Festival de Cannes 2023 : "Anatomie d'une chute" de Justine Triet, un grand film procès lauréat de la Palme d'or
Avec trois films au compteur, Justine Triet vient pour la troisième fois sur la Croisette avec Anatomie d'une chute, après Victoria à la Semaine de la critique en 2016 et Sybil en compétition en 2019. Si son titre renvoie au film procès d'Otto Preminger Autopsie d'un meurtre (1959), ce nouvel opus de la réalisatrice en est le talentueux contrepoint.
Un scénario au cordeau
Écrivaine d’origine allemande, Sandra (Sandra Hüller) vit depuis un an isolée à la montagne avec Samuel (Samuel Theis), enseignant à la fac, et leur fils malvoyant de 11 ans, Daniel. Alertée par son fils, elle découvre son compagnon décédé, victime d’une chute du troisième étage de leur chalet. Malgré le doute entre suicide et homicide, elle est inculpée, mais laissée en liberté avec son fils, sous la surveillance d’une employée de justice, Daniel étant nommé comme témoin. Lors du procès, la vie de couple de Sandra et Samuel est disséquée devant la cour.
Justine Triet signe le scénario d’Anatomie d'une chute avec Arthur Harari, par ailleurs acteur et réalisateur, qui avait coécrit les scripts de ses deux films précédents. Les autres contributions d'Arthur Harari valent d’être citées, comme Le Procès Goldman de Cédric Kahn (à la Quinzaine des cinéastes cette année), ou Onoda (scénariste et réalisateur) très remarqué en 2021 à Un certain regard. Cette nouvelle collaboration avec Justine Triet est à l’origine d’une dramaturgie parfaitement orchestrée, toute en progression, jusqu’à une résolution qui nous libère de notre interrogation constante sur la culpabilité ou non de Sandra.
Anatomie d’un couple
Cette Anatomie d’une chute pourrait s’appeler Anatomie d’un couple, tant celui de Sandra et Samuel est passé au scalpel devant la cour. Le rôle du procureur accusateur est tenu par un Antoine Reinartz qui semble avoir fait cela toute sa vie, face à un Swann Arlaud, ami avocat de Sandra, qui ménage ses atouts. L’accusation met en lumière les frustrations de Samuel, et ses reproches tenus à l'égard de sa compagne, comme écrivain en panne, alors qu’elle publie régulièrement. Les infidélités de Sandra sont sources de conflit et justifieraient en partie son acte meurtrier. Le coup de théâtre final tirera le grain de l’ivraie.
Ce qui semble le déroulement attendu d’un procès reconstitué est dynamisé par une écriture qui relance constamment l'action. Justine Triet a également l’intelligence de nous sortir du prétoire, lors de scènes plus intimes qui aèrent le récit, principale différence avec le film d’Otto Preminger où le procès est pratiquement le seul cadre du film. On est tenu de bout en bout par le suspense jusqu'au verdict final, grâce à un scénario ciselé, des comédiens talentueux et une mise en scène dynamique. Une reconnaissance qui est partagée par nombre de festivaliers puisqu'elle obtient la Palme d'or de cette 76e édition.
La fiche
Genre : Drame
Réalisatrice : Justine Triet
Acteurs : Sandra Hüller, Antoine Reinartz, Swann Arlaud, Milo Machado Graner, Samuel Theis
Pays : France
Durée : 2h30
Sortie : 23 août 2023
Distributeur : Le Pacte
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