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Et "Hitchcock" créa "Psychose"

"Hitchcock" ne raconte pas la vie d'Alfred Hitchcock. Le film de Sacha Gervasi s'arrête sur la préparation et le tournage d'un de ses films les plus célèbres : "Psychose", avec devant la caméra deux monstres sacrés du cinéma : Anthony Hopkins dans le rôle-titre et Helen Mirren dans celui de sa fidèle épouse et collaboratrice de l'ombre, Alma Reville.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 5min
Anthony Hopkins est Alfred Hitchcock dans "Hitchcock" de Sacha Gervasi
 (Twentieth Century Fox France )

De Sacha Gervasi (Etats-Unis), avec : Anthony Hopkins, Helen Mirren, Scarlett Johansson, Michael Wincott, Toni Collette, Jessica Biel - 1h38 - Sortie : 6 février

Synopsis : Alfred Hitchcock, réalisateur reconnu et admiré, surnommé « le maître du suspense », est arrivé au sommet de sa carrière. A la recherche d’un nouveau projet risqué et différent, il s’intéresse à l’histoire d’un tueur en série. Mais tous, producteurs, censure, amis, tentent de le dissuasder. Habituée aux obsessions de son mari et à son goût immodéré pour les actrices blondes, Alma, sa fidèle collaboratrice et épouse, accepte de le soutenir au risque de tout perdre. Ensemble, ils mettent tout en œuvre pour achever le film le plus célèbre et le plus controversé du réalisateur : "Psychose".

‘’Psychose ‘’ où l’invention d’un genre
Le biopic vient régulièrement à la rescousse des scénaristes hollywoodiens en panne de sujet, avec plus ou moins de bonheur. Avec ‘’Hitchcock’’, Sacha Gervasi, qui n’avait jusqu’à aujourd’hui pas fait grand-chose, touche le jackpot en adaptant l’ouvrage de Stephen Rebello ‘’Alfred Hitchcock and the Making of Psycho’’ et le scénario de John Mc Laughlin, l’auteur du script de ‘’Black Swan’’. Le film est à multiples facettes, en cernant la personnalité du grand ‘’Hitch’’, son intimité avec son épouse - tant à la maison qu’au travail -, et ses rapports avec la profession : passionnant.
En 1960, ‘’Psychose’’, inaugurait un genre nouveau au cinéma, engendrant une foule de succédanés répertoriés sous le titre générique de ‘’psycho killers’’, devenu depuis ‘’serial killers’’. Le film devait également connaître trois suites ainsi qu’un remake plan par plan en couleur (l’original étant en noir et blanc), signé Gus Van Sant. Cette invention hitchcockienne était loin d’être gagné au regard des difficultés que rencontra le cinéaste à la réalisation de son projet. Adapté du roman éponyme de Robert Bloch, lui-même inspiré du tueur en série et nécrophile Ed Gein, également à l’origine, entre autres, de « Massacre à la tronçonneuse » et du « Silence des agneaux », « Psychose » constitue une date dans l’histoire du cinéma.
Helen Mirren et Anthony Hopkins dans "Hitchcock" de Sacha Gervasi
 (Twentieth Century Fox France )

Hantise
Le sujet avait de quoi déranger à l’époque, par le sordide de la situation décrite. Hitchcock du se battre bec et ongle pour l’imposer aux studios, soutenu par sa femme et collaboratrice, allant jusqu’à y mettre des deniers de sa poche. La réussite du film de Sacha Gervasi repose pour beaucoup sur la qualité d’un script méticuleux qui nous fait passer de l’autre côté du miroir, en dévoilant les méthodes de travail du ‘’maître du suspense ‘’, son opiniâtreté à venir à bout des difficultés et le rôle essentiel que joua dans l’ombre son épouse, dans l’époustouflante réussite de son mari, sans en tirer une once de reconnaissance.

Cette facette peu connu du personnage est comme le fil rouge du film. Sa jalousie extrême, alors qu’il est lui-même fasciné - c’est bien connu -, par ses actrices, tient une place non négligeable dans le film et participe de sa psychologie. Son autre facette est celle d’un homme au travail, convaincu du bien fondé de sa créativité, jusqu’à l’obsession. Elle s’exprime par l’apparition régulière du véritable Ed Gein (Michaerl Wincott) dans le quotidien du réalisateur, comme un fantôme venant le hanter. Son paternalisme avec Janet Leigh (remarquable Scarlett Johanson) met également un bémol quant à la réputation de tortionnaire d’Hitchcock avec ses actrices. Il n’en allait pas moins de la sorte avec certaines : Tippi Hedren en fera les frais sur son film suivant, « Les Oiseaux » (1963).

Anthony Hopkins est tout à fait à sa place dans la peau d’Alfred Hitchcock. Cela faisait bien longtemps que l’acteur ne nous avait pas offert une telle prestation, sans en faire trop et en traduisant l’humour à froid et implacable du cinéaste. Il donne au film un ton frisant la comédie ; une légèreté, des plus agréables. Helen Mirren est à son côté tout autant impressionnante, tout en discrétion et autorité, touchante dans son rôle d’épouse effacée et essentiel à la carrière de son mari. Touchant également de voir le compositeur Bernard Hermann imposer sa musique sur la fameuse scène de la douche, alors que ‘’Hitch ‘’ n’en voulait pas. Révélateur sur le personnage, son travail et sur l’industrie cinématographique, ‘’Hitchcock’’ lève le voile sur la personnalité d’un des plus grands cinéastes et son univers, sans l’ombre d’un doute.

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