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Mes goûts et mes couleurs : Eugène Riconneaus, créateur de souliers et plasticien

Le créateur français Eugène Riconneaus préfère chausser les femmes sophistiqués et rebelles. Mais ce plasticien de la chaussure, qui prône l’émancipation, la transgression et la transversalité, a d'autres passions envahissantes : la peinture et le skate. Rencontre.
Article rédigé par Corinne Jeammet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Le créateur Eugène Riconneaus, février 2018 à Paris
 (Corinne Jeammet)

5 questions à Eugène Riconneaus :

Quelle est la pièce préférée de votre collection printemps-été 2018 ?
C’est le modèle Décolleté Splash en chevreau noir. Cet "art pieces" combine deux éléments qui me représentent : la couronne en placage d'or sur le haut du talon en référence aux reines est l'une de mes signatures. Le second élément, c’est le dripping (référence à Jackson Pollock qui utilisait les coulures et giclures de peinture). La peinture fait partie de mon AND de plasticien. Chaque soulier est une pièce unique : je pose les deux pieds côte à côte pour assurer une certaine symétrie, volontairement ça déborde sur la semelle. Je veux que ça reste brut. Ce modèle est décliné sur du cuir noir pour l’été 2018 et le sera en rouge pour l’hiver 2018-19.
Eugène Riconneaus : décolleté Splash en chevreau noir été 2018
 (Courtesy of Eugène Riconneaus)
Quel créateur vous a marqué au cours de votre carrière ?
Je suis très peu influencé par les créateurs de mode cependant je citerai comme référence le bottier Raymond Massaro. Hors mode l'artiste Julian Schnabel, un homme assez touche-à-tout qui a refusé d’être catégorisé dans un seul mouvement. Il est peintre, plasticien et réalisateur ("Basquiat", film biographique sur l’artiste américain, "Avant la nuit", adaptation du roman homonyme de Reinaldo Arenas...). Je suis assez touche-à-tout également, donc je m’y retrouve, cela m’inspire. Il a fréquenté aussi Azzedine Alaia pour une exposition de peintures à la Biennale de la mode.
Quel est le dernier livre lu ?
Pour moi, un livre, c’est un livre avec des images, un livre de photos comme celles du photographe et cinéaste Larry Clark avec lequel j’ai travaillé pour une exposition en 2015 à New York. Depuis de nombreuses années, je prends en photos les traces que laissent les roues des skates. Ces traces, je les travaille aussi avec de la peinture. J’ai ainsi fait beaucoup de photos au Palais de Tokyo, un spot de skate que j’ai fréquenté entre 2009 et 2014. Puis j'ai réinterprété des photos en noir et blanc de Larry Clark en y transposant les miennes de traces de skate. Il faut jouer avec les contrastes pour changer l’architecture de la photo et lui donner une autre dimension. Le skate m’a ouvert à une culture américaine, m’a donné des influences créatives. J’ai grandi avec le skate à une période où sa pratique n’était pas cool, quand tu vivais à la campagne. J'aime ce transport créatif issu du milieu urbain et de la rue. 
Eugène Riconneaus et Larry Clark
 (Dimitri Coste)
Quelle est la dernière exposition vue ?
C’est une exposition qui s’est tenue à la Galerie Rabouan Moussion à Paris d’un artiste Olivier Kosta-Théfaine qui avait réalisé tout un plafond à la flamme d'un briquet. Une œuvre intéressante faite de tags au briquet effectués de manière répétitive. Je citerai également l’exposition consacrée à Harmony Korin au Centre Pompidou fin 2017. C’était la première rétrospective et exposition des œuvres en France de ce cinéaste, artiste, peintre et écrivain américain. 
Quel est le dernier coup de cœur musical ?
Bagarre mais aussi James Chance and the Contortion, un genre de punk-jazzy qui explose les oreilles. C'est très transgressif.

créateur et artiste, il navigue entre royauté et skate culture

Né à Blois, Eugène Riconneaus a été influencé très jeune par la royauté, l’ornement, les armures.... La royauté, qui se retrouve dans ses créations, émane de souvenirs de son enfance et de ses visites au château de Chambord : la couronne en or à l’arrière de ses escarpins affirme l’autorité et le pouvoir, tandis que la soie évoque le raffinement de Marie Antoinette. Ses créations sont entièrement réalisées à la main en France, Italie et Portugal.

Le créateur Eugène Riconneaus, février 2018 à Paris
 (Corinne Jeammet)

Sa proximité avec l’art le positionne autant comme artiste plasticien, photographe que chausseur. Cet artiste, issu de la culture underground et skateboard, a ainsi exposé en collaboration avec le réalisateur Larry Clark. A chaque saison, le créateur présente une exposition exclusive d’oeuvres (peintures) connectées à ses souliers. Sa collection printemps-été 2018 propose des créations inspirées, entre autres, de Marie-Antoinette avec son modèle Royal, sorte de lingerie de pied en soie, qui rend hommage à celle qui sublimait son cou de broderies tandis que sa mule bondage Thorn est inspirée de gravures du 17e siècle. 

Eugène Riconneaus : modèle Royal
 (Courtesy of Eugène Riconneaus)

Outre sa marque de souliers féminins, Eugène Riconneaus a lancé une marque masculine de sneakers Undun. Un label qui retrace l’histoire de la culture skate et street, dévoile des modèles inspirés des codes et de l’atmosphère d’un lieu ou d’une ville : Down Town 1963. 

Le créateur a réalisé pour la Saint Valentin, un escarpin en chevreau rouge "L’épine au pied". Il dit s’être "inspiré d’une femme qui n’aime pas la Saint Valentin mais qui aime que l’on lui souhaite". Il a aussi réalisé pour le salon Première Vision Accessories (Paris Nord Villepinte) une exposition de 15 œuvres artistiques uniques. Pour cette collaboration avec Dr. Martens, le designer a revisité des modèles emblématiques de la marque britannique via la customisation en y intégrant plumes, rubans, strass, broderies et textiles. "La transgression, l’émancipation, la transversalité sont au fondement de mon travail créatif que vous pourrez découvrir à travers ce projet d’exposition" explique le designer.

Exposition Eugène Riconneaus & Doc Martens
 (DR)

 


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