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"The Third Murder" : polar japonais, mélancolique et métaphysique

"The Third Murder" d’Hirokazu Kore-eda ("Tel père, tel fils", "Notre petite sœur") a fait l’ouverture du festival international du film policier de Beaune la semaine dernière et avait été projeté à la Mostra de Venise. Un film de procès, plus que policier, sombre, épuré à la temporalité toute asiatique, où l’action est en retrait au profit de thèmes qui dépassent les frontières du genre.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Koji Yakusho et Masaharu Fukuyama dans "The Tird Murder" de Hirokazu Kore-eda
 (FUJI TELEVISION NETWORKAMUSE INC. GAGA CORPORATION)

Noir, c’est noir

Apre, sombre, atteignant le métaphysique, "The Third Murder" rejoint une tradition liée au polar, même s’il s’agit plus ici d’un film de procès. Il recoupe le genre policier dans l’enquête qui fournit la colonne vertébrale du film, toutefois ici, non pas menée par un flic, mais un avocat. Cette tradition est de mettre en perspective les codes de l’investigation policière, ou juridique, avec des thèmes plus globaux, souvent existentiels. On parlera alors de film noir.
Un homme, déjà lourdement condamné par le passé, s’accuse d’un meurtre, alors qu’il risque la peine de mort. Mais il donne plusieurs versions de son crime. Son avoué en vient à douter de la culpabilité de son client. Menant sa propre enquête, le témoignage de la fille de la victime le trouble, puis l’accusé se rétracte. La quête de la vérité est au cœur de "The Third Murder", la fillette ira jusqu’à dire que "tout le monde ment ici".

Fatum

Risquant la peine de mort, ce meurtrier supposé a un comportement suicidaire. Il affirme que "certaines personnes ne méritent pas de vivre". "Elles n’ont pas demandé à exister, elles n’ont pas eu le choix", souligne-t-il. Raison pour laquelle elles versent, comme lui, dans le mal. Mais est-il si mauvais que cela, cet homme apparemment affable ? Pourquoi, cette fillette handicapée tente-t-elle de le sauver de la peine capitale, en accusant d’actes odieux son père assassiné ? Dit-elle la vérité ? Et cette veuve que signifie-t-elle quand elle suggère un trafic vénal au sein de l’entreprise de son mari, qui serait à l’origine de sa mort ?
Masaharu Fukuyama dans "The Tird Murder" de Hirokazu Kore-eda
 (Toho )
Hirokazu Kore-eda construit un labyrinthe de présomptions, de doutes, comme si ses protagonistes n’étaient pas maîtres de leurs convictions, remises constamment en question. Comme si un fatum les dominait inexorablement. "The Third Murder" interroge la justice humaine, et la capacité de l’homme à tirer les fils d’une vérité dont dépend le sort d’un semblable.

D’une lenteur toute asiatique, un effort est nécessaire pour entrer dans ce long métrage mélancolique aux teintes atones, d’une grisaille dominante et aux fulgurances tour à tour glaciales et brûlantes. Mais la récompense est au bout du chemin, dans la finesse de la construction, la pertinence de l’analyse, en laissant toutes les questions ouvertes.
"The Third Murder" : l'affiche
 (Le Pacte)

LA FICHE

Genre : Policier
Réalisateur :   Hirokazu Kore-eda  
Pays : Japon
Acteurs : Masaharu Fukuyama, Koji Yakusho, Suzu Hirose
Durée : 2h05
Sortie : 11 avril 2018

Synopsis : Le grand avocat Shigemori est chargé de défendre Misumi, accusé de vol et d’assassinat. Ce dernier a déjà purgé une peine de prison pour meurtre 30 ans auparavant. Les chances pour Shigemori de gagner ce procès semblent minces, d’autant que Misumi a avoué son crime, malgré la peine de mort qui l’attend s’il est condamné. Pourtant, au fil de l’enquête et des témoignages, Shigemori commence à douter de la culpabilité de son client.

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