L'auteur d'une biographie sur Edgar Hoover "déçu" par le film d'Eastwood
L'écrivain et scénariste Marc Dugain, auteur en 2005 du roman "La Malédiction d'Edgar" (Gallimard), juge "très partiel et incomplet" le film J. Edgar, qui sort en salles le 11 janvier.
Il n'a pas l'air convaincu. L'écrivain et scénariste Marc Dugain, auteur en 2005 du roman biographique La Malédiction d'Edgar (Gallimard), qui raconte la vie de John Edgar Hoover, patron du FBI pendant 48 ans, s'avoue déçu par le film de Clint Eastwood. Il juge "très partiel et incomplet" J. Edgar, qui sort en salles le 11 janvier.
Que pensez-vous du film de Clint Eastwood consacré au patron du FBI, sur lequel vous avez vous-même enquêté pendant trois ans ?
Le point de vue de Clint Eastwood est très partiel, incomplet. Il insiste sur le côté super flic de Hoover et élude l'aspect politique, pourtant primordial. Certes, il ose aborder le sujet de l'homosexualité mais tout cela reste "soft". En réalité, il y a des témoignages sur des soirées chaudes délirantes auxquelles il participait.
Et cela masque tout l'aspect politique du personnage, sa relation avec Joseph McCarthy, qu'il avait pourtant mis en place puis éjecté, ses liens très ambigus avec les Kennedy, pratiquement occultés, comme ceux avec la mafia.
Imaginez ces deux homos, Hoover et son alter ego Clyde Tolson, numéro 2 du FBI, racistes, antisémites, terriblement misogynes et homophobes publiquement qui se retrouvent face au clan Kennedy. C'est un choc frontal phénoménal ! Dommage d'allouer autants de moyens pour un film décevant. Je trouve que l'on reste sur sa faim.
Comment expliquez-vous ce parti-pris de Clint Eastwood ?
Clairement, il n'a pas pas voulu s'attaquer au mythe Kennedy. C'est sans doute son vieux fond républicain, un petit côté Inspecteur Harry qui perdure... Aujourd'hui, outre-Atlantique, les films proprement politiques ne passent pas au cinéma. Il est probable que les producteurs du film de Clint Eastwood ont dû lui conseiller : pas trop de politique !
Aux Etats-Unis, il y a une quasi omerta concernant l'assassinat de JFK, à la fois du côté des républicains, qui craignent de voir mise au jour leur implication, et des démocrates qui veulent perpétuer le mythe.
Cependant, Leonardo di Caprio est excellent. Le personnage de Clyde Tolson tient bien la route, sa relation avec Hoover est bien rendue, même s'il était plus méchant et pervers dans la réalité. L'affaire Lindbergh, la police transfrontière, la naissance de la police scientifique sont aussi bien vus.
En avez-vous fini avec Hoover ?
Non, pas du tout. Je vais tourner cet été un film, une grosse fiction documentaire en anglais, sur Hoover aux Etats-Unis ou au Canada pour la chaîne Planète (Canal +) pour une sortie en France, en Europe, et au Canada en 2013. Ce sera le plus gros projet de 2013 pour la chaîne.
Je suis en train d'écrire le scénario. Aucune idée pour l'instant sur le casting. Ce sera un huis clos entre Hoover, Clyde Tolson et Robert Kennedy, ministre de la Justice de 1961 à 1963. Le film portera essentiellement sur les aspects politique et personnel des personnages.
(Propos recueillis par Myriam Chaplain-Riou)
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