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"Je hais ce nouveau puritanisme qui juge tout": des créateurs en guerre contre le politiquement correct à la Paris Fashion Week

Le débat qui fait rage depuis le lancement du mouvement "MeToo" s'est invité sur les podiums parisiens à l'occasion de la semaine du prêt-à-porter féminin présentant le printemps-été 2020.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4 min
Saint-Laurnent printemps-été 2020 pendant la Paris Fashion Week, le 24 septembre 2019 (IK ALDAMA / IK ALDAMA)

"Puritanisme", "rabat-joie", "politiquement correct" : des stars de la mode comme Hedi Slimane ou Anthony Vaccarello dénoncent un contexte étouffant pour la création, prenant le contre-pied de ceux qui, au contraire, comme Maria Grazia Chiuri, Manish Arora et Olivier Rousteing, entendent promouvoir les droits des femmes et la diversité.

Résister à cette forme déguisée de néoconservatisme

Hedi Slimane

"Il y a cette posture tragiquement démago du politiquement correct (...). Nous ne sommes plus trop dans la légèreté", a déploré Hedi Slimane dans une interview à Vogue en août en invitant à "résister" à cette "forme déguisée de néoconservatisme". L'un des créateurs les plus influents de la planète mode avait été la cible de critiques il y a un an après la présentation de sa première collection femme pour la maison Celine célébrant la fêtarde qui passe son temps dans des boîtes de nuit en mini-robe, avec un casting jugé trop blanc. Il a depuis opéré un virage à 180 degrés vers une "néobourgeoise" en jupe-culotte et blouse à col lavallière, une tendance qui s'est précisée au défilé Celine ce 27 septembre. Il s'est pourtant défendu en affirmant que ceux qui l'avaient qualifié de "Trump de la mode" ont fait du bien à Celine : "Que de publicité pour une robe à danser courte, dans un contexte aussi puritain et rabat-joie. C'est précisément ce qu'il me fallait pour lancer le retour de l'esprit bourgeois".

Celine printemps-été 2020, à la Paris Fashion Week, le 27 septembre 2019. (THOMAS SAMSON / AFP)

Je hais ce nouveau puritanisme qui juge tout

Anthony Vaccarello

L'actrice Catherine Deneuve qui avait défendu "la liberté d'importuner" des hommes en plein "Metoo", était au premier rang du défilé Celine après celui de Saint Laurent le 24 septembre.

Le Belge Anthony Vaccarello, directeur artistique de Saint Laurent, a lui aussi dénoncé le "puritanisme" en revendiquant le droit à l'esthétique sexy, avec des micro-shorts, talons vertigineux et décolletés plongeants. "Il devient impossible d'avoir un avis contraire à l'opinion générale (...). On me dit c'est trop court, trop transparent. Je hais ce nouveau puritanisme qui juge tout", a-t-il déclaré au Journal de dimanche. Il refuse aussi "la communication quota" sur le nombre de personnes de couleur dans les défilés, même si Naomi Campbell a clôturé son show au pied de la tour Eiffel. "Le problème du racisme comme celui de la misogynie, c'est qu'il est dans l'oeil de l'autre, en tout cas pas le mien", a indiqué le styliste. La maison est souvent critiquée pour des campagnes publicitaires jugées misogynes. En 2017, l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité lui a demandé de modifier certains visuels jugés dégradants pour les femmes.

Avec Madame C, un pied de nez à une époque où l'on ne peut plus rien dire ni faire

Richard René

La maison Guy Laroche a de son côté célébré la prostitution de luxe qui a "contribué au lustre de la France" dans un pied de nez à une époque où "l'on ne peut plus rien dire ni faire". La collection a été consacrée à la proxénète française Madame Claude, directrice d'un réseau de call-girls qu'elle envoyait séduire de hauts dignitaires et chefs d'État, immortalisée dans un film sorti en 1977 pour lequel Guy Laroche avait fait des costumes. "Il ne faut pas mélanger les choses : MeToo c'est sur des gens qui sont contraints, c'est de l'agression sexuelle, ici ce sont des gens qui décident de vendre leur corps, c'est un libre choix", a affirmé Richard René.

Guy Laroche printemps-été 2020, à la Paris Fashion Week, le 25 septembre 2019.  (PIERRE TEYSSOT / MAXPPP)

Nous battre pour les droits des femmes et pour que la diversité et l'homosexualité soient acceptées dans la mode

Olivier Rousteing

Dans une démarche opposée, l'Italienne Maria Grazia Chiuri, directrice artistique de Dior et féministe assumée, a rendu hommage à Catherine Dior, soeur et muse de Christan Dior qui a été résistante, torturée et déportée et qui a fait carrière dans les fleurs après la guerre comme grossiste aux Halles de Paris. 

"Nous devons toujours nous battre pour les droits des femmes et pour que la diversité et l'homosexualité soient acceptées dans la mode", estime le créateur de Balmain Olivier Rousteing dans un entretien à l'AFP. L'Indien Manish Arora a, quant à lui, dédié son spectacle inspiré des cabarets parisiens à la "famille LGBQAI" expliquant que la mode ne devait pas laisser de côté les minorités sexuelles. 

Manish Arora printemps-été 2020, à la Paris Fashion Week, le 24 septembre 2019.  (CINDY VOITUS / HANS LUCAS)

"Les gens qui pensent qu'il n'y a plus de tels combats à mener sont démodés", conclut Olivier Rousteing.

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