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"An American Odyssey" : un livre géant sur un pays gigantesque

Un poids de six à sept kilos, des dimensions hors normes (29 X 39,5 cm), 612 pages reproduisant des photographies, pour la plupart pleines pages, voire dépliantes : "An American Odyssey", de Marc Walter et Sabine Arqué, rassemble les premiers clichés en couleurs, de 1888 à 1924, du Nouveau monde. Un ouvrage à l’échelle d’un pays "bigger than life" en pleine mutation.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
Anonyme, "Sunset from the Battery, New York", photochrom
 (Anonyme, Collection Marc Walter - Editions Taschen)

"An American Odyssey", c’est un peu "naissance d’une nation", pour reprendre le titre du célèbre film de D. W. Griffith. Toutes les photographies reproduites ici témoignent de l’impact de la Révolution industrielle sur le devenir d’un pays, parti en retard par rapport à l’Europe, au sortir d’une guerre civile traumatique, ou contre le Mexique, qui va mettre les bouchées doubles pour finalement arriver au premier rang par ses performances économiques.

Le Grand canyon
 (Taschen)
Cette démesure semble déduite de la géographie-même de l’Amérique du nord. La grande variété des paysages, les chaînes montagneuses gigantesques, les vastes déserts, les lacs grands comme des mers intérieures, les forêts à perte de vue aux ramures lancées telles des fusées vers le ciel, les canyons tracés par quelque titan antique… s’avèrent les déterminants qui ont façonné la mentalité, sinon l’idéologie américaine, où tout est plus grand qu’ailleurs. "An American Odyssey" ne pouvait être qu’aux dimensions de l’Amérique pour véritablement en rendre compte.   
Types amérindiens, photographies reproduites dans "An American Odyssey" de Marc Walter et Sabine Arqué
 (Taschen)
Etat par état, l’ouvrage visite toutes ces variétés mais aussi ceux qui les habitent. Les cow-boys toujours présents, comme les Amérindiens des origines, tout juste décimés dans les guerres indiennes, les esclaves afro-américains, puis les citadins des grandes villes, aussi immenses que les paysages qui les ont vu naître, se retrouvent de page en page pour retracer une historicité. Celle-ci passe par la priorité donnée à l’image, le texte étant concentré dans leurs légendes. Cette énumération et mise en perspective par le choix éditorial reflètent les contradictions d’un pays qui porte la liberté tel un drapeau, et la violence répressive qui a imposé la nation.
Train sur un pont, symbole de la fédération des Etats-Unis par le réseau ferroviaire 
 (Taschen)
Il faut y ajouter la donne technologique qui prend une grande place dans "An American Odyssey". Nombre des photographies reproduites glorifient les avancées techniques en cours. Au premier chef le réseau ferroviaire qui permit de fédérer, d'unifier le pays, mais également les navires à aube et à vapeur, puis l’élévation des gratte-ciels des grandes cités, dont le nom traduit une nouvelle démesure. Ce n'est pas un hasard si ce terme est né dans le pays qui les regroupe toutes. Enfin, le procédé photographique en couleurs traduit l’avant-gardisme de la nation américaine sur son temps.
Immeuble en construction et finalisé à New York
 (Taschen)
Ces photochromes, un procédé suisse datant de 1889, précèdent de quatorze années les autochromes des frères Lumière finalisées en 1903. Si les nuances sont moins subtiles, puisque les couleurs émanent du processus de reproduction et non de la prise de vue, elles n’en traduisent pas moins une réalité tangible imprégnée de poésie. Aussi, "An American Odyssey" se révèle un témoignage multiple sur les Etats-Unis, d’un point de vue historique, documentaire, idéologique et artistique unique, aux qualités éditoriales exceptionnelles.
"An American Odyssey" : première de couverture
 (Taschen)
An American Odyssey
Marc Walter et Sabine Arqué
Editions Taschen
Relié, avec pages dépliantes, 29 x 39,5 cm, 612 pages
150 €
Edition multilingue: Allemand, Anglais, Français

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