"Bonnard, Pierre et Marthe" : chair et sentiment dans un film impressionniste

Après "Séraphine", Martin Provost revient à la peinture avec Pierre Bonnard, rare artiste à avoir vécu de son art, et sa muse, Marthe de Méligny.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
Vincent Macaigne et Cécile de France dans "Bonnard, Pierre et Marthe" de Martin Provost (2024). (CAROLE BETHUEL)

Postimpressionniste et cofondateur des Nabis en 1888-1889, Pierre Bonnard est revenu au bon souvenir des commissaires d’expositions dans les années 1990. Martin Provost qui a déjà tâté de la peinture avec Séraphine en 2008, y revient en évoquant les rapports passionnels qu'eurent le peintre et son modèle Marthe de Méligny. Beau et évocateur, Bonnard, Pierre et Marthe sort sur les écrans mercredi 10 janvier.

Marthe plus que Pierre

Le premier souvenir que laisse Bonnard, Pierre et Marthe est sa lumière. Partagé entre Paris, la Normandie et la Côte-d'Azur, le film se déroule pour beaucoup au Cannet (Alpes-Maritimes). C’est dire si la lumière y est changeante, avec une impression solaire dominante. Martin Provost ne pensait pas revenir à un sujet ayant trait à la peinture après Séraphine, c’est la proximité de sa maison durant le confinement avec celle où le peintre et sa muse habitaient qui l'a poussé à creuser le sujet.

Le réalisateur capte avec bonheur son sujet, grâce notamment à une Cécile de France au diapason de Marthe de Méligny – de son vrai nom Maria Boursin – en quête de reconnaissance avec cette particule inventée. Entre Pierre et Marthe, c’est cette dernière qui intéresse Martin Provost, plus que le peintre. Leur relation tumultueuse aussi, où s'invite une maîtresse intrusive et s'affirme la forte personnalité de Marthe.

Solaire et sensuel

Le cinéaste filme une femme indépendante et libérée qui trouve dans l’amour de Bonnard cette reconnaissance désirée qui l’élève dans la société, mais aussi personnellement, dans la passion qui les unira pendant cinquante ans. Aussi, pour pimenter l’idylle, Martin Provost s’attarde-t-il sur la jeune maîtresse du peintre, Renée (Stacy Martin) qui provoque la colère de Marthe, champ ouvert à l’expression de sa personnalité et de son exclusivité en amour. Solaire, la mise en scène devient sensuelle, le sexe étant cardinal dans leur relation. Un érotisme raffiné parcourt le film, reflet des nus prédominants chez Bonnard en 1893. La beauté de Cécile de France est raccord avec une femme du tournant du siècle, et sa liberté à l’écran traduit son personnage.

Martin Provost, lui, traduit l’époque avec ambiance et atmosphère, renouant avec une Belle Époque fascinante. En Bonnard, Vincent Macaigne campe un bourgeois amoureux de son art et éternel insatisfait. Modérés, mais non sans excès, ses sentiments s’expriment dans sa peinture, et notamment dans ses nus assez crus, frontaux, et majeurs dans ses toiles de 1893. Chair et sentiments dominent dans Bonnard, Pierre et Marthe, alors que surnommé "le peintre du bonheur", l’on pouvait croire l’artiste plus sage.

L'affiche de "Bonnard, Pierre et Marthe" de Martin Provost (2024). (MEMENTO INTERNATIONAL)

La fiche

Genre : Drame
Réalisateur : Martin Provost
Acteurs : Cécile de France, Vincent Macaigne, Stacy Martin, Anouk Grimberg, André Marcon, Grégoire Leprince-Ringuet, Hélène Alexandridis
Pays :  France
Durée :  2h02
Sortie : 10 janvier 2024
Distributeur : Memento International

Synopsis : Pierre Bonnard ne serait pas le peintre que tout le monde connaît sans l’énigmatique Marthe qui occupe à elle seule presque un tiers de son œuvre…

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