: Vidéo Festival de Cannes : "Il est important d'arrêter d'ignorer", explique Judith Godrèche, qui présente un court-métrage sur les violences sexuelles

En février dernier, Judith Godrèche a choisi de déposer plainte pour viol sur mineur contre les réalisateurs français Jacques Doillon et Benoît Jacquot. Son combat s'est naturellement rattaché au mouvement #MeToo. Elle revient sur ces derniers mois et sur le Festival de Cannes, qui s'est ouvert mardi 14 mai, et auquel elle participe avec son court-métrage Moi aussi. Interrogée pour Brut par le journaliste Augustin Trapenard, elle explique qu'"il est important d'arrêter d'ignorer, de faire semblant alors que tout le monde sait".

"Je trouve qu'il y a beaucoup de rumeurs qui, malheureusement, desservent même les personnes qui s'engagent et qui essaient de faire avancer les choses. Les gens qui sont sur la défensive le sont encore plus. Toutes ces rumeurs, je trouve qu'elles desservent la cause de celles qui se battent pour faire avancer les choses, dans le fond", déclare Judith Godrèche à propos des bruits sur des révélations concernant des artistes avant même le début du festival. En février dernier également, Judith Godrèche a prononcé un discours à l'occasion de la cérémonie des César. Elle déclarait notamment : "Ça fait maintenant 30 ans que mon silence est mon moteur. (...) Nous pouvons décider que des hommes accusés de viols ne puissent pas faire la pluie et le beau temps dans le cinéma." 

La standing ovation aux César "ne suffit pas"

Quelques mois plus tard, Judith Godrèche explique qu'elle a traversé cette soirée des César comme si elle ne l'avait "pas vécue" : "Je crois que j'étais vraiment dans un autre monde. Ailleurs, complètement à l'intérieur de moi. J'étais dans un état presque méditatif, mais je n'étais pas à la soirée des César, en tout cas". A la fin de sa prise de parole, la salle s'est levée pour l'applaudir. Pour elle, cela "ne suffit pas". Ce soir-là, elle indique ne pas avoir eu peur car elle n'avait "rien à perdre". Ces derniers mois, l'actrice et réalisatrice confie que certaines personnes lui ont fait comprendre "par des lettres, des messages, des coups de fil" qu'elle ferait mieux de repartir aux Etats-Unis. 

Le 2 mai dernier, 52 députés ont voté à l'unanimité la création d'une commission d'enquête relative aux violences sexistes et sexuelles commises dans le milieu du cinéma, de l'audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité. Judith Godrèche revient sur son ressenti ce jour-là à l'Assemblée nationale : "Pour moi, l'Assemblée nationale, c'est le lieu des adultes. Des grands. Et à cet endroit-là, eh bien il y a mon histoire qui a fait ce chemin et qui s'est retrouvée là. Mon histoire, c'est celle d'une jeune fille qui s'est retrouvée avec des grands, respectés de tout le monde. Cette jeune fille était consciente de sa place étrange dans ce monde-là et, d'une certaine façon, n'a jamais pu prendre sa place, ou en tout cas toujours par rapport au désir de l'autre ou à l'aval de l'autre. Je ne me suis jamais sentie légitime et je crois que j'ai encore un rapport compliqué et conflictuel avec ça. Mais à cet endroit-là, il y a la petite fille que j'étais qui s'est retrouvée à l'endroit des adultes, et pas pour être la petite fille, mais pour être un adulte. Et je pense que ça a été quelque chose de très émouvant pour moi, que ces adultes-là considèrent".