Pour ou contre "Turf" ?
Quatre potes passionnés de courses achètent un cheval. Plutôt crack ou canasson ?
Loser magnifique, Freddy (Edouard Baer) sort du métro parisien, achète Geny courses et se dirige nonchalamment vers le Balto, le bar PMU où il retrouve ses trois amis : le Grec (Alain Chabat), un don juan contrarié, Fifi (Philippe Duquesne), un quadra qui habite toujours chez sa mère, et Fortuné (Lucien Jean-Baptiste), un fonctionnaire ultra-économe. Fous de courses mais lassés de perdre, les quatre compères décident d’arrêter de parier. Mais "Jour de perte, veille de gain", dit la devise des turfistes. Monsieur Paul (Gérard Depardieu) leur propose d’acheter un canasson déguisé en crack. La bande du Balto achète l’animal… pour le meilleur ou pour le pire ?
Pour : un téléfilm sympathique
Fabien Onteniente ne s’en cache pas, il a voulu réaliser un bon téléfilm familial du dimanche soir. Il cite Le Gentleman d’Epsom, une comédie de 1962 dans laquelle Jean Gabin, charmant escroc, vend des tuyaux au milieu hippique. De ce côté-là, au moins, il n’y a pas mensonge sur la marchandise. Ceux qui ont aimé Camping et sa suite ne seront pas déçus, Onteniente ressert le même cocktail un peu tiède : sujet popu, casting qui claque et blagues de fin de banquet.
Sans grande prétention artistique, Turf bénéficie d’un gros capital sympathie. Le quadrille de potes gentiment cliché fonctionne plutôt bien. D’abord parce que les acteurs, presque tous issus de la famille Canal+, jouent ce qu’ils savent jouer. La prestation de Philippe Duquesne rappelle ses bouffonneries dans les Deschiens. Edouard Baer ne se force pas en beau-parleur un peu paumé. Chabat fait du Chabat. La sauce prend, d’autant qu’on a le sentiment que ces quatre-là se sont réellement amusés lors du tournage (ce que le bêtisier assez drôle, à voir ici, confirme).
Deux autres acteurs tirent leur épingle du jeu. D’abord Sergi Lopez, en entraîneur intraitable, étonnant de sincérité dans ce film où tout le monde cabotine un peu. Ensuite Gérard Depardieu. Mais là, le comique est involontaire : dans le rôle d’un escroc prêt à toutes les bidouilles pour faire de l’argent, l’acteur sous le feu de l'actu fait rire malgré lui.
Contre : une aventure pataude et sans élan
Malheureusement, quelques bons numéros d’acteurs ne suffisent pas à faire un bon film. Le scénario un peu bourrin ne surprend jamais, et on voit arriver le dénouement de très loin avec ses gros sabots. Quant aux dialogues… N’est pas Audiard qui veut. On sourit quand Edouard Baer lance à une grande écuyère qu’il tente de conquérir : "Vous savez que moi aussi j'ai fait du cheval, j’étais galop 2 à l’UCPA." Mais le plus souvent la salle piaffe : les bonnes vannes tardent à venir et, quand elles surviennent, ne cassent pas quatre pattes à un canasson.
Les lieux de l’aventure, le PMU, les hippodromes, qui auraient pu se prêter à une exploration passionnante, ne sont abordés qu’en surface. L'univers et le jargon truculent des turfistes, des éleveurs, des lads, des jockeys, sont à peine effleurés. Et même les courses hippiques (filmées pourtant pendant quatre semaines sur les seize qu’a duré le tournage) manquent de relief. Les vrais amateurs d’équitation devront attendre Jappeloup, avec Guillaume Canet, qui sortira dans un mois.
Spectacle familial gentillet, Turf n’est pas un mauvais cheval. Mais il sort régulièrement de piste : buddy movie (film de copains) à la française, il louche également sur la comédie sentimentale et le documentaire hippique… sans sortir gagnant d’aucune course.
Faut-il y aller ?
Non. Téléfilm assumé, Turf peut attendre d’être visionné sur petit écran lors d’une longue soirée pluvieuse.
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