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Mort de Jean-Pierre Bacri : "C'est quelqu'un qui gueule contre un monde qui ne lui convient pas", confie Pierre Arditi

"Des gens comme ça, ça ne s'efface jamais parce qu'il reste ce qu'ils ont fait", a réagi sur franceinfo le comédien Pierre Arditi, après la mort de Jean-Pierre Bacri à l'âge de 69 ans.

Article rédigé par franceinfo
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L'acteur et cinéaste français Jean-Pierre Bacri lors de la présentation du film "Parlez-moi de la pluie" d'Agnès Jaoui, à Rome, en octobre 2008. (CLAUDIO PERI / ANSA)

Jean-Pierre Bacri était "en appétit avec le monde", a témoigné lundi 18 janvier sur franceinfo Pierre Arditi, après la mort du comédien à l'âge de 69 ans. "C'est quelqu'un qui gueule contre un monde qui ne lui convient pas." Pour Pierre Arditi, la disparition de Jean-Pierre Bacri est quelque chose de "douloureux", mais "des gens comme ça, ça ne s'efface jamais". "Il continuera de nous illuminer jusqu'à la fin des temps", assure le comédien.

>> Un "rouspéteur de choc et de chic", "un tendre" qui "avait de la grâce" : le monde du cinéma rend hommage à Jean-Pierre Bacri

franceinfo : Gilles Jacob dit qu'il est privé de son "rouspéteur de choc". Est-ce votre sentiment aussi ?

Pierre Arditi : Rochon, je n'aime pas beaucoup. Cela le réduit à une image de vieille baderne. Rouspéteur, c'est mieux. C'est un râleur. Il râle contre un monde qu'il rêve autrement et qui ne lui convient pas. Il est à la fois acide et il y a quelque chose de tendre qui navigue en dessous et qui le blesse. Souvent la vie le blesse.

Sa disparition vous touche-t-elle ?

C'est un choc. Ce n'est pas le premier. Il y en a un paquet cette année, comme il y en a eu l'année dernière, Caroline Cellier, Claude Brasseur. Ce qui caractérise pour moi Bacri, c'est sa grande qualité, d'acteur évidemment, et d'auteur. C'est un grand auteur, et de théâtre et de scénario. Il avait fait le scénario de Smoking No Smoking pour Alain Resnais, que nous avions tourné Sabine Azéma et moi.

"Ce qui le caractérise, c'est quelqu'un qui a rêvé de vivre d'une manière qu'il a rêvé de lui-même."

Pierre Arditi

à franceinfo

Il est très exigeant avec lui-même. Donc il est très exigeant avec les autres. Mais c'est un homme d'une rectitude humaine qui n'a jamais varié. Quelquefois, ça pouvait choquer des gens. Qu'est-ce qu'il a ? Il fait la gueule ? J'ai fait quelque chose qui ne lui plaît pas ? Mais en réalité, il avait une forte demande de l'humanité en face de lui. Et elle n'était pas toujours au rendez-vous. Donc, au lieu d'être un ronchon, c'était quelqu'un qui, par moments, pouvait faire penser à un misanthrope. En réalité, pas du tout. Il était en appétit avec le monde. Et tout ce qu'il a fait, tout ce qu'il a écrit, tout ce qu'il a incarné, c'est exactement de la même veine et d'une grande variété de jeu. C'est toujours dans le même mécanisme. On est en attente de quelque chose qui ne vient jamais tout à fait. C'est quelqu'un qui gueule contre un monde qui ne lui convient pas.

Vous avez tourné dans Smoking No Smoking, d'Alain Resnais, dont il avait écrit le scénario. Quel souvenir en gardez-vous ?

C'est tiré de 16 pièces d'Alan Ayckbourn, un auteur anglais formidable. Mais ils ont fait une adaptation absolument géniale. C'est plus qu'une adaptation. C'est une recréation de l'univers d'Alan Ayckbourn. Je me souviens avoir présenté Bacri et Jaoui à Alain Resnais, après avoir vu Cuisine et dépendances au théâtre. Il me semblait qu'ils étaient l'un et l'autre en parfaite adéquation avec l'univers d'Alan Ayckbourn. Et cette rencontre a été majeure, et pour Resnais et pour Bacri et Jaoui, et pour moi par la même occasion.

Quel souvenir garderez-vous de Jean-Pierre Bacri ?

J'ai vu les bandes annonces qui passent à la télévision disant "je ne le reverrais plus". On le reverra plus. Oui. Je le croiserai plus dans la rue. Ça c'est une chose. C'est douloureux. Mais à un moment donné, des gens comme ça, ça ne s'efface jamais parce qu'il reste ce qu'ils ont fait, ce qu'ils ont créé et qui continuera de nous illuminer jusqu'à la fin des temps.

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