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"The Birth of a Nation", aux racines de la Guerre de Secession

Acteur, Nate Parker n’a pas forcément eu l’idée du siècle en titrant sa première réalisation comme le classique de Griffith "The Birth of a Nation" ("Naissance d’une nation", 1915). On comprend les intentions de l’acteur-réalisateur qui prend l’exact contrepied du cinéaste pionnier américain, apologiste du Ku Klux Klan dans son film. Parker s’inscrit, lui, dans la lignée de "12 Years a Slave".
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4min
"The Birth of a Nation" de Nate Parker
 (2016 Twentieth Century Fox)

Le Sud 1830

Bien parti pour les Oscars 2017, "The Birth of a Nation" a vu ses espoirs tués dans l’œuf quand est remontée à la surface une histoire de viol vieille de 17 ans, impliquant Nate Parker et son scénariste Jean Celestin. Scandale aidant, le film a été refusé de concourir par l’Académie. Polémique mise à part, le film de Parker recèle de grandes qualités, après avoir été le fruit d’une longue gestation. Le film narre l’histoire vraie de Nat Turner, esclave dans une plantation du Sud, cultivé et prédicateur, qui, suite aux sévices subis par lui, son épouse, et congénères, fomente une révolte sanglante qui va le conduire à la potence.

Situé 30 ans avant la guerre de Sécession, "The Birth of a Nation" recoupe exactement la même époque que "12 Years a Slave", mais va plus loin dans le traitement des violences faites aux esclaves. Toutefois, un des traits principaux du film est de visualiser le quotidien du mode d’exploitation sudiste des années 1830. Les préjugés racistes sont de mise, même si une certaine ouverture se fait jour, dans l’apprentissage de la lecture autorisé à Nat Turner et sa permission de prêcher. Ouverture intéressée puisqu’elle permet de canaliser les revendications balbutiantes des esclaves. Les actes ignominieux des blancs, comme le droit de cuissage, l’abus sur mineurs, les tortures sont quant à elles monnaie courante.

Récit et forme équilibrés

C’est ce privilégié au sein de sa communauté, Nat Turner, qui va mettre le feu aux poudres. Sans doute, justement, en raison de son niveau culturel plus élevé que la moyenne. Nate Parker nous sensibilise à son sujet en jouant sur l’émotion, sans trop souligner le trait. Ainsi la scène où Nancy, l’épouse de Nat, est offerte à un invité de son propriétaire ; le harcèlement sadique de Raymond Cobb sur les esclaves ; les sévices et humiliations répétés… sont traités avec assez de justesse pour inspirer la révolte, sans tomber dans la complaisance.

"The Birth of a Nation" de Nate Parker
 (2016 Twentieth Century Fox)

Nate Parker prend le temps nécessaire pour raconter les faits, sans trop étirer le récit, relançant régulièrement l’action, avec des personnages bien cernés, sans tirer sur la corde du manichéisme. Tenu par son sujet, l’acteur-réalisateur arrive à ses fins, faisant preuve d'autant de talent dans l’écriture que dans la mise en scène, mais aussi dans  l’interprétation, puisqu’il tient le rôle principal avec conviction. Dommage que "The Birth of a Nation" soit entaché d’une polémique avec laquelle son sujet n’a rien à voir, ce qui pourrait malheureusement freiner son impact. 

"The Birth of a Nation" : l'affiche française
 (2016 Twentieth Century Fox)

LA FICHE

Drame historique de Nate Parker (Etat-Unis), Avec :   Nate Parker, Armie Hammer, Penelope Ann Miller, Jackie Earle Haley, Mark Boone Junior, Colman Domingo, Aunjanue Ellis, Dwight Henry - Durée : 1h50 - Sortie : 11 janvier 2017
Interdit aux moins de 12 ans

Synopsis : Trente ans avant la guerre de Sécession, Nat Turner est un esclave cultivé et un prédicateur très écouté. Son propriétaire, Samuel Turner, qui connaît des difficultés financières, accepte une offre visant à utiliser les talents de prêcheur de Nat pour assujettir des esclaves indisciplinés. Après avoir été témoin des atrocités commises à l’encontre de ses camarades opprimés, et en avoir lui-même souffert avec son épouse, Nat conçoit un plan qui peut conduire son peuple vers la liberté…

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