"11.6" : François Cluzet dans la peau de l'intriguant Toni Musulin
De Philippe Godeau (Frrance), avec : François Cluzet, Bouli Lanners, Corinne Masiero - 1h42 - Sortie : 3 avril 2013
Synopsis : Toni Musulin est convoyeur de fonds depuis dix ans. Le 5 novembre 2009, à 10 heures du matin, il appuie doucement sur l’accélérateur de son fourgon blindé. À l’arrière de son véhicule, 11.6 millions d’euros…
Une bien étrange histoire que celle de Toni Muselin, dont les frasques défrayèrent la chronique pendant des semaines. Qualifié de casse du siècle (comme beaucoup d’autres) pour son mode opératoire sans violence et l’ampleur de la somme dérobée, l’affaire intrigue en raison de la personnalité de son protagoniste. Muselin a agi seul, était jusque là discret, méticuleux dans son travail ; ses motivations restent floues et il a été par ailleurs condamné pour escroquerie à l’assurance, et était propriétaire d’une Ferrari alors que son salaire mensuel s’élevait à 1700 euros, et que ses comptes bancaires étaient bien fournis… D’autres zones d’ombre subsistent. Pourquoi avoir rendu la majeure partie de la somme dérobée, et maintenir ne pas savoir ce que sont devenus les 2,5 millions d’euros restants ? Ses rapports avec ses collègues interrogent, ainsi que sa relation avec sa compagne (excellente Corinne Masiero dans le film)… Muselin avait-il un plan qui échappe toujours à la compréhension des enquêteurs ? Condamné à une peine de prison de cinq ans, il est séparé des autres détenus afin de l’exempter de pressions pour connaître la planque des 2,5 millions d’euros disparus… Portrait psychologique
A toutes ces questions, Philippe Godeau ne répond pas et ne cherche pas à émettre ne serait-ce qu’une hypothèse. Comme Muselin, le film reste flou. Allons plus loin, c’est le sujet-même de « 11.6 ». L’exposé d’un mystère. Celui d’un homme qui sans raison apparente bascule dans une délinquance au mode opératoire inédit, qui valu même de la part de nombreux internautes des éloges pour avoir détroussé la Banque de France, au moment-même où l’Occident plongeait dans la crise financière, en raison de ces mêmes banques. Philippe Godeau a clairement pris l’angle psychologique de cette étrange affaire. Son sujet est Toni Muselin, pas ce qu’il a fait. Sa mystérieuse tournure d’esprit s’exprime notamment dans l’édification d’un mur dans le garage qu’il a loué pour déposer l’argent, derrière lequel il a glissé une pièce de 1 euros… Pourquoi ? Un mystère de plus. Alors qu’il est en bons termes (relatifs) avec ses collègues, il se brouille avec tout le monde, ainsi qu’avec sa compagne, peu de temps avant de passer à l’acte, alors que la tension monte avec son employeur. Le mobile de son geste serait une vengeance contre ce dernier, méprisant à son égard, en démontrant les failles de leur système de sécurité, afin de les discréditer aux yeux de la profession et de leur commanditaire. François Cluzet incarne la mystérieuse froideur calculatrice de Muselin, tout comme Bouli Lanners personnalise son collègue le plus proche. Philippe Godeau opte pour la mise en scène froide, voire glaciale, de son personnage, donc en accord avec son sujet. Mais cette distanciation est aussi le point d’achoppement du film qui perd également en rythme, son sujet demeurant son principal atout.
Reportage : D.Poncet, A.Delcourt, F.Fischbach
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