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"Jack et la mécanique du cœur" : une belle horloge patraque

Mathias Malzieu, leader du groupe Dionysos, aura mis au moins 5 ans (on parle aussi de 6 ou 7 ans), avec Stéphane Berla, pour boucler l'adaptation de son roman éponyme "Jack et la mécanique du cœur", également à l'origine de son album "La Mécanique du coeur". La technique de l'animation numérique a été choisie, tout en évoquant la "stop motion", animation image par image de poupées.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
"Jack et la mécanique du cœur" de Stéphane Berla, Mathias Malzieu
 (2012 EUROPACORP – DURAN – FRANCE 3 CINEMA )

Film d'animation de Stéphane Berla et Mathias Malzieu (France), avec les voix de  Mathias Malzieu, Olivia Ruiz, Grand Corps Malade, Jean Rochefort, Rossy de Palma - 1h34 - Sortie : 5 février 2014
A Partir de 6 ans

Synopsis :  Édimbourg 1874. Jack naît le jour le plus froid du monde et son cœur en reste gelé. Le Docteur Madeleine le sauve en remplaçant son cœur défectueux par une horloge mécanique. Il survivra avec ce bricolage magique à condition de respecter 3 lois : ne pas toucher à ses aiguilles, maîtriser sa colère et surtout ne jamais Ô grand jamais, tomber amoureux. Sa rencontre avec Miss Acacia, une petite chanteuse de rue, va précipiter la cadence de ses aiguilles. Prêt à tout pour la retrouver, Jack se lance tel un Don Quichotte dans une quête amoureuse qui le mènera des lochs écossais, à Paris jusqu'aux portes de l'Andalousie.

« Stop motion » numérique
Il est rassurant de constater que les technologies les plus pointues du numérique ne parviennent pas à détrôner totalement les formes de créations plus artisanales. Ce dont on a encore eu la preuve avec « Le Vent se lève » de Hayaho Miyasaki. "Jack et la mécanique du cœur" de Mathias Malzieu et Stéphane Berla, joue la carte du numérique pour reconstituer un travail « a la mano ».  Le résultat à l’écran est d’une grande beauté graphique, déduite des illustrations de Nicoletta Ceccoli.

De ce point de vue, "Jack et la mécanique du cœur" est une merveille d’inventivité visuelle, dans ses décors de papier, ses personnages et son animation d’une fluidité parfaite. La reconstitution numérique de la technique « Stop Motion » constitue en même temps une première d’une extrême ambigüité. Fan de cet art, Tim Burton en est un des derniers fers de lance avec « Les noces funèbres » et « L’Etrange Noël de Mr. Jack » (réalisé par Henry Sellick, qui réalisera dans la même veine « James et la pêche géante » ou « Coraline »). Aussi, plutôt que de se tenir à cette « pureté », Malzieu et Berla ont préféré passer directement par les ordinateurs. Dommage pour la beauté du geste.

"Jack et la mécanique du cœur" de Stéphane Berla et, Mathias Malzieu
 (2012 EUROPACORP – DURAN – FRANCE 3 CINEMA )

Demi-réussite
Il n’en reste pas moins que "La Mécanique du cœur" demeure visuellement magnifique, ce que réussit rarement un film d’animation numérique. La ville d’Edimbourg au XIXe siècle, avec ses maisons de guingois, sa fête foraine Castillane, ses intérieurs et personnages, émerveillent dans chaque plan. Les voix ont également fait preuve d’une approche très méticuleuse : Mathias Malzieu (Jack), Olivia Ruiz (Miss Acacia), Grand Corps Malade (Joe), Jean Rochefort (Georges Méliès, dont la voix grave est un peu contradictoire avec son visage un rien juvénile), Rosy di Palma (Luna), Dani (Brigitte Helm) et les invités Arthur H, même Alain Bashung (dont il fallut remixer la voix à partir d’une chanson), collent parfaitement à leurs avatars numériques.

Le spectacle fait toutefois spontanément penser à l’univers de Tim Burton (notamment aux « Noces funèbres »), même si Mathias Malzieu se dit plus proche de celui de Jim Jarmush. Son film se réclame également de maintes références : les films de Méliès (personnage du film, il est également évoqué dans des reconstitutions de ses productions), « Freaks » de Tod Browning, même « 2001 l’Odyssée de l’espace » dans un très court plan que l’on vous défie de déceler… Ces références, parmi d’autres, font un peu premier de la classe. Mais là où le bât blesse, c’est dans la narration, la réussite visuelle ne parvenant pas à faire oublier un scénario laborieux, pourtant fondé sur un beau sujet à la teneur poétique indéniable. Quant à la musique, si l’on n’y adhère pas, elle devient envahissante. Les amateurs, eux, apprécieront.  De la belle horlogerie, mais qui ne fait pas le tour du cadran.

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