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"Miele" : le premier film trouble et sensible de Valeria Golino

On connaissait Valeria Golino actrice ("Rain Man", "36 quai des Orfèvres", "Les Beaux gosses"...). Après une première expérience de réalisatrice sur un court-métrage, elle s'est découverte une véritable vocation pour rester derrière la caméra, ce que reflète pleinement "Miele", son premier long métrage, sur un sujet difficile : l’euthanasie.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4min
Jasmine Trinca dans "Miele" de Valeria Golino
 (Les Films des Tournelles)

De Valeria Golino (Italie/France), avec : Jasmine Trinca, Carlo Cecchi, Libero De Rienzo - 1h36 - sortie : 25 septembre 2013

Synopsis : Irène vit seule dans une maison au bord de la mer non loin de Rome. Son père et son amant la croient étudiante. En réalité, sous le nom de code MIELE, elle aide clandestinement des personnes en phase terminale à mourir dignement en leur administrant un barbiturique puissant. Un jour elle procure une de ces doses mortelles à un nouveau "client", Monsieur Grimaldi. Elle découvre cependant quʼil est en parfaite santé mais quʼil veut mettre fin à ses jours, ayant perdu goût à la vie. Bien décidée à ne pas être responsable de ce suicide, elle va tout faire pour l’en empêcher.

« Une mort digne »
Déjà cette année, un film signé Marco Bellochio traitait de l’euthanasie en Italie, à travers un fait divers qui avait défrayé la chronique, « La Belle endormie », avec Isabelle Huppert. Toujours en Italie, Valeria Golino traite du sujet, mais en l’abordant sous un angle tout autre, en adaptant un roman d’Angela Del Fabbro (pseudonyme de Mauro Covacich). La cinéaste déclare à ce sujet : « L’euthanasie est un sujet tabou en Italie, bien plus que dans n’importe quel pays européen. C’est en grande partie dû à l’influence du Vatican et à notre héritage catholique ». Mais ne pourrait-on pas dire la même chose en France ?

Elle ajoute,  « J’ai le sentiment que même si le peuple italien est prêt à faire face à ce sujet et à d’autres problèmes éthiques, les hommes politiques, eux, ne le sont pas ». Un constat également tout aussi vérifiable en France et sans doute ailleurs. « Miele » demeure donc bien un film au sujet universel. D’autant plus intéressant qu’il le traite à travers une jeune femme (très convaincante Jasmine Trinca, vue notamment dans « Le Caïman », « L’Apollonide »…) qui a pour vocation d’« aider », selon ses propres termes, les malades en fin de vie pour leur donner accès à « une mort digne ».

Jasmine Trinca, Carlo Cecchi dans "Miele" de Valeria Golino
 (Jour2fête)

Un premier film maîtrisé
Miele, convaincue de sa mission, et qui risque beaucoup pour la mener à terme, ne se pose pas de cas de conscience. Mais elle insiste auprès de ses « patients » jusqu’au dernier moment pour s’assurer de leur décision, et les assiste, allant jusqu’à faire face à leurs proches qui ne manque pas de la mépriser pour son travail de mort. Valeria Golino ne néglige pas non plus de décrire le trafic qui entoure le processus : son réseau, ses voyages au Mexique pour se procurer le produit létal, l’argent qui entre en jeu. Mais quand elle découvre qu’un homme, Monsieur Grimaldi (Carlo Cesshi, impressionnant d’autorité) fait appel à ses services pour se suicider, sans autre motivation que son dégoût de la vie, le film, et elle, basculent.

Valeria Golino fait preuve d’une maîtrise dans sa réalisation, de la première à la dernière image, doublée d’une direction d’acteurs et d’un jeu participatif qui aboutissent à une réussite inattendue pour une débutante. L’écriture démontre en même temps l’exigence d’aborder toutes les phases d’une démarche aux nombreux prolongements éthiques et émotionnels forts. Les rapports entre Miele et Monsieur Grimaldi se complexifient au fil de leurs rencontres pour aboutir à une conclusion pas forcément attendue, mais totalement en phase avec la nature des personnages et la construction d’un récit à plus d’un titre remarquable.  

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