Jeux vidéo : comment Activision s'est relancé avec le lancement record de "Call of Duty : Modern Warfare II"
Le jeu vidéo "Call of Duty : Modern Warfare II" sorti le 28 octobre a engrangé un milliard de dollars de recettes en seulement 10 jours. Un record pour un opus de cette franchise. Un succès pour l'éditeur Activision-Blizzard qui s'est inspiré du célèbre jeu "Fortnite" pour se relancer.
C'est une éclaircie dans le ciel orageux qui grondait depuis quelques mois au-dessus des studios du géant des jeux vidéo Activision-Blizzard, racheté par Microsoft pour 69 milliards d'euros en janvier 2022.
Le jeu de tir à la première personne Modern Warfare II, dernier opus de la suite à succès Call of Duty bat des records depuis son lancement le 28 octobre. Selon un communiqué du groupe Activision-Blizzard, le jeu, qui campe un conflit entre le groupe terroriste fictif Al-Qatala et les Etats-Unis, a engrangé un milliard de recettes en 10 jours. Du jamais-vu pour la franchise. Après le semi-échec de Call of Duty : Vanguard en 2021, la réussite de ce lancement soulage l'éditeur Activision-Blizzard qui a navigué dans des eaux troubles ces derniers mois.
Avant son rachat par Microsoft, le groupe Activision-Blizzard était en proie à une profonde crise interne. La direction est accusée d'avoir laissé perdurer des discriminations et d'avoir favorisé une culture du harcèlement sexuel dans ce groupe de près de 10 000 employés. En externe, l'éditeur s'était aussi mis à dos une large frange des fans de l'iconique jeu Diablo, avec en juin 2022 la sortie sur mobile de la version Diablo Immortal, qui n'a pas du tout plus à la communauté.
"Call of Duty" s'inspire désormais de "Fortnite"
Pour reconquérir un large public avec Call of Duty : Modern Warfare II, Activision-Blizzard a donc mis les bouchées doubles. D'abord en ciblant bien son investissement : le jeu originel Modern Warfare a été très apprécié des gamers. Puis en élargissant sa suite à un public plus large que les habituels fans de Call of Duty.
"La clé du succès de Modern Warfare II, c'est sa "fortinisation" (terme tiré du jeu Fortnite, NDLR). Cette série qui allait chercher le public grâce à son réalisme a soudainement noué des partenariats avec d'autres univers ou des marques. On peut jouer dans le décor du film Godzilla, on peut aussi y incarner des joueurs de foot, comme Lionel Messi. On casse la véracité de l'univers pour aller vers quelque chose de plus festif. Cela créé une connexion avec le public du jeu Fortnite", analyse David Javet, chercheur spécialiste des jeux vidéo à l'université de Lausanne.
"Il n'y a jamais eu une période de l'histoire où tant de monde a possédé une console"
David Javetchercheur spécialiste des jeux vidéo à l'université de Lausanne
Pour vendre son jeu comme des petits pains, Activision-Blizzard a aussi lancé une très agressive campagne de publicité. "Ils ont mis les bouchées doubles en marketing pour faire une belle année 2022 avec ce jeu. Ils ont même employé des firmes qui ont proposé aux médias des articles pré-écrits sur la sortie du jeu", note David Javet. Dans une vidéo postée le 7 novembre, la youtubeuse Jim Sterling a ainsi rapporté le cas d'une journaliste qui a reçu un e-mail d'une agence de communication lui proposant un code pour tester le jeu Modern Warfare II, mais aussi, si besoin, des articles pré-écrits (à la gloire du jeu), prêts à publier.
Enfin, le succès marque l'apogée de l'industrie du jeu vidéo, selon David Javet. "Il n'y a jamais eu une période de l'histoire où tant de monde a possédé une console. On a là un jeu qui a été développé sur pratiquement toutes les plateformes et qui est accessible à presque l'ensemble des joueurs de jeux vidéo".
Une enquête ouverte par l'UE sur le rachat d'Activision
Le ciel n'est pas redevenu tout bleu pour autant au-dessus des studios d'Activision-Blizzard. La Commission européenne a annoncé mardi 8 novembre l'ouverture d'une enquête approfondie sur le projet de rachat d'Activision-Blizzard par Microsoft, jugeant que cette opération pouvait réduire la concurrence sur le marché.
La Commission européenne, gardienne de la concurrence dans l'UE, a expliqué craindre en particulier que Microsoft puisse "verrouiller l'accès aux jeux vidéo d'Activision-Blizzard" pour consoles et PC dont le célèbre Call of Duty, et qu'il soit tenté de mettre en place "des stratégies d'éviction des distributeurs concurrents". De telles stratégies pourraient entraîner "une hausse des prix, une baisse de la qualité et une réduction de l'innovation", s'est-elle inquiétée dans un communiqué.
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