Festival de Cannes 2024 : "Vivre, mourir, renaître" de Gaël Morel, l'amour et l'amitié contre le sida

Présentant son film dans la prestigieuse section Cannes Première du Festival de Cannes, le réalisateur français nous replonge dans les années 1990 avec une histoire qui interroge l'amour et le temps.
Article rédigé par Lorenzo Ciavarini Azzi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4min
Victor Belmondo et Théo Christine dans le film "Vivre, mourir, renaître" de Gaël Morel. (ARP Sélection)

Vivre et s'aimer avec le sida ou sous la menace de cette maladie, le sujet a été exploré au cinéma par quelques films importants, plus ou moins animés par le désir de rappeler l'hécatombe qu'elle a provoquée, en particulier dans les années 1980 et 1990.

Gaël Morel, qui fait son grand retour au Festival de Cannes dans sa veste de réalisateur (il y avait avant tout été découvert comme acteur dans Les Roseaux sauvages en 1994), apporte sa pierre à l'édifice avec un film personnel d'une grande délicatesse qui parle avant tout d'amour. Vivre, mourir, renaître, projeté le jeudi 23 mai dans la section Cannes Première, pose une question : et si on avait non pas une, mais plusieurs vies ?

Équilibre instable

Début des années 1990, à Paris. Emma (Lou Lampros) et Sammy (Théo Christine) s'aiment et s'apprêtent à fonder un foyer dont un petit Nathan sera la première pierre. Sammy, lui, aime aussi les hommes, mais Emma ne semble pas s'en offusquer, ce serait même "excitant" pour elle, dit-elle. Et lorsqu'il rencontre leur voisin photographe Cyril (Victor Belmondo), les deux tombent très vite amoureux. Le couple d'Emma et de Sammy s'accommoderait même de cette relation vécue presque au grand jour, si le sida ne venait s'immiscer, dynamitant l'équilibre du trio.

Un trio ? Gaël Morel explore avant tout avec subtilité les deux relations qui ne feront jamais un triangle amoureux. "Chaque expérience est unique", semble nous souffler à l'oreille le cinéaste qui sait raconter le marivaudage (séduction sexuelle ou amicale) autant que ce drôle de ménage, en campant au scalpel ses personnages : Sammy fougueux et immature, Emma intelligente et solaire, Cyril inspirant confiance.

"Sérieux, mais pas sage", lance-t-on du photographe. Séropositif, l'homme a intégré la maladie dans son existence : "Ça m'a donné une exigence. Je suis meilleur photographe depuis la maladie", s'autorise-t-il déjà. L'acteur Victor Belmondo se dépasse de générosité et de séduction.

C'est la première partie du film, courte, car elle ne peut durer. Elle est éminemment romantique, tempérée par les notes sobres et rassurantes de Tchaïkovski – le compositeur dont on sait en revanche qu'il fit cohabiter âprement ses relations homosexuelles avec une vie maritale d'apparence, à la fin du XIXe siècle.

Vivre avec la fatidique échéance

Dans une deuxième et bien plus longue partie du film, le sujet s'est déplacé, mettant le rapport à la mort, mais aussi à la guérison, au cœur des questionnements. Comment vivre avec l'épée de Damoclès du sida ? Avec l'échéance, avec l'incertitude ? Comment survivre à la maladie ? Comment considérer le temps ? Que devient un projet d'avenir, que deviennent l'amour, l'amitié, la transmission ?

Gaël Morel esquisse sobrement toutes ces questions à la fois. Faisant se dérouler le film sur une dizaine d'années, il trouve l'astuce de faire vivre – du moins dans le propos – un quatrième personnage, celui du fils, pour relancer le récit. Et préparer l'avenir.

Victor Belmondo, Lou Lampros, le petit Hélyos Johnson et Théo Christine dans "Vivre, mourir, renaître" de Gaël Morel. (ARP)

Malgré quelques passages convenus, desservis sans doute par l'usage des musiques – belles, mais trop appuyées – de Georges Delerue, ce récit reste linéaire, parfois surprenant et toujours haletant.

L'affiche du film  "Vivre, mourir, renaître" de Gaël Morel. (ARP)

La fiche

Genre : Drame
Réalisateur : Gaël Morel
Acteurs : Lou Lampros, Victor Belmondo, Théo Christine
Pays : France
Durée :
1h49
Sortie :
25 septembre 2024
Distributeur :
ARP Sélection
Synopsis : Emma aime Sammy qui aime Cyril qui l'aime aussi. Ce qui aurait pu être un marivaudage amoureux à la fin du siècle dernier va être dynamité par l'arrivée du sida. Alors qu'ils s'attendaient au pire, la destinée de chaque personnage va prendre un virage inattendu.

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