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"Gemma Bovery" : Anne Fontaine et Fabrice Luchini revisitent "Madame Bovary"

Anne Fontaine est une réguliÚre de la comédie, avec un ton propre et de belles réussites publiques et critiques : "Mon pire cauchemar", "La Fille de Monaco", "Nouvelle chance" ; ou des drames avec "Perfect Mother", "Coco avant Chanel", "Entre ses mains"
 Elle adapte ici un roman graphique de Posy Simmons, déduit de "Madame Bovary", réinventé sur un ton de comédie avec Fabrice Luchini.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Fabrice Luchini et Gemma Arlerton dans "Gemma Bovery" d'Anne Fontaine
 (JérÎme Prébois / Albertine Productions - Ciné-@ - Gaumont - Cinéfrance 1888 - France 2 Cinéma)
La note Culturebox
3 / 5                  ★★★☆☆

D'Anne Fontaine (France), avec : Gemma Arterton, Fabrice Luchini, Jason Flemyng, Isabelle Candelier, Niels Schneider, Edith Scob - 1h39 - Sortie : 10 septembre 2014

Synopsis : Martin est un ex-bobo parisien reconverti plus ou moins volontairement en boulanger d'un village normand. De ses ambitions de jeunesse, il lui reste une forte capacitĂ© d'imagination, et une passion toujours vive pour la grande littĂ©rature, celle de Gustave Flaubert en particulier. On devine son Ă©moi lorsqu'un couple d'Anglais, aux noms Ă©trangement familiers, vient s'installer dans une fermette du voisinage. Non seulement les nouveaux venus s'appellent Gemma et Charles Bovery, mais encore leurs comportements semblent ĂȘtre inspirĂ©s par les hĂ©ros de Flaubert. Pour le crĂ©ateur qui sommeille en Martin, l'occasion est trop belle de pĂ©trir - outre sa farine quotidienne - le destin de personnages en chair et en os. Mais la jolie Gemma Bovery, elle, n'a pas lu ses classiques, et entend bien vivre sa propre vie...

Flaubert c’est Luchini !
"Gemma Bovery" n’est pas une nouvelle adaptation du chef-d’Ɠuvre de Flaubert. C’en est une dĂ©duction, au dĂ©tour d’une histoire improbable, oĂč un admirateur du grand Ă©crivain va plus ou moins malgrĂ© lui faire revivre chez ses nouveaux voisins britanniques le drame Ă©crit par le grand romancier. Martin Joubert (Fabrice Luchini) est le deus ex machina du rĂ©cit dans le rĂ©cit. FascinĂ© par la belle Gemma (Gemma Arlerton), il est tentĂ© de la sĂ©duire, mais il sent bien que cela ne prend pas. Par un concours de circonstances, il va la pousser dans les bras d’un jeune homme (Niels Schneider), la faisant commettre un adultĂšre tout "bovarien".

A son grand dam ! Il sera alors directement interventionniste dans la vie de la belle anglaise et de son jeune amant, pour coller totalement Ă  la trame du roman de Flaubert. Martin est passĂ© d’éditeur à
 boulanger sans jamais perdre de vue la littĂ©rature qu’il admire. Mais n’étant plus impliquĂ© dans le façonnage des Ɠuvres des autres, il va faire entrer chez les autres le littĂ©raire, mĂȘme si c’est Ă  leur dĂ©pens. Martin n’a rien de mĂ©chant ou de machiavĂ©lique. Il est romanesque.

Niels Schneider et Gemma Arlterton dans "Gemma Bovery" d'Anne Fontaine
 (JérÎme Prébois / Albertine Productions - Ciné-@ - Gaumont - Cinéfrance 1888 - France 2 Cinéma)

Les affres du destin
Anne Fontaine traite ce miroir du rĂ©el qu’est la fiction avec un humour des plus fins, en inversant justement le paradigme. Elle est servie en cela par Fabrice Luchini auquel le rĂŽle va comme un gant. D’autant qu’il raconte et commente son histoire en voix off, ce qui est, comme rarement, un atout indĂ©niable. Gemma Arlerton est non moins remarquable et d’une sensualitĂ© qui sait aussi se fondre dans le quotidien, l’équivalent parfait de la Bovary. La Normandie est Ă©galement comme un personnage Ă  part entiĂšre du film, filmĂ©e avec grĂące et beautĂ©, participant de la sensualitĂ© ambiante. Tout comme le pain sorti de la boulangerie de Martin, mets de vie et pĂ©trie d’amour.

Original par son sujet, humoristique par son ton, "Gemma Bovery" verse aussi dans le drame, source littĂ©raire oblige. Mais l’ensemble garde avant tout une dimension ludique, avec en toile de fond les affres d’un destin Ă©crit, ou non, d’avance, mais oĂč l’implication des hommes et de leurs actes participent d’un paysage qui les dĂ©passe. MĂȘme si un petit Ă©lagage n’aurait pas nuit au film, un rien trop long, « Gemma Bovery »  fait passer un moment dĂ©licieux comme du bon pain.

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