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"Lone Ranger" : Johnny Depp est-il devenu has been ?

Il est loin, le temps où l'acteur américain était synonyme de "cool". Et ce n'est pas son dernier film, qui sort aujourd'hui, qui prouvera le contraire.

Article rédigé par Ariane Nicolas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
L'acteur américain Johnny Depp au festival international de Toronto (Canada), le 8 septembre 2012. (© FRED THORNHILL / REUTERS / X02272)

Il fut un temps où le nom "Johnny Depp" était synonyme de "cool". Un visage de doux rockeur androgyne, des collaborations prestigieuses (Burton, Jarmusch, Polanski, Kusturica...), une vie privée qui faisait rêver : l'acteur américain transcendait ses rôles tout en incarnant une certaine idée du flegme américain.

Et puis, les années 2000 sont passées par là. Avec le succès pharaonique de Pirates des caraïbes et l'affadissement de l'univers burtonien, Johnny Depp a perdu de son mordant. Oubliée, la fragilité lyrique d'Edward aux mains d'argent et d'Arizona Dream. Ejectée, la solitude violente de Dead Man et Donnie Brasco. Que reste-t-il du Johnny Depp qu'on aimait ? Ferait-il mieux de prendre sa retraite, comme il l'a récemment laissé entendre ? Nous avons pesé le pour et le contre.

Oui, il ne nous surprend plus

Johnny Depp a toujours aimé se transformer. Aussi convaincant en jeune sosie de Buster Keaton (Benny & Joon, 1993), en moustachu portant un veston (Ed Wood, 1994) ou armé d'un porte-cigarettes et de lunettes orange (Las Vegas Parano, 1998), l'acteur peut changer de visage avec un naturel déconcertant.

Mais cette souplesse de jeu ne surprend plus. Les mimiques du chapelier fou d'Alice au pays des merveilles évoquent les gesticulations de Willy Wonka (Charlie et la chocolaterie) et les soubresauts cafardeux de Dark Shadows. Après quatre épisodes de Pirates des Caraïbes, le revoilà grimé comme pour carnaval dans Lone Ranger, Naissance d'un héros, de Gore Verbinski, western qui met en scène un tandem entre un guerrier indien (Johnny Depp) et un Blanc (Armie Hammer).

L'acteur américain Johnny Depp dans "Lone Ranger", de Gore Verbinski, sorti le 7 août 2013. (DISNEY.FR)

Désormais, ses films se suivent et son jeu se ressemble. Comme l'écrit un journaliste du Globe and Mail (en anglais), "Johnny Depp est un personnage, et plus un acteur". Une franchise à lui tout seul.

Oui, il surjoue l'ado irresponsable

Lorsqu'il assure la promotion de ses films, Johnny Depp aussi fait du Johnny Depp. A 50 ans, aurait-il besoin de prouver qu'il fait encore jeune ? Si le temps ne semble avoir aucune prise sur son visage, il n'en va pas de même pour son apparence vestimentaire. Ainsi, aux Etats-Unis, sur le plateau de David Letterman, fin juin, les spectateurs ont vu débarquer un croisement hasardeux entre Tony Montana et un moniteur d'équitation camarguais. 

"J'espère que je serai encore moins responsable durant la prochaine décennie", s'amuse l'invité, qu'on soupçonne d'avoir planqué un flacon de Biactol dans sa loge. Ceci n'aurait aucune importance s'il n'avait pas, en plus, posé avec le boys band One Direction, s'il n'affectionnait pas les jeans troués et les bagues à tête de mort, et qu'il ne sortait pas avec une femme deux fois plus jeune que lui - Amber Heard. Compte-t-il bientôt repasser son brevet ?

Oui, il fait sa diva (et cela ne lui ressemble pas)

Difficile de rester l'ambassadeur du cool si on joue en même temps les divas. En 2011, Johnny Depp avouait qu'il incarnerait le pirate Jack Sparrow encore et encore tant que les studios le paieraient (cher). "Si vous me donnez cet argent ridicule ["stupid money"], je le prendrai", disait-il à Vanity Fair (en anglais). Deux ans plus tard, il aurait donc refusé de rejoindre le casting de Black Mass, de Barry Levinson, car la production lui demandait de diviser son cachet par deux, soit de 20 à 10 millions de dollars (7,5 millions d'euros), selon le Hollywood Reporter (en anglais). On a connu plus rock'n'roll, même s'il n'est pas impossible que Johnny change finalement d'avis.

Oui, même son fils le dit

En un sens, le personnage de Johnny Depp rivalise à présent avec les franchises ultra-robustes comme Avengers (sorti en même temps que Dark Shadows), Superman ou Iron Man. Preuve que le combat est rude, le propre fils de Johnny Depp semble avoir changé de camp. "Un soir, Robert Downey Jr. et sa femme sont venus dîner à la maison, a raconté l’acteur, cité par Voici.fr. D’un seul coup, j’ai vu le capitaine Jack Sparrow sortir des yeux de mon fils et Iron Man en devenir la star." 

Non, le public le plébiscite toujours

Aux yeux des gamins du monde entier, pourtant, Johnny Depp reste une référence. La poule aux œufs d'or de Pirates des caraïbes s'est abonnée aux films Disney, pour son plus grand plaisir : l'acteur doit jouer dans le film d'espionnage Mortdecai, la comédie musicale Into The Woods, dans Pirates des Caraïbes 5 et Alice au pays des merveilles 2, toutes produites par ce studio.

Johnny Depp a par ailleurs reçu un Kid's Choice Award pour Dark Shadows, en mars ; ses sept plus gros succès au box-office ont tous moins de dix ans et l'Américain fait toujours partie des acteurs les mieux payés d'Hollywood. Au rayon anecdotes, des fans se font encore tatouer son visage sur le corps et un fossile marin vieux de 500 millions d'années porte désormais son nom. Bref, l'échec annoncé de Lone Ranger pourrait n'être qu'un petit grain de sable dans une machine de mieux en mieux rodée.

Une femme se fait tatouer un portrait de Johnny Depp sur la cuisse lors d'un salon à Sydney (Australie), le 8 mars 2013. (DANIEL MUNOZ / REUTERS)

Non, il garde plusieurs cordes à son arc

N'oublions pas non plus que Johnny Depp diversifie ses activités depuis quelques années. Le flic jeunot de 21 Jump Street peut se vanter d'avoir coproduit Hugo Cabret, de Martin Scorsese, et de fignoler actuellement un documentaire sur son acolyte Keith Richards, le guitariste des Rolling Stones.

En dehors des plateaux, Johnny Depp s'implique dans la préservation de la culture des Indiens d'Amérique, proposant par exemple de racheter le site de Wounded Knee, lieu de massacre de centaines de Sioux en 1890. Lone Ranger entre dans cette droite ligne, puisque le film lui "offre l’opportunité de corriger la façon odieuse dont les Indiens ont été représentés au cinéma", selon les propos de l'acteur à Première. Un thème qui lui tient à cœur depuis qu'il est tout petit, et qui, paradoxalement, risque de constituer son plus gros échec commercial depuis de nombreuses années.

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