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Cannes 2019 : "Sorry We Missed You", un Ken Loach remonté contre le patronat en compétition

Membre du club très fermé des réalisateurs aux deux Palmes d’or, le réalisateur britannique Ken Loach est à nouveau en compétition à Cannes avec "Sorry We Missed You".

Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3 min
Kris Hitchen, Debbie Honeywood, Rhys Stone et Katie Proctor dans "Sorry We Missed You" de Ken Loach  (Le Pacte)

Palme d’or pour Moi Daniel Blake en 2016 et Le Vent se lève en 2006, Ken Loach, venu pour la première fois à Cannes en 1971 avec Family Life, a son rond de serviette à Cannes. Pour preuve, cette quatorzième sélection en compétition, avec Sorry We Missed You.

Sorry We Missed You semble composer un diptyque avec Moi Daniel Blake qui traitait du chômage. Ce nouveau Ken Loach parle d'un couple d'employés, mais fragilisé par les pressions patronales, avec un adolescent turbulent sous son toit. Une réalité d'actualité.

Un bien pour un mal

Ricky trouve un emploi de chauffeur livreur impliquant l’achat d’une camionnette coûteuse, alors qu’il est perclus de dettes avec sa femme Abby et leurs deux enfants. Son adolescent de fils est en pleine crise, sèche les cours et aligne les bévues, alors que leur cadette pâtit de la détérioration de l’ambiance familiale. Ces pressions se répercutent sur son assiduité au travail, le faisant passer d’employé exemplaire à un perturbateur. Une spirale infernale en résulte, dont la famille va faire les frais.

L'acteur britannique Ross Brewster dans Sorry We Missed You de Ken Loach (Le Pacte)

Le premier plan de Sorry We Missed You est pratiquement le même que celui de Moi Daniel Blake. Dans ce dernier, lors d’un face-à-face autour d’un bureau, un chômeur veut faire valoir ses droits. Dans Sorry We Missed You, autour d’un même bureau, un demandeur d’emploi en trouve un. L’on imaginerait le second plus chanceux que le premier, mais c’est l’inverse qui se produit. Daniel Blake trouve dans sa précarité une solidarité qui l’ouvre à un épanouissement dans de nouveaux rapports humains. En trouvant un emploi, Ricky devient neurasthénique, réduit à être un rouage de l’entreprise, au détriment de son couple, de sa famille, de sa santé physique et mentale.

Une barque trop chargée

Ken Loach, dont l’investissement pour la cause sociale n’est plus à démontrer, dénonce les pratiques en vigueur des employeurs. Les valeurs humaines s’effacent au profit de la marge des entreprises, allant jusqu’au burn out, sinon au suicide. Le procès France Télécom en cours en France en est une tragique illustration. Le réalisateur britannique double ce constat de la vision d’un adolescent laissé à lui-même suite à l’accaparement des parents par leurs obligations professionnelles. Car comme Ricky, son épouse Abby, assistante de vie dévouée, n’est pas mieux lotie que lui.

De ce point de vue, Loach est moins convaincant. Il charge trop la barque de son couple en galère, jusqu’aux répercussions psycho-physiologiques subies par leur cadette. Sous cet empire, Loach délaisse la part d’humour qui persistait ça et là dans ses films, même les plus sombres. Mais il ponctue Sorry We Missed You de scènes fortes et touchantes qui sonnent justes plus d’une fois. La démonstration reste cependant didactique et chargée, même si elle est pertinente et comme de coutume chez le cinéaste, pleine d’émotion.

Kris Hitchen et Katie Proctor dans Sorry We Missed You de Ken Loach  (Le Pacte)

La fiche

Genre : Drame
Réalisateur : Ken Loach
Acteurs : Kris Hitchen, Debbie Honeywood, Rhys Stone, Katie Proctor, Ross Brewster

Pays : Grande-Bretagne
Durée : 1h40
Sortie : Prochainement
Distributeur : Le Pacte

Synopsis
 : Ricky, Abby et leurs deux enfants vivent à Newcastle. Leur famille est soudée et les parents travaillent dur. Alors qu’Abby travaille avec dévouement pour des personnes âgées à domicile, Ricky enchaîne les jobs mal payés ; ils réalisent que jamais ils ne pourront devenir indépendants ni propriétaires de leur maison. C’est maintenant ou jamais ! Une réelle opportunité semble leur être offerte par la révolution numérique : Abby vend alors sa voiture pour que Ricky puisse acheter une camionnette afin de devenir chauffeur-livreur à son compte. Mais les dérives de ce nouveau monde moderne auront des répercussions majeures sur toute la famille…

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