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"Grave", un film cannibale mordant dans la lignée de David Cronenberg

Pour son premier long métrage, Julia Ducournau n’y est pas allée de main morte. "Grave" a comme toile de fond la révélation de pulsions cannibales chez une jeune fille, un sujet qui fait tache dans le paysage du cinéma français. Elle touche au but avec éclat, remportant au passage le Grand prix du festival de Gérardmer et le Prix de la critique internationale à la Semaine de la critique à Cannes.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Garance Marillier dans "Grave" de Julia Ducournau 
 (Wild Bunch Distribution)

Virus

Le cinéma fantastique est rare dans l’hexagone, et la plupart du temps décevant. "Grave" est d’autant plus une bonne surprise. Il cultive une forme elliptique pleine de mystère, tout en développant une image sans concession. Elle n’est pas pour autant complaisante, mais toujours justifiée et forte, traitant du thème cannibale avec des résonnances métaphoriques autour du passage de l’adolescence à l’âge adulte, et du rapport à la famille.

Julia Ducournau s’avère d’ores et déjà comme une auteure accomplie, tant sa mise en scène est maîtrisée, avec de jeunes acteurs (Garance Marillier, Rabah Naït Oufella, Ella Rumpf, secondés par Laurent Lucas) au service d’un scénario original écrit de sa main. Justine (Garance Marillier) quitte le cocon familial pour rejoindre une école vétérinaire réputée, marchant sur les traces de ses parents et de sa sœur qui ont choisi la même voie. Il y a comme un même virus dans la famille. La suite nous dira qu’il n’est pas uniquement universitaire…

Pulsions

Ce thème viral, et la métamorphose de Justine, sont partagés par ce maître du cinéma fantastique qu’est David Cronenberg ("La Mouche"), avec lequel Julia Ducournau entretient plus d’une affinité. Dans la revendication assumée de se référer au cinéma de genre, tout en le transgressant par des prolongements thématiques annexes, un sous texte qui porte tout le film : la perte de l’enfance, la découverte de la vie en société, de la sexualité… Justine va devenir sujette à des pulsions, pas toujours recommandables. 

Garance Marillier et Rabah Naït Oufella dans "Grave" de Julia Ducourneau
 (Wild Bunch Distribution)

"Grave" ne joue à aucun moment la carte de la provocation, car la cinéaste soigne sa progression narrative, tout en la ponctuant d’images choc. Ces dernières ne cherchent pas l’effet pour l’effet, mais s’avèrent autant d’électrochocs destinés à faire réagir, déranger et par là-même, réfléchir. Le cinéma n’est jamais aussi puissant que quand il touche l’intime, le corps et à travers lui la conscience. Hors des sentiers battus, très prometteur, "Grave" reflète la forte personnalité d’une cinéaste iconoclaste, entière, talentueuse…"Grave".

"Grave" : l'affiche
 (Wild Bunch Distribution)

LA FICHE

Drame fantastique de Julia Ducourneau (France/Belgique - Avec : Garance Marillier, Ella Rumpf, Rabah Naït Oufella, Laurent Lucas, Joana Preiss, Bouli Lanners - Durée : 1h38 - Sortie: 15 mars 2017
Interdit aux moins de 16 ans

Synopsis : Dans la famille de Justine tout le monde est vétérinaire et végétarien. À 16 ans, elle est une adolescente surdouée sur le point d’intégrer l’école véto où sa sœur ainée est également élève. Mais, à peine installés, le bizutage commence pour les premières années. On force Justine à manger de la viande crue. C’est la première fois de sa vie. Les conséquences ne se font pas attendre. Justine découvre sa vraie nature...

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