"Alien : Covenant" : Ridley Scott régénère son space opera horrifique
Codes de l’Alien
Ridley Scott, qui réalisait son deuxième long métrage avec "Alien" (après "Les Duellistes", prix de la Première œuvre à Cannes en 1977), a confirmé depuis son immense talent, comme un des plus importants cinéastes contemporains. S’il s’est pris les pieds dans le tapis en voulant donner les origines de son "xénomorphe" dans "Prometheus" (2012), il revient aux fondamentaux de la franchise, en en reprenant les codes tout en les propulsant vers l’avenir.Les codes ? Une action entièrement située à des milliers de kilomètres de la Terre, une mission spatiale détournée de ses objectifs, un équipage composé de lampistes, un androïde ambigu, la rencontre avec un organisme hostile agressif et coriace, une héroïne aux commandes, et l’élimination à la "dix petits nègres" de ses découvreurs… En cela, "Alien : Covenant" est le plus fidèle à ses origines de toutes les digressions ayant suivi le film de 1979. Une des forces d’"Alien" provenait de la quasi-invisibilité du monstre, celle de "Covenant" est de le montrer en plein jour, avec des métamorphoses inédites, et une violence autant brutale que sanglante, inattendue dans un blockbuster.
Le syndrome de Frankenstein
L’action se situant entre "Prometheus" et "Alien", exit Ripley, donc Sigourney Weaver. Elle est remplacée par le lieutenant Daniels, Katherine Waterston ("Les Animaux fantastiques") qui reprend à son modèle, l’androgynie, l’anti-glamour et le pragmatisme. Mais le film a déplacé son centre de gravité de l’héroïne vers l’androïde David, seul survivant de "Prometheus". C’est sur lui que s’ouvre "Covenant", où "l'être artificiel" rencontre pour la première fois son créateur. En cela le film creuse la thématique métaphysique prométhéenne en s’avérant une digression de "Frankenstein", où le monstre se rebelle contre son créateur, thème sur lequel repose tout "Alien : Convenant". Aussi n’est-ce pas un hasard si la date de 1818 est citée, puisque c’est celle de la publication du célèbre roman de Mary Shelley. Ridley Scott retrouve du même coup le thème qu’il développait dans "Blade Runner" (1982), avec ses androïdes révoltés contre leur créateur.
Il creuse ainsi un des sujets fondateurs de la science-fiction. Celui qui met en équation l’homme et son pouvoir de créativité jusqu’à sa mise en danger. C’était évidemment aussi un des thèmes au centre de "2001 : l’Odyssée de l’espace" de son mentor Stanley Kubrick, avec la rébellion de l’ordinateur Hal 9000 contre l’équipage du Discovery en route vers Jupiter. Mais là où Kubrick expérimentait une grammaire cinématographique nouvelle au risque de perdre le spectateur, Scott fait appel au cinéma de genre en privilégiant l’action et l’horreur visuelle, toujours avec son élégance et sophistication picturale unique. Introduits dans "Prometheus", on en apprend un peu plus sur les "Ingénieurs", ces extraterrestres peut-être à l’origine de l’humanité, et des "xénomorphes" à coup sûr. Leur destin dans le film présage peut-être celui de l’humanité… Ridley Scott a prévenu qu’il avait dans ses cartons matière à au moins deux autres "Alien" : bon vent !
LA FICHE
Science-fiction de Ridley Scott (Etats-Unis / Grande-Bretagne) - Avec : Michael Fassbender, Katherine Waterston, Billy Crudup,Danny McBride, Carmen Ejogo, Jussie Smollett, Callie Hernandez, james Franco - Durée : 2h02 - Sortie : 10 mai 2017
Interdit au moins de 12 ans
Synopsis : Les membres d’équipage du vaisseau Covenant, à destination d’une planète située au fin fond de notre galaxie, découvrent ce qu’ils pensent être un paradis encore intouché. Il s’agit en fait d’un monde sombre et dangereux, cachant une menace terrible. Ils vont tout tenter pour s’échapper.
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