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Cannes 2015 : Emmanuelle Bercot inaugure le Festival "La Tête haute"

En offrant le film d'ouverture du Festival de Cannes à "La Tête haute" d'Emmanuel Bercot, Thierry Frémaux, directeur délégué, et le nouveau président Pierre Lescure, marquent une césure par rapport aux habitudes. Exit les blockbusters ou films glamour habituels, place à un film d'auteur, d'autant plus qu'il est signé par une réalisatrice. Viva ! Une réussite.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Catherine Deneuve dans "La Tête haute" d'Emmanuelle Bergot
 (Wild Bunch Distribution)
La note Culturebox
4 / 5                  ★★★★☆

Le Fils du requin

Pourtant l'accueil de la presse a été étonnement assez froid. On peut se demander pourquoi, avec ce beau sujet sur un adolescent délinquant multirécidiviste, Malory (formidable Rod Paradot, dans un premier rôle difficile), pris en charge par une juge pour enfant (Catherine Deneuve au mieux de sa forme) et un éducateur (excellent Benoît Magimel), dévoués à sa cause et mis à rude épreuve.


La réalisatrice de "La Tête haute" avait notamment été remarquée avec "Elle s'en va" en 2013, qui offrait à Catherine Deneuve une des ses meilleures interprétations les plus récentes. C'est en toute logique que l'actrice revient dans son nouveau film. Celui-ci n'est pas sans rappeler le formidable premier film d'Agnès Merlet, "Le Fils du requin" (1994) qui traitait déjà de la délinquance juvénile et des affres d'un préadolescent avec la Justice, ses va-et-vient dans les centres d'accueil et autres établissements de réinsertion. En dépit de ces points communs, Emmanuelle Bercot a une approche globale différente.

Têtes à claques

Si elle se penche sur ce garçon turbulent, violent en rupture de ban, elle traite profondément le travail de la juge et de son éducateur, leur dévouement face à une cause perdue, mais envers laquelle ils gardent toujours espoir. Il y a une véritable preuve d'amour dans cette vocation et l'on se demande bien comment ils tiennent. Malory est insupportable, sa mère, veuve (Sara Forestier, investie et juste à point), tout autant dans son irresponsabilité juvénile, quant à la brève apparition du grand-père, il a tous les stigmates de son petit fils. Les "compagnons" d'infortune du jeune homme ne cessent de se provoquer, se battre à tout bout de champ… Tous des têtes à claques. C'est bien un manque d'amour dont est victime ce garçon, depuis ses quatre ans (à la mort de son père), et c'est peut-être grâce à lui qu'il pourra sortir la tête de l'eau, "la tête haute".

Rod Paradot et Benoît Magimel dans "La Tête haute" d'Emmanuelle Bercot
 (Wild Bunch Distribution)

Le message est clair et Emmanuelle Bercot l'a déduit de son enquête approfondie sur de tels cas. Ce n'est pas une forme de rhétorique d'une énième rédemption. Le film, très réaliste, mais non naturaliste, joue de la forme documentaire, surtout dans sa première demi-heure, où l'on pense au Raymond Depardon de "Délits flagrants" (1994). Mais la part de romanesque prend le dessus, tout en restant dans les cordes. Demeure toutefois un caractère répétitif des situations, où Malory commence à s'en sortir, puis replonge à maintes reprises. Même si ce cercle vicieux correspond à ce type de psychologie, sur deux heures, c'est un peu long ; on avait compris d'avance. Un petit resserrage ne ferait pas de mal à ce film sensible, sous tension constante, violent et passionnant.  

La Tête haute

D'Emmanuelle Bercot (France), avec : Rod Paradot, Catherine Deneuve, Benoît Magimel, Sara Forestier, Raoul Fernandez - Sortie : 13 mai 2015

Synopsis : Le parcours éducatif de Malony, de six à dix-huit ans, qu'une juge pour enfants et un éducateur tentent inlassablement de sauver.

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