Cet article date de plus d'onze ans.
"Les Garçons de la bande" en DVD : Friedkin adapte une pièce gay
Quatrième film de fiction réalisé pour le cinéma par William Friedkin en 1970, "Les Garçons de la bande" clôt la première partie de la filmographie du cinéaste qui se tournera par la suite vers des sujets relevant plus du cinéma de genre. Adapté de la pièce éponyme de Mart Crowley par l'auteur, le film est un des premiers à traiter de l'homosexualité aux Etats-Unis.
Publié
Temps de lecture : 4min
L'histoire : Dans un appartement de l’Upper East Side de New York, Michael, catholique fervent et ancien alcoolique, donne une fête d’anniversaire pour son ami Harold. Les invités arrivent un à un. Tous ont réservé à Harold un présent peu commun : un beau jeune homme. La soirée se déroule tranquillement mais commence à se dégrader sous l’effet de l’alcool. Chacun laisse alors éclater ses rancoeurs…
Des Garçons mal accueillis
En adaptant pour l’écran la pièce de Mart Crowley, William Friedkin a décidé de reprendre les mêmes acteurs qu’à la scène. Grand bien soit-il, ils sont tous formidables. Le danger était de tomber dans le théâtre filmé, avec le statisme que cela entraîne, contradictoire à la dynamique propre au cinéma. Comme Polanski, Friedkin s’est révélé à plusieurs reprises un cinéaste du huis-clos : « Les Garçons de la bande » se déroule pratiquement exhaustivement dans un appartement new-yorkais, où les protagonistes sont bloqués dans une pièce, à cause d’un orage diluvien. « L’Exorciste », ou « Bug » sont également claustrophobes, et même quand il filme l’action en extérieur (« French Connection », « Sorcerers » ou « Police Fédérale Los Angeles »), ce même sentiment d’enfermement domine.
Si la pièce fut un succès, avec un sujet encore tabou à l’époque, le film, et avec lui Friedkin, s’attirèrent les foudres des homosexuels new-yorkais, alors que le scénariste n’est autre que l’auteur, Mart Crowley, lui-même gay. Le cinéaste explique ce phénomène en rappelant qu’à la sortie du film (1970), les homosexuels s’émancipaient de ce qui était jusqu’alors leur problématique majeure : reconnaître sa sexualité et la faire reconnaître des autres, thèmes au cœur de la pièce et du film. Il apparaissait donc obsolète, voire régressif en privilégiant une stigmatisation, dont toute la communauté avait travaillé et travaillait encore à se démarquer. Un suspense des sentiments
Mais en adaptant « Les Garçons de la bande », Friedkin ne cherche pas à se réduire à la seule homosexualité. Les sentiments qu’il évoque sont loin de se limiter aux seuls gays. L’arrogance, la provocation, la jalousie, le regret… sont partagés par tous et le film les décline grâce à des personnages forts, remarquablement interprétés, avec une progression dramatique évoluant d’une certaine légèreté, avec humour, pour aller vers une pesanteur, une atmosphère délétère, où chacun va s’écharper.
Enfin, Friedkin révèle ses grands talents de cinéaste, de metteur en scène, en exploitant et explorant tous les recoins de l’appartement, avec des angles changeant, une caméra fluide qui privilégie les plans séquences, sans jamais être ennuyeux et une rythmique du montage dynamique. Ce drame intime entre une dizaine de personnages évolue en intensité jusqu’à développer un suspense inattendu. Si « Les Garçons de la bande » témoigne aussi d’une époque, il demeure surtout une puissante analyse de la nature humaine.
Bonus : Mart Crowley explique comment il a été amené à écrire sa pièce et sa surprise devant son succès. Ensuite, William Friedkin explique les problèmes d’adaptation pour passer de la pièce au film, sans que celui-ci en pâtisse en énergie. Un dernier supplément évoque la réception et l’influence du film,
Les Garçons de la bande (1970) – 1h48
De William FRIEDKIN (Etats-Unis), avec Kenneth NELSON, Pete WHITE (II), Leonard FREY, Cliff GORMAN, Frederik COMBS, Laurence LUCKINBILL, Keith PRENTICE, Robert LA TOURNEAUX
Editeur : Carlotta Films
DVD : 19,99 euros
En adaptant pour l’écran la pièce de Mart Crowley, William Friedkin a décidé de reprendre les mêmes acteurs qu’à la scène. Grand bien soit-il, ils sont tous formidables. Le danger était de tomber dans le théâtre filmé, avec le statisme que cela entraîne, contradictoire à la dynamique propre au cinéma. Comme Polanski, Friedkin s’est révélé à plusieurs reprises un cinéaste du huis-clos : « Les Garçons de la bande » se déroule pratiquement exhaustivement dans un appartement new-yorkais, où les protagonistes sont bloqués dans une pièce, à cause d’un orage diluvien. « L’Exorciste », ou « Bug » sont également claustrophobes, et même quand il filme l’action en extérieur (« French Connection », « Sorcerers » ou « Police Fédérale Los Angeles »), ce même sentiment d’enfermement domine.
Si la pièce fut un succès, avec un sujet encore tabou à l’époque, le film, et avec lui Friedkin, s’attirèrent les foudres des homosexuels new-yorkais, alors que le scénariste n’est autre que l’auteur, Mart Crowley, lui-même gay. Le cinéaste explique ce phénomène en rappelant qu’à la sortie du film (1970), les homosexuels s’émancipaient de ce qui était jusqu’alors leur problématique majeure : reconnaître sa sexualité et la faire reconnaître des autres, thèmes au cœur de la pièce et du film. Il apparaissait donc obsolète, voire régressif en privilégiant une stigmatisation, dont toute la communauté avait travaillé et travaillait encore à se démarquer. Un suspense des sentiments
Mais en adaptant « Les Garçons de la bande », Friedkin ne cherche pas à se réduire à la seule homosexualité. Les sentiments qu’il évoque sont loin de se limiter aux seuls gays. L’arrogance, la provocation, la jalousie, le regret… sont partagés par tous et le film les décline grâce à des personnages forts, remarquablement interprétés, avec une progression dramatique évoluant d’une certaine légèreté, avec humour, pour aller vers une pesanteur, une atmosphère délétère, où chacun va s’écharper.
Enfin, Friedkin révèle ses grands talents de cinéaste, de metteur en scène, en exploitant et explorant tous les recoins de l’appartement, avec des angles changeant, une caméra fluide qui privilégie les plans séquences, sans jamais être ennuyeux et une rythmique du montage dynamique. Ce drame intime entre une dizaine de personnages évolue en intensité jusqu’à développer un suspense inattendu. Si « Les Garçons de la bande » témoigne aussi d’une époque, il demeure surtout une puissante analyse de la nature humaine.
Bonus : Mart Crowley explique comment il a été amené à écrire sa pièce et sa surprise devant son succès. Ensuite, William Friedkin explique les problèmes d’adaptation pour passer de la pièce au film, sans que celui-ci en pâtisse en énergie. Un dernier supplément évoque la réception et l’influence du film,
Les Garçons de la bande (1970) – 1h48
De William FRIEDKIN (Etats-Unis), avec Kenneth NELSON, Pete WHITE (II), Leonard FREY, Cliff GORMAN, Frederik COMBS, Laurence LUCKINBILL, Keith PRENTICE, Robert LA TOURNEAUX
Editeur : Carlotta Films
DVD : 19,99 euros
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.