"Paul-Emile Victor, j'ai horreur du froid" : passionnant biopic sur une figure de l'exploration polaire
Il y a 25 ans disparaissait l'une des figures emblématiques de l'exploration polaire française. Plusieurs rendez-vous, à Grenoble, Lons-le-Saunier et Prémanon, mettent à l'honneur le documentaire-hommage de Stéphane Dugast: "Paul-Emile Victor, j'ai horreur du froid".
Il avait 87 ans et une vie particulièrement bien remplie. Paul-Emile Victor s'est éteint le 7 mars 1995 sur le motu Tane, en Polynésie, où il s'était retiré après une carrière passée à arpenter les régions polaires. En un quart de siècle, la situation a évolué en Arctique comme en Antarctique, entre changements climatiques et défis géopolitiques. Mais l'ethnologue, écrivain et fondateur des Expéditions Polaires Françaises reste une personnalité incontournable pour qui s'intéresse à ces régions. Plusieurs événements vont célébrer l'anniversaire de sa disparition en projetant le passionnant documentaire de Stéphane Dugast Paul-Emile Victor, j'ai horreur du froid. Coup d'envoi à Grenoble ce lundi 9 mars, puis le jeudi 12 mars en ouverture des Rendez-vous de l'aventure de Lons-le-Saunier, avant un weekend "spécial PEV" les 27 et 28 juin à l'Espace des mondes polaires de Prémanon, dans le Jura.
J'ai horreur du froid, de la neige, du vent... et j'ai vécu 50 ans comme ça. Il faut être dingue !
Paul-Emile Victor
Dingue ? Celui qui prononçait ces mots ne l'était pourtant pas, même s'il a peut-être bien fallu un petit grain de folie à Paul-Emile Victor pour se lancer dans les années 1930 dans des expéditions sur les terres glacées du Groenland, s'installer du côté d'Ammassalik pour vivre auprès de ceux qu'on appelait alors "les Eskimos", en apprenant leur langue et en adoptant leur mode de vie, traverser la calotte glaciaire ou un peu plus tard, dès 1956, poursuivre ses explorations en Antarctique.
Une vie en forme d'odyssée
Cette personnalité atypique (1907 - 1995) a séduit l'auteur et réalisateur Stéphane Dugast il y a déjà plusieurs années. En 2006, il s'est d'abord glissé "Dans les pas de Paul-Emile Victor", titre d'un premier documentaire (et d'un beau livre) réalisé après avoir sillonné cette région de l'Est du Groenland que l'explorateur affectionnait en suivant l'un de ses fils, Stéphane Victor. Puis, en 2015, il a co-écrit la biographie "Paul-Emile Victor, j'ai toujours vécu demain" avec Daphné Victor, sa fille, une plongée littéraire indispensable pour tout connaître du personnage.
Avec Paul-Émile Victor, j'ai horreur du froid, c'est en images qu'il retrace ce destin hors du commun. A travers de formidables archives, des témoignages riches et éclairants, des séquences tournées en France, au Groenland et en Polynésie, dans des lieux symboliques, ce biopic qui se déguste comme un savoureux roman nous emène sur les traces d'un passionné à la vie en forme d'odyssée.
Bande annonce du documentaire "Paul-Emile Victor, j'ai horreur du froid", réalisation Stéphane Dugast - Ekla production
Ce n'est donc pas par hasard que cette figure de l'exploration polaire du XXe siècle a, pendant une bonne partie de sa vie, subi les aléas d'un climat rigoureux dans des régions que l'on connaissait alors à peine. Et qu'il a réussi à embarquer dans son sillage tout un pays : des ministres pour réunir les fonds et créer les Expéditions Polaires Françaises (EPF), jusqu'aux médias et au public, particulièrement friands des conférences de cette personnalité hors du commun.
A la fois ethnologue, écrivain, dessinateur, explorateur, PEV, comme on le surnommait, était un personnage charismatique, un homme de caractère aussi, qui ne s'est pas fait que des amis au sein des EPF dont il était en quelque sorte "l'homme orchestre". Mais grâce à sa ténacité, sa perspicacité, son engagement sans faille, il a surmonté les obstacles pour aboutir à ses fins... non sans conséquences sur sa vie privée.
Il fait partie des quelques personnages qui ont fabriqué une petite part du récit national
Jean-Christophe Victor
Son fils aîné, Jean-Christophe, interviewé avant son décès en décembre 2016 (connu du public pour son émission "Le dessous des cartes" sur Arte) analysait ainsi le succès des expéditions polaires en général et la notoriété de son père en particulier : après la guerre, ses difficultés et ses horreurs, l'exploration polaire était devenue "un des outils du rêve des Français", comme le furent également la découverte des volcans ou des océans.
Préserver l'Homme et la Nature
Si Paul-Emile Victor en fut l'indéniable promoteur, on doit également se souvenir qu'il fut l'un des pionniers de la sensibilisation du public aux enjeux environnementaux. La vie avançant, la préservation de la Nature et de l'Homme deviennent des thématiques essentielles à ses yeux. Dans les années 70, il anime le groupe "Paul-Emile Victor pour la défense de l'homme et de son environnement" avec d'autres personnalités non moins illustres : Tazieff, Cousteau, Herzog.
La pollution, les changements climatiques, la raréfaction de l'eau douce, la nécessité d'une prise de conscience planétaire : de tout cela, il avait fait un nouveau combat, jusqu'à l'interruption définitive de toutes ses activités, un jour de mars 1995.
Infos pratiques
- Soirée-hommage lundi 9 mars 2020 à l'auditorium de la Maison de la montagne de Grenoble. Diffusion des documentaires Paul-Emile Victor, j'ai horreur du froid et L'Institut Polaire Français, une agence au service de la science polaire suivis d'une rencontre avec Jérôme Chapellaz, directeur de l'Institut Polaire Français, Daphné Victor et Stéphane Dugast.
-Rendez-vous de l'aventure de Lons-le-Saunier. Jeudi 12 mars 2020, projection de Paul-Emile Victor, j'ai horreur du froid suivi d'une rencontre avec Stéphane Dugast, Daphné Victor et Stéphane Niveau.
- Weekend spécial Paul-Emile Victor les 27 et 28 juin à l'Espace des mondes polaires de Prémanon (Jura)
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