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Festival de Cannes 2023 : "Etat limite", un documentaire sur la psychiatrie pour crier "au secours, l’hôpital va craquer"

Nicolas Peduzzi suit un psychiatre et ses patients atteints de troubles mentaux ou en grande fragilité médicale ou sociale. "Etat limite" est un réquisitoire féroce et tendre, en creux, sur la situation de la médecine psychiatrique. Coup de cœur.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Image du film "État limite" de Nicolas Peduzzi. (LES ALCHIMISTES)

La question est posée d’emblée : comment bien soigner dans une institution malade ? Le documentaire s’ouvre sur Romain, aide-soignant, filmé de dos dans les couloirs de l’hôpital Beaujon, en Ile-de-France, le bouton on-off tatoué sur la nuque. On comprendra plus tard qu’une partie du personnel est traversée par une crise sur le sens de leur travail. Faut-il continuer ou arrêter ? Présenté à Cannes dans le cadre de l’ACID (Association du cinéma indépendant pour sa diffusion), le film documentaire Etat limite est une immersion dans un hôpital. Nicolas Peduzzi suit Jamal Abdel-Kader, psychiatre, lors de ses consultations et de ses échanges avec ses collègues.

Notre interview vidéo de Nicolas Peduzzi :

"Etat limite" présenté à Cannes
"Etat limite" présenté à Cannes "Etat limite" présenté à Cannes (franceinfo)

Grand corps malade

"L’hôpital public français a toujours eu pour moi un visage amical : c’est lui qui avait sauvé mon père en 1990, lui qui m’avait accueilli et soutenu en service psychiatrique lorsque j’en avais eu besoin. Il y a quatre ans, la crise sanitaire a révélé l’ampleur du mal-être de l’institution, mais les causes de la gangrène étaient évidemment plus profondes", explique Nicolas Peduzzi. L’hôpital est malade de coupes budgétaires.

L’unique médecin psychiatre de l’hôpital arpente les couloirs et les escaliers pour visiter ses patients. La caméra, pleine d’empathie, nous fait assister à des scènes très intimes sans jamais être voyeuriste. Certains cas sont lourds. Fils de chirurgiens syriens et élevé dans un étage de l’hôpital consacré aux familles de médecins aux revenus modestes, le docteur Abdel-Kader va d’un patient à l’autre avec patience et franchise.

Jamal court

Grâce à la caméra de Nicolas Peduzzi, l’hôpital Beaujon devient beau dans sa laideur. Monstre d’architecture, rongé par la rouille à certains endroits, lézardé par d’impressionnants escaliers extérieurs, l’hôpital est le théâtre de drames silencieux. Jamal prend des nouvelles de chacun dans ce lieu fermé. Jamal court d’un service à un autre. En plus de ses patients, il reçoit aussi les personnes en grande fragilité psychique : SDF, femmes battues, etc.

Jamal s’insurge contre la politique du chiffre prônée par les autorités. Jamal doute. Il voit, impuissant, l’hôpital public craqueler de partout. Lors de sa projection à Cannes, Jamal Abdel-Kader confie avoir demandé une mise en disponibilité de l’APHP et se consacre à une activité clinique bénévole, le temps de mûrir sa réflexion sur la suite qu’il donnera à sa carrière.

Etat limite est le deuxième film français à s’intéresser à la psychiatrie après Sur l’Adamant , de Nicolas Philibert (Ours d’or à Berlin). Poignant, juste, humaniste, Etat limite est un coup de poing et un coup de cœur.

Affiche du film "État limite" de Nicolas Peduzzi. (LES ALCHIMISTES)

La fiche 

Genre : Documentaire 
Réalisaeur : Nicolas Peduzzi
Pays : France
Durée :  1h42
Sortie : Prochainement
Distributeur : Les Alchimistes

Synopsis : Hôpital Beaujon, Clichy. Au mépris des impératifs de rendement et du manque de moyens qui rongent l’hôpital public, Jamal Abdel Kader, seul psychiatre de l’établissement, s’efforce de rendre à ses patients l’humanité qu’on leur refuse. Mais comment bien soigner dans une institution malade ?

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