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Après le fakir, Puértolas raconte "La petite fille qui avait avalé un nuage..."

Après les aventures rocambolesques d’un fakir (un carton en librairie), le romancier Romain Puértolas récidive avec une fable moderne narrant les aventures d’une jeune factrice pleine d’énergie en quête de maternité. Si on y retrouve l’humour de son premier roman, "La petite fille qui avait avalé un nuage grand comme la Tour Eiffel" (Le Dilettante) s’enlise un peu dans un excès de bons sentiments.
Article rédigé par Laurence Houot
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Romain Puértolas publie son deuxième roman "La peitite fille qui avait avalé un nuage grand comme la Tour Eiffel" (Le Dilettante)
 (Eric Clément )
L’histoire :
Providence Dupois est une jeune factrice pleine d'énergie, un fort caractère ne mâchant pas ses mots. Elle aurait pourtant de quoi s'apitoyer sur elle-même, privée qu'elle est de pouvoir donner naissance à un enfant. Mais rien n'entrave son optimisme naturel. Lors d'un voyage au Maroc qui se termine aux urgences pour cause d'appendicite, la jeune femme rencontre une petite fille atteinte de mucoviscidose (mais dans la langue de Puértolas on dirait plutôt qu'elle a avalé un nuage grand comme la Tour Eiffel). Elles s'entendent si bien que la factrice décide de l'adopter. Hélas, quand le grand jour arrive, celui où Providence Dupois doit aller chercher Zahera pour la ramener en France, un gros nuage de fumée en provenance d'Islande a envahi le ciel et cloue tous les avions de tous les aéroports parisiens au sol. Qu'à cela ne tienne, Providence Dupois ira coûte que coûte au Maroc chercher sa fille.

Humour et fantaisie

Le décollage en bikini à l'aéroport d'Orly après un stage intensif pour apprendre à voler dans une communauté de moines écoutant Julio Iglesias donne le ton de ce deuxième roman. On y retrouve la loufoquerie du "fakir" (il apparaît d'ailleurs dans ce nouveau roman), des rebondissements invraisemblables, des noms insensés, des dialogues relevés… En plus d'un goût prononcé pour les titres rigolos et à rallonge, on y retrouve donc la patte amorcée dans son premier roman, un mélange de l'univers de Jeunet, un peu de Pennac, un soupçon de Queneau, et de belles trouvailles.

Excès de bons sentiments

Hélas, la drôlerie de ce récit rocambolesque est un peu plombée par un excès de bons sentiments et une morale trop voyante. Pire : au lieu de nous laisser rêver avec son extraordinaire héroïne, Puértolas invente autre histoire (qu'on ne dévoilera pas) pour faire passer l'invraisemblance de son récit, tout en nous disant que "tout est vrai puisque je l'ai inventé" et aussi comment c'est bon de raconter et de croire aux belles histoires inventées pour supporter la violence de la vie… Pourquoi Romain Puértolas a-t-il éprouvé le besoin de justifier la fantaisie et le surréalisme de son histoire ? C'est dommage. Il brise inutilement la magie d'un récit réussi dans le registre qu'il a choisi (et qui confirme un style).

Après le succès phénoménal du très réussi "fakir", ce deuxième roman un peu moins enlevé est néanmoins truffé de bonnes petites choses. On attend donc le prochain livre de ce romancier imaginatif pour redécoller.
 
La petite fille qui avait avalé un nuage grand comme la Tour Eiffel Romain Puértolas (Le Dilettante – 253 pages – 19 euros)

Extrait :
"L'avantage d'avoir un sens de l'odorat ultradéveloppé, c'est qu'elle pouvait reconnaître les stations de métro à leur odeur bien particulière. Comme les empreintes digitales, elles en avaient toutes une et elle était unique. Ainsi, Nation sentait le croissant chaud, gare-de-Lyon, la pisse, Concorde, le pigeon sale, Châtelet-les-Halles, le café. Elle en était arrivée à la conclusion que Paris possédait plus de stations aux odeurs repoussantes qu'agréables. Si elle avait été élue mairesse de la capitale, elle aurait commencé par parfumer les stations, chacune de l'odeur d'une fleur différente. Sa station à elle sentait la Javel et le citron. Mais c'était bien normal, car chaque fois qu'elle entrait dans le métro le matin pour se rendre à la Poste, une dame était en train de passer la serpillère. Elle sentait le poisson (la station, pas la dame), le mardi, le jeudi et le dimanche parce que c'était jour de marché. Elle sentait le riz cru aussi, le samedi, parce que c'était jour de mariage."

Portrait de Romain Puértolas
Reportage : Carine Alazet, Valérie Cohen, Laurence Chraïbi
Revoir La grande Librairie du 22/01/2015 avec Roman Puértolas

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