Les maisons closes de 1860 à 1946 s'ouvrent au regard dans une exposition et deux ouvrages remarquables
La galerie Au Bonheur du Jour, à Paris, expose 400 objets et publie "Les Maisons closes" ainsi que "Décors de bordels" : historique et osé en ces temps corsetés.
Après l’exposition du Musée d’Orsay de 2015-16, la galerie Au Bonheur du Jour, à Paris, expose à son tour 400 objets sur la prostitution du XIXe à 1946. Galeriste, Nicole Canet est également auteure et éditrice de Les Maisons closes, qui accompagne l’exhibition, et de Décors de bordels : une proposition historique mais pas que...
Les Enfers
Il faut de la passion à Nicole Canet pour tenir une galerie érotique de nos jours. Collectionneuse des "Enfers", département érotique de la littérature, la galeriste est une iconographe incomparable et partageuse de son érudition encyclopédique. A l’heure de MeToo, le sujet de la prostitution est à prendre avec des pincettes, alors qu’il est totalement éclipsé du discours ambiant.
Aux cimaises d’Au Bonheur du Jour, s’affichent dessins, peintures, photographies, des œuvres rares, originales, et uniques : un célèbre tirage de Brassaï par son auteur, des caricatures de Matrat (fin XIXe), des eaux-fortes colorées des années folles de Léon Courbouleix, des encres gouachées d’André Braval au sortir de l’Occupation, des huiles anonymes étonnantes… Un esemble inédit qui sort de l'oubli et de l'ignorance, non seulement des artistes négligés, mais aussi leurs précieux témoignages d'une époque révolue.
Dans une alcôve discrète, deux très rares tableaux à système (amovible), destinés aux entrées des "maisons", sont exposés parmi d'autres curiosités réjouissantes. Parmi elles, deux cannes de flagellation richement ciselées côtoient des figurines grotesques et animées, ou des photographies en relief… Une caverne de stupre à faire rougir un cardinal.
Deux ouvrages d’exception
Prolongement de l’exposition, Maisons closes est une belle monographie de Nicole Canet qui enrichit considérablement l'accrochage in situ. Construit par thèmes - les courtisanes, les lieux, les pensionnaires, les proxénètes… l’ouvrage égraine les multiples facettes de mœurs disparus, grâce à la riche iconographie personnelle de l’auteure, complétee par quelques autres. Auto-édité, Maisons closes est seulement disponible à la galerie Au Bonheur du Jour ou sur son site, dans l’attente d’une distribution plus large : avis aux libraires !
Complémentaire du précédent ouvrage, Décors de bordels – 1860-1946, de Nicole Canet et Etienne Cance, toujours auto-édité, visite les "maisons" de la Belle époque, à Paris, dans les régions et en Afrique du Nord. Du luxueux Chabanais parisien à ses huit modestes déclinaisons au Maghreb, en passant par L’Etoile bleue de Tours ou le Tabarin d’Avignon, c’est un guide rose qui s’offre au lecteur. Le Chabanais, que fréquentait assidument le Prince de Galles, futur Edouard VII, reste le lieu le plus réputé du monde. Le One Two Two n’est pas mal non plus, avec sa chambre médiévale, ou le plafond peint du 59 rue du Château d’eau. Margot dans son fourreau, Lina en guêpière, Douchka et son fouet… sont les guides de ce parcours sulfureux, où l’iconographie inédite le dispute aux anecdotes d’un autre temps.
Maisons Closes - 1860-1946
Exposition-vente à la galerie Au Bonheur du Jour
1, rue Chabanais, 75002 Paris
Du mardi au samedi 14h30-19h
Sur rendez-vous jusqu'au 19 mai, puis accessible à tous jusqu'à fin juin
Maisons closes
De Nicole Canet
Editions de la galerie Au Bonheur du Jour
479 pages français/anglais, relié, 800 exemplaires numérotés - 89 euros
Décors de bordels
Nicole Canet et Etienne Cance
Editions de la galerie Au Bonheur du Jour
416 pages, relié, 800 exemplaires numérotés - 79 euros
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