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"Ernest et Célestine - Le voyage en Charabie" : une tendre et pétillante révolution musicale

L'iconoclaste duo formé par Ernest et Célestine s'offre une virée impromptue sur la terre natale d'Ernest, la Charabie. En s'appuyant sur la précision des dessins et la richesse des décors, Julien Chheng et Jean-Christophe Roger signent un film d'animation à la fois pêchu et ouaté.

Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Photo du film d'animation "Ernest et Célestine - Le voyage en Charabie" (2022) (FOLIVARI/MELUSINE PRODUCTIONS/STUDIOCANAL)

Sans le faire exprès, Célestine vient de casser le violon d'Ernest. Bien qu'il cache sa contrariété, la petite souris voit bien que son ami ours est chagriné par la dégradation d'un instrument qui lui est cher et lui rappelle son pays natal relégué aux oubliettes, la Charabie. N'écoutant que son petit cœur, faisant fi des dangers de la route et de ses difficultés à prononcer "Charabie", Célestine décide d'aller là où "le Stradivarours" d'Ernest peut être réparé par un certain Octavius.

L'aventure d'Ernest et Célestine - Le voyage en Charabie, une nouvelle adaptation des albums Ernest et Célestine de Gabrielle Vincent publiés chez Casterman, commence ainsi pour le spectateur qui rentre dans les petits pas de la souris, vite rattrapée par son comparse. Ernest se rend rapidement compte de la disparition de son amie qu'il finira par retrouver sur les chemins qui mènent à la Charabie. Ensemble, ils terminent leur périple vers le pays qui rime, dans le souvenir d'Ernest, avec musique. La réalité sera tout autre et la devise de la Charabie – "C'est comme ça et pas autrement" – donne le ton. 

Des décors plus vrais que nature

En attendant, dans la camionnette qui leur sert de véhicule, l'ours ajuste tendrement la capuche d'une Célestine exténuée par sa grande entreprise. Le dessin et le mouvement de ce geste plein d'attention sont l'une des multiples illustrations de la minutie des sketches aux tons pastels. L'animation dessinée à la main y est certainement pour beaucoup. En outre, les petits objets du quotidien dans la maison d'Ernest et Célestine sont représentés avec une frappante précision. À l'instar des très originaux feux de signalisation, des routes, de l'architecture, des vêtements de ceux qui déambulent dans les rues de la Charabie et des instruments de musique. Sans compter les vues panoramiques époustouflantes de certains endroits du pays.

Après leur iconoclaste rencontre décrite, il y a une décennie, dans Ernest et Célestine (César du meilleur film d'animation en 2013 et représentant de la France aux Oscars en 2014), on retrouve les deux amis dans une aventure politique musicale dont tous les enfants de 7 à 77 ans comprendront les enjeux. Dans un pays où la musique et les instruments n'ont plus droit de cité, une résistance musicale s'est organisée. Et un mystérieux justicier du nom de Mifasol empêche "la police musicale" de faire respecter toutes les interdictions sous lesquelles croule désormais la Charabie. Célestine et Ernest n'hésitent pas à se joindre à la danse même si le père d'Ernest, autoritaire juge en chef, veut voir cette profession se perpétuer dans sa lignée. Nos nouveaux activistes réussiront-ils à faire la révolution ?

Tout pour échapper à la note unique 

Les lois absurdes et la liberté de faire ses propres choix – surtout quand on est une fille – sont des thématiques très actuelles qui traversent subtilement le film d'animation. Julien Chheng et Jean-Christophe Roger, les réalisateurs du deuxième volet des aventures du duo animalier, ont réussi à créer un univers à la fois tendre, grâce à la douceur de l'illustration des décors, et palpitant. On est émus par l'amitié des deux héros et happés par les trépidantes courses-poursuites pour échapper au règne de la note unique et aux policiers qui y veillent scrupuleusement en Charabie.

Tout comme on est amusés par la truculence des dialogues renforcés par les expressions des protagonistes, surtout dans les face-à-face. Les échanges entre Pauline Brunner, qui offre une pétillante voix à Célestine, et Lambert Wilson, interprétant à la perfection l'ours bourru et tendre qu'est Ernest, sont plein de couleurs. Leurs voix donnent malicieusement chair aux héros du dessin animé. Et les autres protagonistes ne sont pas en reste. Outre des répliques culte, cet examen impromptu de deux policiers par la médecin en chef, qui n’est autre que la mère d’Ernest, est un petit moment d'anthologie à découvrir instamment. La bande-originale, pleine d'entrain et de vitalité composée par Vincent Courtois, est l'indispensable ingrédient qui fait swinguer Ernest et Célestine - Le voyage en Charabie. Les mélomanes apprécieront et pourront se laisser aller à chanter la rafraîchissante chanson du film, Qu'est-ce qu'on fait de l'amour ? interprétée par Pomme. En somme, pour de multiples raisons, il est difficile de ne pas céder au charme du film d'animation.

La fiche

Genre : animation
Réalisateurs : Julien Chheng et Jean-Christophe Roger
Pays : France
Durée : 1h30
Sortie : 14 décembre 2022
Distributeur : Studiocanal

Synopsis : Ernest et Célestine retournent au pays d’Ernest, la Charabie, pour faire réparer son précieux violon cassé. Ils découvrent alors que la musique est bannie dans tout le pays depuis plusieurs années. Pour nos deux héros, il est impensable de vivre sans musique ! Accompagnés de complices, dont un mystérieux justicier masqué, Ernest et Célestine vont tenter de réparer cette injustice afin de ramener la joie au pays des ours.

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