Kurashiki, la ville du denim japonais, dévoile son savoir-faire à Paris
Le Japon se nourrit d'une culture traditionnelle et d'un savoir-faire artisanal et son denim n'échappe pas à la règle. A Paris, l'exposition-vente Kurashiki Japan présente une sélection de marques japonaises utilisant cette toile, qui a la réputation d'être la meilleure du monde. Shintaro Ishihara, Senior Staff de la Ville de Kurashiki, nous explique les particularités de ce denim.
La ville de Kurashiki présente avec l'exposition-vente Kurashiki Japan ses productions artisanales en janvier à Paris : l'occasion de découvrir des vêtements du quotidien en jean denim et quelques objets (porte-monnaie, encens, rubans traditionnels) à travers les créations de 13 marques porteuses d’un riche héritage culturel propre à cette région et d’acquérir des modèles exclusifs créés par des griffes souvent inconnues en France. Dans le petit espace Discover Japan Paris se nichent de belles découvertes.
Rencontre avec Shintaro Ishihara, Senior Staff de la ville de Kurashiki / Division Commerce et Industrie, qui nous explique les particularités de ce denim.
Pourquoi Kurashiki est la capitale du jean denim ?
Le quartier de Kojima dans la ville de Kurashiki est le berceau du jean japonais. Il possède une place importante en tant que FEO (fabricant d'équipement d'origine) pour de grandes marques. Les traitements les plus connus - délavage (washed) ou usé (used) - ont été inventés et développés dans cette ville.
Comment cette production a évolué depuis 400 ans ? Au niveau des entreprises et des jeans proposés ?
Il y a 400 ans, nous avons conquis une partie de la mer avec une zone de terres fertiles. Mais avant de passer à la fabrication du textile, nous avons cultivé du coton résistant au sel. A l'ère Meiji (dans les années 1860), un berceau est né grâce à toutes les industries en lien avec la filature et tout autre processus textile. Le chiffre d'expédition des marchandises textiles, dont une centaine d'industries liées au jean denim, s'élève à 110 milliards de yens par an. C'est le chiffre d'affaire le plus important au Japon.
Les techniques servant à coudre les courbes des tabis (NDRL : chaussettes traditionnelles) et les tissus épais ont été utilisées par la suite pour la production des uniformes scolaires. De nos jours, elles servent à coudre les jeans résistants. De plus, une technique de teinture traditionnelle est utilisée pour réaliser un denim original de couleur Japan Blue. Le premier jean produit au Japon fut créé par Big John, à l'origine une marque d'uniforme scolaire.
Quelles sont les caractéristiques de ce denim ? Comment le reconnaît-on ?
Sa particularité est due au fait qu'une navette unique à l'ancienne est utilisée pour sa fabrication. Le processus de création du jean nécessite un soin et un temps important qui lui donne une texture confortable tout en ayant une surface rugueuse. Cette dernière permet lors de la teinture de créer un aspect original. De plus, ces jeans ont au niveau de l'ourlet, un selvedge (NDLR : finition d’un tissu à son extrémité renforcée qui forme souvent un liseré de couleur) empêchant le tissu de s'effilocher et cela prouve que c'est un jean premium japonais.
Quelles sont les différences au niveau des coupes, des couleurs ?
Nous recherchons toujours la création de nouvelles techniques pour obtenir des jeans variés. La plupart des grandes marques sont produites dans la zone de Kojima : pour cette raison, nous ne pouvons pas dire que nous sommes différents puisque ces jeans sont tous produits au même endroit mais ils se distinguent par leur procédé :
・ Le Japan Blue, un indigo profond ayant pour origine les techniques de teinture indigo datant de l'ère Edo
・ Les techniques damaged (endommagé) naissent à partir d'un mélange de différentes méthodes (rectifieuse, laser) donnant lieu à "une œuvre d'art"
・ Les différentes teintures : en changeant la matière du tissu ou en utilisant des colorants traditionnels comme de la terre oxydée (le Bengara) ou du charbon
・ Il existe en plus du selvedge, des tissus extensibles (stretch), d'autres imperméables...
・ Certains produits introduisent la culture du Boro (NDLR : dans le nord du Japon très pauvre, les gens réparaient leurs vêtements avec des chutes de tissus. Ces patchwork utilitaires sont aujourd'hui très branchés). D'autres vestes en denim comportent des motifs de vêtements traditionnels comme le Happi.
kuRAShiki, ville de production textile, d'art et de CUlture
La ville de Kurashiki doit sa renommée à son quartier historique Bikan. Faisant face aux îles de la Mer Intérieure, son paysage urbain est tissé d’anciennes maisons et de pittoresques entrepôts aux murs couverts de tuiles noires séparées par du mortier blanc. Les habitants de ce quartier, qui s’étend le long d’un canal, ont su développer un art populaire Mingei plein de sensibilité et de beauté, dont l’esprit transparaît encore aujourd’hui dans la production d’objets de la vie quotidienne.
Il y a 400 ans, l’histoire de Kurashiki prend un nouveau tournant grâce à son extension due à des terres gagnées sur la Mer Intérieure et l’introduction de plants de coton. La ville connait alors une forte période de croissance dans le domaine de l’industrie textile. S’appuyant sur les technologies développées depuis plusieurs siècles, Kurashiki est réputée dans tout le Japon pour la qualité de sa production textile : que ce soit pour ses cordons Sanada (rubans tissés), ses tabis (chaussettes traditionnelles), ses sacs en toile, ses costumes d’écoliers.... Ces dernières années, Kurashiki est devenue notamment la capitale du denim au Japon : ses jeans de luxe sont réputés dans le monde entier.
Très vite, les riches entrepreneurs du secteur textile y ont fait construire des musées privés sur l’art occidental et l’art populaire Mingei. Ils ont aussi contribué à la conservation du patrimoine de la ville, comme ses belles rues traditionnelles. Kurashiki s'est alors imposé peu à peu comme une des principales villes d’art et de culture au Japon, alliant modernité et tradition.
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