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Un court métrage sur "Shoah" aux Oscars : Claude Lanzmann est "fier"

Claude Lanzmann est "très fier" qu'un documentaire sur la genèse de "Shoah", son film monumental sur l'extermination des juifs, soit en lice pour les Oscars, même s'il trouve "cocasse" ce choix d'un court métrage sur l'un des plus longs films de l'histoire.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Temps de lecture : 3 min
Claude Lanzmann en août 2013
 (Baltel / SIPA)

Réalisé par le journaliste britannique Adam Benzine et coproduit par Arte et ZDF, "Claude Lanzmann, porte-parole de la Shoah" ("Claude Lanzmann : Spectres of the Shoah") sera en compétition aux Oscars dans la catégorie du meilleur court métrage documentaire le 28 février.
              
Arte en diffuse une version mercredi soir pour commémorer la libération du camp d'extermination d'Auschwitz le 27 janvier 1945.
              
"Je suis très content d'aller à Hollywood", déclare à l'AFP Claude Lanzmann, 90 ans, qui ne doute pas un instant que le documentaire sera récompensé et a bien l'intention de faire le déplacement jusqu'à Los Angeles.


30 ans de consécrations mais pas d'Oscar       

"Cela me fait à la fois plaisir et un peu rire parce que 'Shoah' est un des plus longs films de l'histoire du cinéma et va recevoir un Oscar pour un court métrage. Je trouve cela cocasse", relève-t-il de sa voix rocailleuse.
              
"J'en ai depuis 30 ans des consécrations !", ajoute le cinéaste qui a reçu de multiples récompenses, mais n'a jamais eu d'Oscar. "Je suis très fier !".
              
Claude Lanzmann a "évidemment" souvent été sollicité pour raconter la genèse de "Shoah". Mais Adam Benzine "a tellement insisté" qu'il a fini par accepter de lui raconter le travail titanesque qu'a nécessité ce film de 09h30  auquel il aura consacré douze ans de sa vie. "Il n'y a jamais eu un film sur la Shoah comme le mien", souligne Claude Lanzmann.
              
Le court métrage du Britannique mêle entretiens, extraits du film et images d'archives, dressant en filigrane le portrait de Claude Lanzmann, qui confie avoir connu des moments de grand découragement pendant ces douze ans. Au point, dit-il, d'avoir pensé au suicide.

Un court métrage "plutôt bien"           

De 1973 à 1985, il s'est rendu dans quatorze pays à la recherche de survivants juifs, de témoignages de ce qu'il nomme le "crime parfait" commis à  l'échelle industrielle par les nazis pour effacer tout indice d'extermination.
              
Parmi les moments forts retenus par Adam Benzine, cet extrait où le coiffeur Abraham Bomba est interrogé par Claude Lanzmann sur ce qu'il a vécu dans le camp de Treblinka où il devait couper les cheveux des juifs qui allaient être gazés.
 
Quand "Shoah" est sorti pour la première fois à la télévision, "les  négationnistes avaient imprimé des tracts où il était écrit : 'Ouvrez les yeux,  fermez la télé'", se souvient Claude Lanzmann.
              
Il juge le court métrage d'Adam Benzine "plutôt bien", même si certains choix du réalisateur britannique l'ont "gêné". "Par exemple, qu'il ait donné la parole à ce fou furieux de Marcel Ophüls dès le début du film. Je n'aime pas ça !", maugrée-t-il.

Des images inédites dont Claude Lanzmann conteste l'utilisation    

Le réalisateur du "Chagrin et la pitié", Marcel Ophüls, souligne au début du court métrage que "'Shoah' est un chef-d'oeuvre" avant de lancer : "Lanzmann était mon ami et ne l'est plus. C'est un mégalomane."
              
Le Britannique a réussi aussi à se procurer des images inédites d'un entretien avec le nazi Heinz Schubert, filmé en caméra cachée par Lanzmann qui dit avoir failli "être assassiné par la famille" de celui-ci pendant le tournage.
              
Ce n'est "pas juste" de révéler "des images dont je ne me suis jamais servi", "sans ma permission", affirme Claude Lanzmann. "Je les avais laissées en dépôt au Musée de l'Holocauste à Washington, qui était autorisé à les montrer uniquement à des chercheurs".
              
Des 300 heures de rushs inexploités de "Shoah", Claude Lanzmann a ensuite tiré d'autres films, "Un vivant qui passe", "Sobibor", "Le rapport Karski". "Je vais bientôt en sortir quatre autres", assure-t-il, sans en dire davantage.
              
Un autre film sur les camps d'extermination nazis, "Le fils de Saul" du Hongrois Laszlo Nemes, est nominé pour l'Oscar de la meilleure fiction en langue étrangère. "C'est un film pur, intelligent", dit Claude Lanzmann, "une sépulture pour les juifs de Hongrie".

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