Expo Balenciaga : du noir gazar pour le couturier des couturiers
Le musée Bourdelle accueille soixante-dix pièces Balenciaga pour les 100 ans de la maison espagnole. Les robes, exposées au milieu de sculptures monumentales sont toutes... noires, la couleur de prédilection du "couturier des couturiers".
À peine la fashion week terminée, le musée Bourdelle accueille du 8 mars au 16 juillet 2017 soixante-dix pièces Balenciaga pour les 100 ans de la maison espagnole. L'exposition est doublement originale : d'abord les robes sont exposées au milieu de sculptures, ensuite elles sont toutes... noires.
Pourquoi du noir ?
Cristobal Balenciaga avait une curieuse habitude : il créait ses robes sur des toiles noires, un peu comme si un écrivain utilisait des feuilles de brouillons noires. Ce n'est pas banal dans les ateliers de couture ou l'on travaille d'ordinaire des toiles blanches, pour mieux voir ce que l'on fait. Alors pourquoi du noir ? "Le noir est une espèce coup de crayon, de fusain... La forme n'est pas la même : tout à coup, la forme change, le volume n'est pas le même en noir qu'en blanc. C'est beaucoup plus net. Et cela suppose une grande connaissance technique : ceux qui pensent que tailler dans le noir c'est plus simple, qu'il masque les anomalies, se trompent. Au contraire, le noir les met en évidence avec violence", explique Olivier Saillard, le directeur du musée de la Mode à l'origine de cette exposition.
Couleur du deuil, couleur des rois
Il faut dire qu'en Espagne le noir n'est pas seulement associé au deuil. Cela faisait partie de la culture même de Balenciaga. "En Espagne, détaille Olivier Saillard, ils ont été les premiers à trouver un pigment qui permettait un noir profond. A force de lavages, le noir devenait en effet un mauvais marron. Très vite, le noir est ainsi devenu une couleur pour l'aristocratie : on le voit au Prado, où, sur les portraits, les rois sont souvent habillés de noir. C'est quelque chose qui est inscrite dans Balenciaga, qui est né au XIXe siècle et qui a conçu le XXe siècle en mode."
Un gazar sur mesure pour le couturier des couturiers
Surnommé le couturier des couturiers, Cristóbal Balenciaga était un virtuose : des coupes précises, un travail d'architecte, vous pensez regarder une simple petite robe noire, non. Avec Balenciaga, c'est bien autre chose. Vue de près, la fusion des tissus apparaît, le drapé dans le dos aussi. La complexité se dévoile. Le couturier jouait sur tous les tableaux pour créer une robe : la coupe, la doublure et bien sûr le tissu.
Tellement essentiel qu'on a créé pour lui en 1958 le gazar, un tissu de soie. "C'est le tissu qui va déterminer la forme de la robe, son tomber. Chez Balenciaga, il y a un vrai amour, une connaissance très poussée des textiles. A tel point qu'il y a cette maison qui crée pour lui ce fameux tissu, le gazar, qui a permis d'épurer encore les formes, d'arriver à construire ces robes, qui sont presque des sculptures, et des volumes très abstraits. Un tissu léger, transparent, sec, mais avec une tenue incroyable, une sorte d'énergie. Très difficile à travailler par ailleurs : peu de couturiers l'utilisent, il est réservé à la haute-couture. Mais Balenciaga avait une façon très particulière de le dompter...", explique Véronique Belloir, commissaire de l'exposition. Une architecture sculpturale, parfaitement à sa place au milieu des statues monumentales de bourdelle.
>> "Balenciaga, l'oeuvre au noir", au musée Bourdelle à Montparnasse, à Paris, jusqu'au 16 juillet.
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