Avec "La Langue des choses cachées", Cécile Coulon signe un conte fiévreux sur les secrets enfouis et la violence des hommes

Le dernier roman de Cécile Coulon, publié aux éditions de L'Iconoclaste, explore les mystères de la nature et de l'âme humaine. Une langue ciselée et poétique pour dire la noirceur des hommes et la brutalité des paysages.
Article rédigé par Ariane Combes-Savary
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Cécile Coulon, le 28 septembre 2019. (JOEL SAGET / AFP)

L'histoire : À la tombée du jour, un jeune guérisseur, héritier d'un pouvoir mystérieux transmis par sa mère, se rend au chevet d'un enfant, dans le village reculé du Fond du Puits, à l'endroit même où sa mère est venue porter secours des années plus tôt à une âme en souffrance. Il s'apprête à vivre une expérience initiatique dont ni lui ni les habitants du hameau ne sortiront indemnes.

Les colères sourdes et les blessures

Dans une langue poétique qui n'appartient qu'à elle, Cécile Coulon explore dans son neuvième roman publié en janvier les non-dits et les murmures. Les colères sourdes et les blessures qui se transmettent d'une génération à l'autre. Elle y conte une fois encore le pire et le meilleur des hommes. La noirceur du monde, la force et la lumière dans un même élan puissant, inéluctable.

L'écrivaine et poétesse, lauréate du prix littéraire Le Monde en 2019 pour Une bête au paradis (L'Iconolaste), du prix Apollinaire en 2018 pour son recueil de poèmes Les Ronces (le Castor Astral) et du prix des Libraires en 2017 pour Trois saisons d'orage (éditions Viviane Hamy), n’a pas son pareil pour planter le décor, décrire les personnages et nous plonger dans une ambiance mystérieuse, celle de cette nuit de tous les possibles. Cette nuit où l’on sait dès le départ que tout va basculer et l'on découvre au fil du récit comment et pourquoi.

Le feu et la fièvre

Quelle est donc cette langue des choses cachées que seuls le héros guérisseur et sa mère vieillissante sont capables de parler ? C’est celle que l'on apprend lorsqu'on "décide de se taire et qu'on essaye de comprendre ce qui se cache dans les conversations, ce qui se cache dans les maisons, dans les corps et sous les corps", raconte la romancière dans une interview accordée à Augustin Trapenard dans l'émission "La Grande librairie".

La langue des choses cachées dit le feu, elle dit l’horreur et la vengeance, elle dit aussi le ventre des femmes meurtri à jamais. Le roman aux allures de fable fait des paysages des personnages à part entière et fouille les secrets les plus enfouis, jusqu'aux entrailles, quitte à bouleverser le destin de ces hommes "beaux avec leurs yeux pleins d'amour et leurs mains pleines de sang".

Un roman court, à lire d'une traite pour garder le feu et la fièvre jusqu'à la dernière page.

Couverture du roman "La Langue des choses cachées" de Cécile Coulon, janvier 2024 (éditions L'Iconoclaste). (QUINTIN LEEDS)

Extrait de "La Langue des choses cachées", page 16 :

"Il comprend pourquoi sa mère l'a envoyé à sa place : elle n'a plus l'âge de marcher jusque-là. Elle n'a plus l'âge d'affronter cette solitude, ces vallées enfoncées. Lui doit apprendre que le soleil, ici, est meurtrier, que l'eau est si froide qu'elle écrase le ventre, que la nuit les deux collines se rapprochent pour tenir entre leurs cuisses les maisons au chaud jusqu'à l'aube. Sa mère n'a plus l'âge d'entrer en ces lieux. Il le sent, depuis la pente qui tourne entre des bosquets de genêts et des corridors de fleurs de carotte. Il n'a aucun troupeau, aucun barbelé aux rives des champs, pas d'affût de chasse à l'orée des bois. Entre les basses collines, il n'y a rien que le Fond du Puits.

Il se demande s'il s'en sortira vivant."

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