez une empreinte carbone diminuée. Comment faites-vous ?
La fabrication est rationalisée géographiquement avec un recours au transport maritime pour une empreinte carbone diminuée. La laine vient de l’hémisphère sud, on la transporte donc par bateau. Concernant la production qui se fait en France et en Italie, le transport se fait en train.

Comment recyclez-vous intégralement vos chutes ?
Nous avons un plan de gestion des déchets. Pour les produits tricotés, il n’y a pas de chute mais pour le tissage, il y en a : elles sont dues à la découpe à la bonne taille du carré de laine. Ces chutes servent à réaliser des bracelets. Les chutes de tissus imprimés sont, elles, recyclées pour faire de nouveaux produits ou des prototypes. Par ailleurs, nous limitons les stocks via les pré-commandes afin de ne produire que ce que l’on va vendre.

Processus d'impression du twill de laine d'Amédée Paris (AMEDEE PARIS)

Vous revendiquez une chaîne de fabrication respectueuse des animaux, de l’environnement et des hommes. Comment cela se manifeste-t-il ?
Concernant le bien-être animal de nos moutons, nous avons des critères précis de tonte de la laine : il existe ainsi un temps minimal pour que les bêtes ne soient pas stressées. Les brebis en gestation, qui ont du mal à se déplacer, sont, elles, tondues plus tôt que les autres. Nous interdisons aussi le mulesing (technique chirurgicale consistant à couper une partie de la peau de l’arrière train pour réduire les attaques de parasites, ndlr). Enfin, nous accordons beaucoup d’importance aux soins donnés aux animaux blessés ou malades. Notre laine n’est pas bio car un animal malade peut recevoir des antibio.

Dans une des fermes d'élévage de moutons, fournisseurs en laine pour la marque d'écharpes Amédée Paris  (AMEDEE PARIS)

Concernant l’environnement, les substances, les pesticides et les produits chimiques sont interdits partiellement (nous ne sommes pas dans une exploitation 100% bio), les produits sont interdits mais il y a une tolérance. Dans nos usines de peignage, nous consommons beaucoup d’eau : cette dernière est donc dépolluée avant d’être reversée dans la rivière. Côté responsabilité sociale, nous adhérons aux principes du Global Compact des Nations Unies.

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