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Polémique chez Gallimard après la publication d'un éloge d'Anders Breivik par Richard Millet

Richard Millet, auteur de nombreux ouvrages et membre du comité de lecture de Gallimard, vient de signer un texte qui encense le Norvégien Anders Behring Breivik, condamné à 21 ans de prison pour le meurtre de 77 personnes l'an dernier. La polémique enfle au sein de la maison d'édition.
Article rédigé par Clara Beaudoux
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (BALTEL/SIPA Autre)

Une situation bien embarrassante pour la maison d'édition Gallimard. Richard Millet y est éditeur depuis plusieurs années. Membre du prestigieux comité de lecture de la maison, il a écrit une cinquantaine de romans et d'essais, dont l'un a obtenu le prix de l'Académie française en 1994. C'est aussi lui qui a été l'éditeur d'Alexis Jenni, Goncourt 2011, et de Jonathan Littell, Goncourt 2006.

Bref, un auteur clé de la maison d'édition. Mais voilà, ses positions politiques commencent à gêner ses collègues. Le 24 août, un texte de Richard Millet intitulé "Eloge littéraire d'Anders Breivik", du nom du militant d'extrême-droite qui avait tué 77 personnes en Norvège en juillet 2011, est publié dans un recueil aux éditions Pierre-Guillaume de Roux. Hasard du calendrier ? Le jour de parution de ce recueil est aussi celui de la condamnation d'Anders Breivik par la justice norvégienne.

Anders Breivik "est sans doute ce que méritait la Norvège" 

Dans ce petit texte de 18 pages, Richard Millet explique qu'il n'approuve pas le
geste du tueur, mais il évoque sa "perfection formelle ", sa dimension
"littéraire ". L'auteur s'appuie sur cette histoire pour critiquer pêle-mêle
la social-démocratie, l'immigration,  l'affaiblissement de la langue, le multiculturalisme, comme il
l'avait déjà fait dans d'autres ouvrages. À propos d'Anders Breivik il écrit : "il est sans doute ce que méritait la Norvège et ce qui
attend nos sociétés qui ne cessent de s'aveugler
".

Des auteurs mettent en cause sa présence dans le comité de lecture

L'éditeur de ce texte, Pierre-Guillaume de Roux, explique quant à lui
que ce texte ne peut pas se comprendre sans les deux autres ouvrages publiés en
même temps. Pour lui, ces propos s'inscrivent dans la tradition du pamphlet, qui grossit
le trait de manière volontaire, et n'est pas matière à polémique.

Mais du côté des autres auteurs de Gallimard, le sentiment est mitigé. "La question d'une réaction collective est maintenant posée à tous les écrivains Gallimard ", réagissait lundi Annie Ernaux dans Le Monde , remettant en cause la présence de l'auteur au sein du comité de lecture de la maison d'édition. 

"Chacun a le droit de penser et d'exprimer ce qu'il veut"

D'autres auteurs sont moins intransigeants et s'inquiètent davantage de cette "levée de boucliers "."Ces textes sont attérants de bêtise ", reconnaît l'écrivain Jean-Marie Laclavetin, "mais je pense aussi qu'il faut faire très attention a la police de la pensée : chacun a le droit de penser et d'exprimer ce qu'il veut. " "Pour moi ce serait très grave que Gallimard le renvoie ", ajoute-t-il.

D'autres évoquent enfin une manière d'attirer l'attention. Dans un autre ouvrage, Richard Millet indiquait : "Je suis un des écrivains français les plus détestés. Position intéressante, qui fait de moi un être d'exception. "

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