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"Qu’Allah bénisse la France" : Abd Al Malik adapte son roman avec brio

On n'est jamais aussi bien servi que par soi-même. C'est ce que semble avoir pensé Abd Al Malik en adaptant au cinéma son roman autobiographique éponyme "Qu’Allah bénisse la France" (Albin Michel, 2004). Par son sujet, une chronique des jeunes des cités de banlieue, ici de Strasbourg, et son filmage en noir et blanc, on pense à "La Haine" (1995) de Mathieu Kassovitz. Mais le film est tout autre.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Marc Zinga dans "Qu’Allah bénisse la France" De Abd Al Malik
 (Ad Vitam)
La note Culturebox
4 / 5                  ★★★★☆

De Abd Al Malik (France), avec : Marc Zinga, Sabrina Ouazani, Larouci Didi, Mickaël Nagenraft, Mireille Perrier - 1h36 - Sortie : 10 décembre 2014

Synopsis : Adapté du livre autobiographique de Abd Al Malik, "Qu’Allah bénisse la France" retrace le parcours de Régis, enfant d'immigrés, noir, surdoué, élevé par sa mère catholique avec ses deux frères, dans une cité de Strasbourg. Entre délinquance, rap et islam, il va découvrir l'amour et trouver sa voie.
Homme-orchestre
Rappeur, slameur, compositeur, orchestrateur, écrivain et enfin réalisateur, Abd Al Malik a plus d’une corde à son arc. A la vision de "Qu’Allah bénisse la France", son enthousiasme à faire partager son expérience dans une optique morale, s’impose. Le choix d’un filmage en noir et blanc d’un sujet sur les cités de banlieue renvoie à "La Haine". Mais le scénario s’en écarte pour parvenir à faire oublier cette référence forte, l’histoire étant totalement différente, en raison de son personnage central, Abd Al Malik, lui-même. Narcissisme ? Peut-être. Mais au-delà des apparences, la volonté de transmettre un message positif.
Issu d’une famille aisée divorcée, il se retrouve avec sa mère dans une cité de la banlieue de Strasbourg. Scolarisé, il se voit encouragé par ses professeurs à suivre hypokhâgne (Sup de Lettres après le Bac), en raison de ses goûts culturels et de son don pour l’écriture. Il n’en reste pas moins attaché à ses proches de la cité et ne cesse de participer à des larcins, comme par solidarité :colis "tombés" de camions, et trafic de drogue. Mais cela devient une camaraderie qui l’encombre de plus en plus, alors qu’il s’est engagé avec ses "potes" à créer un groupe de rap. Rémy/Abd Al Malik (Marc Zinga) est lié à eux par ce projet entravé par leur délinquance. Mais Rémy est motivé par ailleurs par la religion, sa conversion à l’Islam et à sa branche soufie, la plus ouverte, spirituelle, voire ésotérique.
"Qu’Allah bénisse la France" d'Abd Al Malik
 (Ad Vitam)
Espoir
C’est grâce à ce mélange entre contexte prolétaire, par le milieu "banlieusard", délinquance, religion, désir d’en sortir par le haut, "Qu’Allah bénisse la France" gagne son pari. Rien n’est linéaire. Rémy devient Abd Al Malik, une fois converti et se sent comme investi d’une mission, envers lui-même, sa future femme (Nawel - Sabrina Ouazani) et sa mère, qu’il vénère, sans parler de ses proches, qu’il cherche à faire sortir de la "mouise" et qui l’entraînent dans des expériences toujours plus risquées. Son obstination, son tempérament de leader, seront essentiels à ce qui devient un message d’espoir sans être naïf, mais concret.
Là où Abd Al Malik étonne le plus, c’est dans sa maîtrise de la mise en scène, de la mise en images et dans sa direction d’acteurs. Si son "flow" en rap n’est pas des plus remarquables, ses textes son très travaillés, ainsi que ses orchestrations, la musique du film étant de ce point de vue très réussie, dynamique, rythmée et, d’un point de vue sonore, inventive. Abd Al Malik est parvenu à son but : montrer toutes ses possibilités et habilités artistiques. Est-ce dû à son sujet si personnel ? L’avenir nous le dira. Mais il devrait persévérer dans cette voie : Qu’Allah bénisse Abd Al Malik !

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