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Gérard Depardieu et Emmanuelle Seigner sur "Le Divan de Staline" de Fanny Ardant

Fanny Ardant signe son troisième long métrage. Bonne idée que celle d’adapter "Le Divan de Staline" de Jean-Daniel Baltassat, qui figurait sur la liste des Goncourt en 2013. Encore meilleure celle de confier le rôle de Staline à Gérard Depardieu, et celui de sa maîtresse "historique" à l’excellente Emmanuelle Seignier. Au final : l’adaptation trouverait plus sa place au théâtre qu’au cinéma.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Emmanuelle Seigner et Gérard Depardieu dans "Le Divan de Staline" de Fanny Ardant
 (Alfama Films)

Réduction

Fanny Ardant semble s’être rabattue sur la solution filmique, faute de pouvoir se retrouver sur les planche, tant le roman de Daniel Baltassat se prêtait plus à une adaptation dramatique que cinématographique. Plus cérébral qu’émotionnel, plus dialogué que visuel, "Le Divan de Staline" explore une fin de règne. Quand Staline, à trois ans de sa mort, préside par la terreur et non comme ultime gardien de la Révolution. Aveuglé par son statut de mythe vivant, sa paranoïa est contagieuse. Elle contamine sa garde rapprochée puis, l’Histoire le dira, tout un système. Psychologique à défaut d’être politique, le sujet joue du fétichisme psychanalytique, avec au premier chef, le divan du titre, les rêves passés au crible de la grammaire freudienne, et le père-même de la psychanalyse que Staline ne cesse de surnommer "le charlatan".

Le film pose l'équation du pouvoir et de la personnalité, avec comme inconstance l’amour et l’art. Cela fait beaucoup, et la formule est un peu épaisse. Ce n’est pas aux acteurs qu’incombe la responsabilité de ne pas transmettre le message. Depardieu, en Staline caricaturale, Emmanuelle Seigner en maîtresse sur la sellette, et Paul Hamy, en artiste imposteur, amoureux transit, sont convaincants. Mais le texte passe mal à l’écran, comme s’il réclamait la dimension plus emphatique, plus allégorique, plus incarnée qu’offre le théâtre. Cette analyse de l’exercice du pouvoir passé au tamis de ce qui participe de la personnalité supporte mal le cadre réducteur du film.

Paul Hamy dans "Le Divan de Staline"
 (Alfama Films)

Trop plein

Fanny Ardant évite toutefois de faire du théâtre filmé. "Le Divan de Staline" est habité de beaux atouts cinématographiques. Les premiers plans de noir et blanc en couleur, nimbés de brume, sont splendides ; les décors de ce palais d’hiver et du parc givré, envoûtants ; les harmonies colorées, froides même dans les alcôves feutrées des salons, le cadre, sont très soignés sous l’œil du directeur de la photographie Renato Berta.


"Le Divan de Staline" est freiné par un trop plein thématique - le pouvoir, le monstre politique, l’art et l’amour - qui supportent mal leur approche frontale dans la synthèse filmique, réductrice, par rapport à la littérature, et moins incarné qu’au théâtre. C’est donc un problème d’adaptation que pose le film, non son sujet et sa forme, par ailleurs séduisants.  

"Le Divan de Staline" : l'affiche
 (Alfama Films)

LA FICHE

Drame de Fanny Ardant (France/Portugal), Avec : Gérard Depardieu, Emmanuelle Seigner, Paul Hamy, François Chattot, Luna Picoli-Truffaut, Tudor Istodor, Alexis Manenti, Xavier Maly  - Durée : 1h32 - Sortie : 11 janvier 2017

Synopsis : Staline vient se reposer trois jours dans un château au milieu de la forêt. Il est accompagné de sa maîtresse de longue date, Lidia. Dans le bureau où il dort, il y a un divan qui ressemble à celui de Freud à Londres. Il propose à Lidia de jouer au jeu de la psychanalyse, la nuit. Durant le jour, un jeune peintre, Danilov attend d’être reçu par Staline pour lui présenter le monument d’éternité qu’il a conçu à sa gloire. Un rapport trouble, dangereux et pervers se lie entre les trois. L’enjeu est de survivre à la peur et à la trahison.

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