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En lice à Dinan, la créatrice arménienne Armine Ohanyan conjugue mode et digital

En lice pour le Festival international des jeunes créateurs de mode du 13 au 15 avril 2018 à Dinan, Armine Ohanyan est une créatrice arménienne attachée à ses origines. À quelques jours du Festival, Culturebox a rencontré cette jeune femme passionnée par l’art, la nature, le futur et le digital. Interview.
Article rédigé par Corinne Jeammet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
La créatrice Armine Ohanyan, dans son atelier parisien, mars 2018
 (c)

Comme les 11 autres créateurs en lice pour le Festival international des jeunes créateurs de mode de Dinan, Armine Ohanyan y présente 7 silhouettes : 6 défilent, la dernière est exposée sur son stand au Théâtre des Jacobins où elle fera découvrir sa collection masculine intitulée "Eléments".

La créatrice, qui a une fascination pour l’artisanat, propose du prêt-à-couture. Sa démarche allie l’art, la mode et le digital. Appartenant à une génération avant-gardiste, elle propose une vision futuriste (via les nouvelles technologies) qui s’inspire de la force de la Nature sous toutes ses formes. Ses pièces uniques sont réalisées à la main tant pour la garde-robe féminine que masculine. 

Quel est votre parcours ?

Je suis née en Arménie en 1990. Mes créations sont nourries de son histoire et de la richesse de sa culture. Après des études à l’Académie d’Etat des Beaux-Arts d’Erevan (2006-2011), je suis venue en France suivre des cours à l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Lyon (2011-2012) puis à l’école de mode Estah à Paris (2014-2016). Quand j’avais 11 ans, j'étais venue à Chasse-sur-Rhône suivre pendant 2 semaines des cours de dessin. Je savais que je reviendrais en France ! J’ai été assistante modéliste entre 2012 et 2013 dans la maison Arasa Morelli couture à Genève, en Suisse. En 2016, j’ai remporté le premier Prix au concours international de mode E-Fashion Awards qui récompense les créateurs de demain. J’ai alors lancé ma marque. En 2017, j’ai eu le Prix du public de la Fashion Tech Expo.

Quel est votre crédo ?

Ma conviction est que si s’habiller est une nécessité, la mode en est son art. Le mouvement est infini, il ne s’arrête jamais, il bouge, il se transforme comme tout dans la vie. L’histoire de la mode drape l’histoire humaine d’une peau se mouvant à chaque révolution. Tantôt résonance, tantôt avant-garde, elle n’échappe pas à la digitalisation des modes de vie : la numérisation amène les vêtements connectés et, l’impression 3D fait partie de mes techniques de création. 

Quelle est la trame de vos défilés ?

Dès la création de ma marque, j’ai présenté mes collections en marge du calendrier de la Fashion Week parisienne. Dans mes défilés, j’essaie de mettre plusieurs effets avec un environnement qui éveille les sens, au-delà du visuel. Je mets le côté artistique en avant en mélangeant mode et art. L’art, c’est quelque chose qui est unique, que l’on n’arrive pas à expliquer. C’est un sentiment, du vécu, du ressenti. Cela m’inspire.
Ainsi, en mars 2018, j’ai présenté Racine (ma 3e collection) sous la forme d’une performance artistique protéiforme combinant danse, scénographie végétale et composition sonore. Les racines unissent les arbres à la terre et les hommes à leurs origines. Les racines quittent l’obscurité de la terre pour mieux se mêler aux corps en mouvement. Cette collection associe les couleurs chatoyantes des fleurs d’automne aux teintes estompées d’une nature en sommeil. Racines entremêlées imprimées ou appliquées grimpent sur les jupes et pantalons jusqu’à envahir les bustiers et vestes structurés.

En quête de procédés technologiques atypiques et d’expériences pour les sens, j'accorde une attention particulière à la question du relief servi ici par le travail de plissage (par le Maître plisseur Karen Grigorian). J'aime aussi l’utilisation de l’impression 3D ainsi que des jeux d’imprimés, de couleurs et de transparences.

Parlez-nous des silhouettes présentées à Dinan ?

A Dinan, je présente des silhouettes masculines. Je trouve que mes collections masculines sont plus poussées, ce sont des pièces novatrices. Je veux présenter ces pièces qui montrent ce process. Je présente ma collection "Eléments" inspirée des éléments naturels. Chaque mannequin représentant un élément naturel.
Armine Ohanyan : détail d'un sweat en Organza évoquant la neige
 (Corinne Jeammet)
Pour la neige par exemple, il s’agit d’un sweat en Organza de soie doublé qui contient des petites boules de polystyrène porté avec son pantalon. Pour la pluie, il s’agit d’un trench-coat transparent recouvert de gouttes de pluie en relief. Quant à la glace, l’impression 3D a permis de doter un manteau imprimé bleu et blanc de cristaux blancs en polyamide rigide représentant la glace. Il y aura aussi un sweat translucide, à manches longues, qui fait aussi appel à la 3D avec ses glaçons en relief.
Armine Ohanyan : détail d'un manteau orné de morceaux de glace 
 (Corinne Jeammet)
Côté nouvelles technologies, la 3D c’est quelque chose de révolutionnaire. J’aime bien le développement de nouvelles techniques. Mais il faut connaitre les bonnes entreprises qui travaillent avec les bonnes machines. Lorsqu’on dessine, c’est facile mais après, il y a beaucoup de contraintes à prendre en compte. Très peu de machines dans le monde sont capables de faire cela !
Armine Ohanyan : détail d'un trench-coat transparent avec gouttes de pluie en relief
 (Corinne Jeammet)
Parmi les pièces uniques confectionnées pour Dinan, il y aura des recréations à partir de vêtements (dans une palette noire et grise) donnés par des personnes de mon entourage. Je construit avec une autre pièce : je vais découdre l'existant pour recréer à partir de bandes une sorte de toile d’araignée. Il y a aura aussi une tenue de soirée réalisée avec de la dentelle un peu géométrique, une sorte de broderie incrustation de dentelle avec un peu de transparence.

Le thème du Festival est une mode éco responsable. Dans quelle mesure vos modèles y contribuent-ils ?

Ma touche éco responsable se retrouve dans mes inspirations liées à la Nature. C’est une source d’inspiration infinie pour moi. Ses éléments, je les ressens. Je viens d’un pays où j’ai grandi près des montagnes où je faisais des balades en forêt. Cela donne de la force, de l’énergie.
La créatrice Armine Ohanyan, dernier coup de crayon à ses croquis, en mars 2018
 (Corinne Jeammet)
J’essaie, par ailleurs, d’employer des matières nobles comme l’Organza de soie, la laine… et même de la fibre de banane, par exemple, pour un de mes pantalons qui sera présenté à Dinan. Et quand je coupe les pièces de tissus, je fais mon maximum pour rationnaliser la coupe. 
La créatrice Armine Ohanyan dans son atelier, en mars 2018
 (Corinne Jeammet)
Etre éco-responsable est difficile localement mais j’aime l’artisanat pour garder ce côté unique des choses. En Arménie, cela a de l’importance c’est notre vécu. Beaucoup de personnes travaillent le cuir, la broderie, le batik et les pierres. Mes 22 ans en Arménie sont dans mes veines dans ma culture !

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