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"La Conspiration du Caire" : Tarik Saleh dénonce les accointances politico-religieuses en Egypte dans un film courageux

Réalisateur du formidable polar "Le Caire confidentiel" en 2017, Tarik Saleh a remporté le Prix du scénario au Festival de Cannes cette année, pour le script subtil d'un film palpitant, "La Conspiration du Caire" : une distinction méritée.

Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Tawfeek Barhom dans "La Conspiration du Caire" de Tarek Saleh (2022). (ATMO)

Le Caire confidentiel (2017) mettait en équation police et politique en Egypte. Son réalisateur, Tarik Saleh, s'attaque dans La Conspiration du Caire, qui sort mercredi 26 octobre, au lien entre religion et Etat. En Egypte, un jeune homme se trouve embarqué dans les méandres politico-religieux du pouvoir égyptien. Un sujet à haut risque mené de main de maître.

Infiltré

Fils de pêcheur très croyant, Adam devient élève à la prestigieuse université Al-Azhar du Caire, référence majeure de l’islam sunnite. Le grand imam de l’institution meurt le jour-même de sa rentrée, et le novice est témoin de l’assassinat de son jeune bras droit. Réquisitionné par les forces de sécurité, Adam est obligé d’espionner de l’intérieur les différentes factions religieuses qui cherchent à prendre la main sur les instances politiques au pouvoir.

Tarik Saleh avait déjà tâté du thriller politique dans Le Caire confidentiel où l’enquête sur l’assassinat d’une jeune chanteuse remontait jusqu’à la garde rapprochée du président Moubarak. Le réalisateur, également scénariste, déplace son intrigue directement au cœur du politique. Relevant plus du film d’espionnage, son film délaisse l’enquête policière pour explorer les luttes de pouvoir au sein desquelles se trouve projeté un candide qui va s'imposer par son intelligence et sa finesse d’esprit.

Hitchcockien 

Un des principaux atouts de la Conspiration du Caire est de nous initier à un monde élitiste très secret par les yeux d’un novice, à l’image du spectateur. L’identification est immédiate et l’on suit Adam dans ce labyrinthe ésotérique que l’on découvre en même temps que lui. Deux écoles sont en opposition au sein d'Al-Azhar, l’une progressiste et l’autre fondamentaliste. Les règles du thriller dramatisent un discours politique à charge. Il vise des religieux corrompus qui ne cherchent que le pouvoir politique, en prévalant des arguments moraux qu’ils ne respectent pas eux-même. Une vieille histoire, constante au fil des siècles.

Adam se trouve projeté dans ce milieu, dont il ne connaît rien, comme un héros hitchcockien impliqué dans une affaire qui le dépasse, et avec laquelle il n’a rien à voir. C’est pourtant lui qui en sera la clé et résoudra peut-être l’énigme au risque de sa vie. Parti de sa barque de pêcheur dans le premier plan pour y revenir dans le dernier, la boucle est bouclée. Cette construction circulaire signifie son renoncement, après avoir pris conscience de l’hypocrisie manipulatrice des religions sur le peuple pour mieux le soumettre. Édifiant.

La fiche

Genre : Thriller
Réalisateur : Tarek Saleh
Acteurs : Tawfeek Barhom, Fares Fares, Mohammad Bakri
Pays : Suède / France / Maroc / Finlande 
Durée : 2h00
Sortie : 26 octobre 2022
Distributeur : Memento Distribution

Synopsis : Adam, simple fils de pêcheur, intègre la prestigieuse université Al-Azhar du Caire, épicentre du pouvoir de l'Islam sunnite. Le jour de la rentrée, le Grand Imam à la tête de l'institution meurt soudainement. Adam se retrouve alors, à son insu, au cœur d'une lutte de pouvoir implacable entre les élites religieuse et politique du pays.

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