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"Michel-Ange" : Andreï Konchalovsky filme en profondeur le maître de la Renaissance

Le réalisateur de "Maria's Lovers" et "Runaway Train" sort un film sur un des artistes les plus prestigieux, mais discret au cinéma.

Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
Alberto Testone dans "Miche-Ange" de Andrey Konchalovsky. (Copyright UFO Distribution)

À côté d’un Van Gogh, à la filmographie prolixe, Michel-Ange n'a fait l’objet que d’un seul long métrage, L’Extase et l’agonie (Carol Reed, 1966) avec Charlton Heston dans le rôle de l’auteur des fresques de la chapelle Sixtine. Le réalisateur russe Andreï Konchalovsky comble ce vide avec Michel-Ange qui sort ce mercredi 21 octobre, où l'artiste est confronté aux papes Jules II et Léon X, ses mécènes.

Absolu et contingence

En 1502, Michel-Ange, au sommet de son art, quitte Florence pour Rome où il doit terminer les fresques du plafond de la chapelle Sixtine, commandées par le pape Jules II, de la famille Della Rovere. Il lui doit également de nombreuses sculptures, notamment pour son futur tombeau. A sa mort, lui succède Léon X de la famille De Médicis. Les deux clans se haïssent et se disputent les engagements de l’artiste. Enjeu de leurs querelles, Michel-Ange se bat pour garder l’intégrité de son art.

Andreï Konchalovsky avait cosigné le scénario d’Andreï Roublev (1966) au côté du réalisateur Andreï Tarkovsky, sur le célèbre iconographe russe (circa 1360-70 – 1427-30). Un point commun rapproche les deux films et artistes. Leur aspiration à une forme d’absolu confrontée à la rudesse de leur temps s'exprime dans des images plus naturalistes qu’esthétisantes. Chez Konchalovsky, les fastes des palais florentins et romains trônent au cœur de villes aux ruelles boueuses, jonchées d’ordures, peuplées de rustres, où le danger rôde à chaque carrefour.

Le bloc de Carrare

Cette antinomie avec une Renaissance humaniste éclairée par les sciences et les arts, est un des atouts du film. Elle recoupe le tourment de Michel-Ange, habité d’une transcendance, confrontée aux contingences pécuniaires, aux querelles claniques et à une famille omniprésente. Andrey Konchalovsky montre un artiste en avance sur son temps, freiné par ses contemporains. Sa spiritualité, proche de son vénéré Dante Alighieri, bute contre le matérialisme mercantile des consciences.

Alberto Testone dans "Michel-Ange" de Andrey Konchalovsky. (Copyright UFO Distribution)

Le morceau de bravoure du film réside dans l’extraction d’un gigantesque bloc de marbre de Carrare qui rappelle Fitzcarraldo (1982) de Werner Herzog, où des Indiens tractent un navire au-dessus d’un mont en pleine jungle. Konchalovsy montre l'action en parallèle avec le conflit entre l’artiste et ses mécènes. Michel-Ange ne se bat pas contre des moulins à vent, mais une montagne et deux papes, une famille, un temps, dénués de valeurs à la hauteur de ses aspirations. 

Alberto Testone dans "Michel-Ange" de Andrey Konchalovsky. (Copyright UFO Distribution)

Ce beau récit est toutefois desservi par une image au format 4:3, dit "Academy" ou "carré", plus adapté à l'écran de télévision qu'au grand écran. Ce travers reflète la sobriété du film. Konchalovsky voulait le tourner en noir et blanc, jugé trop ascétique. Il a trouvé dans ce subterfuge une vision bressonnienne (Pickpocket, L'Argent), traversée de fulgurances.

L'affiche de "Michel-Ange' de Andrey Konchalovsky. (UFO Distribution)

La fiche

Genre : Drame historique / Biopic
Réalisateur : Andreï Konchalovsky
Acteurs :  Alberto Testone, Jakob Diehl, Francesco Gaudiello, Federico Vann, Glenn Blackhall, Orson Maria Gerrini, Massimo de Francovich, Simone Taffanin
Pays : Russie / Italie
Durée : 2h09
Sortie : 21 octobre 2020
Distributeur : UFO Distribution

Synopsis : Michel-Ange à travers les moments d’angoisse et d’extase de son génie créatif, tandis que deux familles nobles rivales se disputent sa loyauté.

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