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"Convoi exceptionnel" : Blier, Depardieu, Clavier, poids lourd en force !

Ce "Convoi exceptionnel", c’est le trio Gérard Depardieu, Christian Clavier, Bertrand Blier. Ce dernier a déjà dirigé cinq fois le premier et emploie pour la première le second qui a déjà joué avec l’autre… Vous suivez? Ce chassé-croisé, c’est le jeu auquel s'adonne le réalisateur des "Valseuses" ou "Buffet froid", pour une relecture de la vie, l’amour, la mort, à la lumière du cinéma. Tout Blier.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Christian Clavier, Gérard Depardieu et le réalisateur Bertrand Blier sur le tournage de "Convoi exceptionnel"
 (Nicolas Schul )

Drôle de drame

Le cinéma de Bertrand Blier est celui de l’absurde, du non-sens dans la tradition anglaise, avec une tonalité toute française. Un ton unique qui déroute, mais dans lequel on se glisse avec bonheur. Si Blier fait rire, c’est toujours jaune, avec noirceur. Une tradition très britannique en fait, mais tellement francisée qu’elle n’appartient qu’a lui. Une lignée qui renverrait à "Drôle de drame" (1937) de René Clair qui adaptait l’auteur britannique Joseph Storer Clouston et se déroulait à Londres.
Dans "Convoi exceptionnel", Taupin (Gérard Depardieu), poussant un caddie dans un embouteillage, croise Foster (Christian Clavier) qui l’embringue dans un assassinat. "C’est dans le scénario" lui dit-il, à lui qui n’a pas de script… S’ensuit une aventure urbaine au fil des rues, des bars, des rencontres… rythmée par des "scénaristes" qui suppriment des scènes, en ajoutent, sans savoir où ils vont, là où va la fin du film, comme va la vie vers sa fin.

Quand on aime la vie, on va au cinéma

Magnifique parabole à laquelle invite Bertrand Blier dans "Convoi exceptionnel", entre la vie et le cinéma. Un slogan des années 70 stipulait "Quand on aime la vie, on va au cinéma". Avec lui, cela serait plutôt "Quand on aime la mort, on va au cinéma" ! Ne tue-t-on pas beaucoup au cinéma ? Blier s’autocite avec bonheur. Il ouvre son film sur une invite au meurtre, qui renvoie à "Buffet froid", faite à Gérard Depardieu qui jouait dans ce film. Il pousse aujourd’hui un caddie qui fait référence aux "Valseuses" et "Merci la vie", alors que la mort poursuit les deux compères comme Jean Dujardin dans "Le Bruit des glaçons"…
Christian Clavier et Gérard Depardieu dans "Convoi exceptionnel" de Bertrand Blier
 (CURIOSA FILM /ORANGE STUDIO/LES PRODUCTIONS CHAOCORP/OUILLE PRODUCTIONS/VERSUS PRODUCTION)
Bertrand Blier jubile et nous avec lui. Les cinéastes ne cessent de faire référence aux films qui les ont précédés : autant s’identifier à soi-même ! Le cinéaste à de quoi faire, sa filmographie est d’une telle cohérence. La continuité est particulièrement flagrante avec "Buffet froid", tant la mort hante le film, mais aussi "Tenue de soirée" pour son cadre de rues nocturnes parisiennes. Les deux se rejoignent dans la liberté d’écriture qui interroge la narration, l’ambition de raconter une histoire avec romanesque tout en déconstruisant ses règles.

Reportage : C. Azzopardi, S. Gorny, A. Zouiouech,  P. Crapoulet, I. Palmer
Un jeu d’attirance/répulsion motive les films de Bertrand Blier dans son rapport au cinéma et son public. Il l’attire dans "Convoi exceptionnel" avec ses têtes d’affiche, Depardieu et Clavier, Alex Lutz, Audrey Dana, Alexandra Lamy, en sachant qu’il va déstabiliser ses spectateurs par son récit (comme d’habitude). Il nous comble par le rire issu de ses situations iconoclastes, ses dialogues improbables, et ses comédiens heureux de dire un tel texte, acteurs d’une métaphysique joyeuse. C'est tout le paradoxe de Bertrand Blier.
"Convoi exceptionnel" : l'affiche
 ( Orange Studio Cinéma / UGC Distribution )

LA FICHE

Comédie dramatique de Bertrand Blier
Pays : France
Avec :  Gérard Depardieu, Christian Clavier, Farida Rahouadj, Alex Lutz, Audrey Dana, Sylvie Testud, Louis-Do de Lanquescaing, Alexandra Lamy, Guy Marchand
Durée : 1h20
Sortie : 13 mars 2019

Synopsis : C’est l’histoire d’un type qui va trop vite et d’un gros qui est trop lent. Foster rencontre Taupin. Le premier est en pardessus, le deuxième en guenilles. Tout cela serait banal si l’un des deux n’était en possession d’un scénario effrayant, le scénario de leur vie et de leur mort. Il suffit d’ouvrir les pages et de trembler… 

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