Retour aux sources de la création Chanel avec l'exposition "Mademoiselle Privé" de Shanghai
Après Londres en 2015, Séoul en 2017 et Hong Kong en 2018, "Mademoiselle Privé" fait escale jusqu'au 2 juin 2019 au West Bund Art Center à Shanghai. Pour ce 4e chapitre, l'exposition poursuit son voyage aux sources de la création de Chanel, en mettant en avant la personnalité charismatique, l’audace et l’esprit irrévérencieux de Mademoiselle Chanel et de Karl Lagerfeld.
La scénographie de l’exposition "Mademoiselle Privé" a été revisitée pour Shanghai et s'articule autour de trois adresses emblématiques, proposant chacune une immersion aux sources de la création de Chanel : le 31 rue Cambon - adresse mythique de la haute couture qui abrite le studio de création et ses ateliers -, le 18 place Vendôme - dédié à la haute joaillerie et à la réédition de "Bijoux de diamants", la seule et unique collection créée par Gabrielle Chanel en 1932 - et Grasse où le parfumeur Ernest Beaux et Gabrielle Chanel imaginèrent le parfum N°5 en 1921.
Sur la porte qui menait à son studio de création au troisième étage du 31 rue Cambon à Paris, Mademoiselle Chanel avait fait figurer la mention "Mademoiselle Privé".
1La haute couture, 31 rue Cambon
Franchir le seuil du 31 rue Cambon, c’est entrer dans la légende de Chanel, l'histoire de la plus ancienne maison de couture parisienne encore en activité, installée à cette adresse depuis 1918. C'est ici que la haute couture, première vocation de Chanel, se réinvente de saison en saison. Dans cette exposition, on découvre les arcanes du studio de création, des ateliers de haute couture, des salons réservés aux clientes, de l'appartement de Mademoiselle conservé à l’identique, sans oublier le mythique escalier, qui lui permettait de superviser ses défilés sans être vue.
Audacieuse, visionnaire, éprise de liberté, dès 1913, Gabrielle Chanel rompt avec les conventions de l’époque et libère les femmes des codes stricts d’une mode surannée. Elle révolutionne la silhouette avec des tenues souples et confortables en jersey pour libérer les femmes des corsets : la petite robe noire plébiscitée dès 1926, qui devient l'une des pièces iconiques, le tailleur en tweed créé dans les années 1950, vêtement rompant avec les conventions de l’après-guerre, à l’élégance désinvolte, masculin-féminin, devenu l’incarnation d'une élégance éternellement dans l'air du temps.
Son héritage est magnifié, à l'exemple de la petite robe noire ou du tailleur présents dans chaque collection, dont Karl Lagerfeld a réinventé mille variations, depuis son arrivée en 1983 comme Directeur Artistique.
3D, béton, alu, bois, néoprène... des pièces haute couture réinventées par Karl Lagerfeld
Des matériaux innovants ont souvent été détournés de leur usage initial à l’instar des sept thèmes traités dans l'exposition par le biais de trente-trois silhouettes issues de sept collections haute couture allant du printemps-été 2013 à l’automne-hiver 2018-19.
Le tailleur, créé par Gabrielle Chanel dans les années 1950 se réinvente en 3D à l'automne-hiver 2015-16. Il est conçu sans couture grâce au Selective Laser Sintering puis paré de galons et de broderies réalisées par la maison Lesage.
L'idée, c'était de prendre la veste la plus iconique du XXe siècle et d'en faire une version XXIe siècle, qui techniquement n'était même pas imaginable à l'époque où elle est née
Karl Lagerfeld
Karl Lagerfeld détourne aussi un matériau de construction : le béton qui apparaît sous forme de résilles aériennes ou de broderies précieuses sur des tailleurs et des robes du soir de la collection automne-hiver 2014-15. Brodée, tressée, surpiquée, mélangée à l'organza, la feuille d'aluminium prête elle aussi sa légèreté et son éclat métallique à des manteaux, pyjamas du soir et jupes longues à l'automne-hiver 2018-19. Pour le printemps-été 2016, les ateliers des métiers d'art réalisent des broderies qui mêlent perles, cristaux et paillettes à des copeaux, billes ou fragments de bois.
Le néoprène, habituellement réservé au sport, est utilisé dans la collection automne-hiver 2014-15 tandis que la dentelle - siliconée, brodée, découpée au laser - entre de plein-pied dans le XXIe siècle, comme le montrent deux robes printemps-été 2013 et automne-hiver 2014-15.
Matière fétiche de Mademoiselle Chanel dès la fin des années 1920, qu’elle découvre lors de ses voyages en Écosse avec le duc de Westminster, le tweed se réinvente. Des tissages mêlent laine, cuir, organza, velours mais aussi rubans de perles, de paillettes, de soie, fils de scoubidous... sur deux silhouettes de la collection printemps-été 2015.
2Grasse et le N°5 de Chanel
Icône des parfums de Chanel depuis sa création en 1921 le N°5 traverse les époques sans jamais perdre de sa modernité. C'est à Grasse, haut lieu de l'histoire de la parfumerie française où sont toujours cultivées quelques-unes des plus belles fleurs entrant dans sa composition, que ce parfum voit le jour dans le laboratoire d'Ernest Beaux. Première couturière à aborder l'univers de la parfumerie : Gabrielle Chanel refuse l'idée d'une fragrance directement liée à une odeur de fleur.
Je veux un parfum artificiel comme une robe, c'est-à-dire fabriqué. Je suis un artisan de la couture. Je ne veux pas de rose, de muguet, je veux un parfum qui soit composé
Gabrielle Chanel
Résultat : un bouquet de 80 senteurs dont les notes précieuses (rose de mai, jasmin, ylang ylang, santal, vanille, fleur d’oranger) se mêlent pour la première fois de l'histoire. À l'opposé des parfumeurs de ce début du XXe siècle, elle choisit non pas un intitulé poétique mais un numéro : le 5. C'est le chiffre que Gabrielle Chanel, attachée aux signes et aux symboles, s'est choisi comme porte-bonheur, celui de la date de présentation de ses collections souvent fixées le 5 février et le 5 août...
Pour habiller ce parfum, elle imagine le flacon le plus simple qui soit. Il est coiffé d'un bouchon taillé en émeraude, dont les contours rappellent ceux de la Place Vendôme qu'elle contemple depuis le balcon de sa chambre au Ritz Paris.
Mademoiselle Chanel qui fait de N°5 sa signature, lui prête son image, posant en 1937 devant l'objectif du photographe François Kollar dans son appartement du Ritz Paris pour une campagne publicitaire destinée aux États-Unis. En 1959, il devient une icône : son packaging est présenté au Musée d'Art Moderne de New York, Marilyn Monroe confie ne porter pour dormir que quelques gouttes de N°5 tandis qu'Andy Warhol immortalise son flacon.
3La haute joaillerie, 18 place Vendôme
C'est au 18 place Vendôme que Chanel a installé son studio de création et son atelier de haute joaillerie. Précisément au 5e étage, dont les fenêtres offrent une vue plongeante sur la colonne Vendôme et l'Hôtel Ritz Paris où Mademoiselle habitait.
En créant son unique collection "Bijoux de Diamants" en 1932, elle pose les bases de la haute joaillerie. Sa vision du bijou tranche avec celle des joailliers de la place Vendôme... Les pièces de cette collection expriment sa vision unique : elles ne comportent ni fermoirs, ni montures apparentes, ces dernières étant allégées pour gagner en souplesse. La plupart de ces bijoux se transforment : le collier se sépare en broche et bracelets, le pendentif s'accroche en clip.
Je veux que le bijou soit aux doigts de la femme comme un ruban
Gabrielle Chanel
Mademoiselle Chanel décline cinq thèmes : les étoiles, le soleil, les franges, la plume et le noeud. Rééditée aujourd'hui, la collection "Bijoux de Diamants", dont les pièces sont présentées dans l'exposition, n'a rien perdu de sa modernité. Le lion (son signe astrologique), le camélia dont elle a fait sa fleur emblématique, les perles, le blé porte-bonheur, ou les motifs empruntés aux paravents chinois de Coromandel dont elle s'entourait dans toutes ses demeures, de l'appartement du 31 rue Cambon à sa chambre au Ritz Paris, sont venus s'ajouter aux thèmes de la collection de 1932.
Les paravents réinterprétés par l'artiste chinois Wu Guanzhen
Mademoiselle Chanel qui découvre ces paravents pour la première fois à Paris chez un antiquaire se met à les collectionner.
La première fois que je vis un paravent de Coromandel, je m'écriai : comme c'est beau ! Je n'avais jamais dit cela d'aucun objet
Gabrielle Chanel
Pour l'exposition, ces paravents sont réinterprétés dans une version contemporaine par l'artiste chinois Wu Guanzhen qui a imaginé trois paravents de laque intitulés "Lofty Mountain", "Early Spring" et "Garden of Pleasure". Chacun d'eux met en scène les motifs du répertoire traditionnel : la montagne, les oiseaux, les fleurs tels que les voit un artiste aujourd'hui.
Exposition "Mademoiselle Privé"
20 avril au 2 juin 2019
West Bund Art Center.
No.2555 Longteng Ave. Shanghai
11 am - 8 pm
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