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Et Tony Soprano créa la série moderne

James Gandolfini est mort mercredi d'une crise cardiaque. Il a interprété pendant six saisons un chef de clan mafieux dans "Les Soprano". Francetv info vous dit pourquoi cette série a influencé les fictions d'aujourd'hui.

Article rédigé par Nora Bouazzouni
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le parrain du clan DiMeo, Tony Soprano (au milieu), incarné par James Gandolfini, et ses acolytes. (HBO / KOBAL / AFP )

Le Syndicat des scénaristes américains venait d'élire Les Soprano série la mieux écrite de tous les temps, devant Seinfeld. L'acteur qui a incarné son héros pendant six saisons, James Gandolfini, est mort d'une crise cardiaque à 51 ans, mercredi 19 juin. De 1999 à 2007, pendant quatre-vingt-six épisodes, soit presque quatre-vingt-six heures, on a pu suivre les péripéties du parrain angoissé de la famille DiMeo, clan mafieux du New Jersey. Francetv info vous dit pourquoi Les Soprano ont révolutionné la série télé.

Une influence considérable

Créés en 1999, diffusés quelques mois avant la cultissime A la Maison Blanche, Les Soprano ont marqué un tournant dans l'histoire des séries télé. David Chase, son créateur, a changé la donne avec un personnage principal d'une complexité rare pour l'époque, ainsi qu'une narration et un scénario d'une finesse avec laquelle, encore aujourd'hui, peu de fictions peuvent rivaliser. Clôturant la décennie où le soap était roi, Les Soprano ont inauguré l'âge d'or des dramas, les années 2000, qui ont vu naître des séries magistrales telles que Six Feet Under, The Shield, The Wire, et leurs derniers rejetons, comme Breaking Bad ou Mad Men.

Les Soprano, récompensés par vingt Emmy Awards et cinq Golden Globes, sublimaient le réel comme jamais ne l'avait fait la télévision, jusqu'alors considérée comme inférieure au cinéma. La série avait "la picaresque entropie du monde réel, mais chaque détail, chaque mélodie entendue ça et là, chaque remarque glanée à la table voisine, chaque artefact entrevu à l'arrière-plan d'une pièce bondée, brillait comme s'il avait été choisi avec une attention obsessionnelle", écrivait le critique Geoffrey O’Brien en 2007 dans un hommage (en anglais) à la série tout juste défunte.

A l'instar de la série Oz, sortie deux ans auparavant, Les Soprano offrent une qualité cinématographique sur la forme, et une profondeur narrative qu'aucun film de deux heures ne pourra jamais atteindre. "Quand on regarde une série comme Les Soprano, on dirait qu'elle explore le récit d'une manière différente. Des choses se passent dans un épisode, et vous n'en entendrez plus parler pendant trois ou cinq épisodes, ou jusqu'à la saison suivante. Un peu comme dans la vie", disait Jason Katims, producteur exécutif de Friday Night Lights, dans un article du Chicago Tribune (en anglais). "La série ne nous a pas seulement montré ce dont était capable la télévision, elle nous a montré ce dont était capable le récit filmé", écrivait Maureen Ryan.

Un antihéros cruel et sympathique

Edie Falco et James Gandolfini dans "Les Soprano" (AFP / KOBAL)

Mafioso complexe et angoissé à l'enfance difficile, à 40 ans, Tony Soprano cherche un sens à sa vie. A la fois père, mari, ami et chef, il doit protéger son clan et son business, au prix parfois de la vie de ceux qui les menacent. Son personnage introduit à un public habitué aux méchants qu'il adore détester (comme J.R. Ewing, de Dallas) la figure du monstre attachant, dont Dexter, Walter White (Breaking Bad) ou Vic Mackey (The Shield) sont les héritiers. Cruel, machiste, infidèle… On se surprend pourtant à espérer que Tony, dont les crises de panique le poussent à entamer en secret une psychothérapie, réussisse par exemple à liquider ce type qui en sait trop et l'empêche de dormir la nuit.

Ce tueur impitoyable et bedonnant, mais vulnérable et humain après tout, qui sort relever le courrier en peignoir dans sa banlieue cossue du New Jersey, se dévoile devant la docteure Jennifer Melfi – et le spectateur. Les scénaristes des Soprano ont fait de la figure du parrain un antihéros nuancé pour lequel le public éprouve de l'empathie et auquel il réussit à s'identifier. Ses crimes sont les fantasmes que la plupart d'entre nous n'oseront jamais réaliser, mais ses doutes sont bien les nôtres. "La seule différence entre lui et tous ceux que je connais est qu'il est le Don du New Jersey", disait Chris Albrecht, à l'époque PDG de la chaîne HBO qui diffusait la série.

Tony Soprano a fait des petits

Souvent mis en scène au cinéma, le parrain a pendant longtemps été oublié des séries télé. Mais Tony Soprano a fait des petits. Dans Sons of Anarchy, Jackson "Jax" Teller dirige un gang de motards qui fait régner l'ordre dans une ville de Californie. Walter White (Breaking Bad) et Nancy Botwin (Weeds) deviennent dealers pour subvenir aux besoins de leur famille et finissent par concurrencer les puissants trafiquants de la région.

La France n'est pas en reste depuis 2006 et la diffusion de Mafiosa, où Sandra Paoli se retrouve, à 30 ans, à la tête d'un puissant clan mafieux corse après l'assassinat de son oncle.

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