Cannes 2018 : "Under the Silver Lake", étrangeté et humour
Mea-culpa
Première présence à Cannes, et en compétition, pour le réalisateur américain David Robert Mitchell qui signe également son scénario, comme c'était le cas pour "It Follows". "Under the Silver Lake" voit la rencontre à Los Angeles de Jack et Sarah qui disparaît aussitôt. Il part à sa recherche dans une cité des anges interlope et jet set, où meurtres, scandales et conspirations se succèdent dans une atmosphère de mystères anxiogènes…"Under the Silver Lake" se déroule dans les plus beaux quartiers de Los Angeles, donc le milieu du cinéma, au cœur duquel vit un trublion dilettante qui va plonger. Plonger dans le Lac d’Argent, Silver Lake, un quartier huppé de Hollywood. Depuis "Mulholand Drive" (2001) de David Lynch, suivi de "Maps to the Stars" (2014) de David Cronenberg, l’usine à rêves a été sérieusement brocardée. C’était déjà le cas de "Sunset Boulevard" (1950) de Billy Wilder. Nombre d’autres films abordent le sujet, comme si ce mea-culpa figurait au cahier des charges de la Mecque du cinéma. "Under the Silver Lake" les rejoint, même si son réalisateur David Robert Mitchell a les yeux plus gros que le ventre.
Trop-plein
Dès les premiers plans, on perçoit une maîtrise de la mise en scène : le cadre, un petit appartement ; un jeune homme, Sam (Andrew Garfield), se lève, regarde à la fenêtre et voit, muni de jumelles, une femme mûre topless, nourrir ses perroquets… Du coup, vient à l’esprit "Fenêtre sur cour" d’Hitchcock, où James Stewart observe pareillement ses voisins. Film sur Hollywood, "Under the Silver Lake" compile les références, les citations en phase avec son sujet, notamment avec une musique rappelant Bernard Hermann qui composa par cinq fois pour le maître du suspense, dont le sujet de prédilection est celui de plonger un personnage lambda dans une situation qui le dépasse. Tout le propos de "Under the Silver Lake". La suite part sur un ton plus "lynchéen", avec une disparition ("Twin Peaks"), puis une série d’énigmes et une enquête menée par un quidam ("Blue Velvet") dans un Hollywood corrompu où il est compliqué de s’y retrouver ("Mulholand Drive").Toujours maître d’une mise en images sophistiquée et glamour (Hollywood oblige), David Robert Mitchell tombe pour se faire plaisir dans le travers de citations surabondantes d’un cinéma qu’il aime. Son film s’en trouve surchargé. Il en perd le fil, mais avec humour, pour parodier Lynch dans une intrigue qui n’en est plus une. Tout cela pour aboutir à une résolution qui rappelle la confrérie de "La Montagne sacrée" de Jodorowsky (1973, à l'opposé des canons hollywoodiens), en passant par le New-âge, très tendance à Hollywood. Tout ce fatras fait le charme et les défauts de "Under the Silver Lake". Dans sa maîtrise volontairement maladroite, David Robert Mitchell surligne la parodie en se faisant plaisir, jusqu’à en être poseur. La durée de son film (2h19) touche à la provocation, mais tout cela fait partie du jeu. Parfois au détriment du spectateur.
LA FICHE
Réalisateur : David Robert Mitchell
Pays : Etats-Unis
Acteurs : Andrew Garfield, Riley Keough, Topher Grace, Zozia mamet, Jimmi Simpson,
Sortie : 8 août 2018
Synopsis : À Los Angeles, Sam, 33 ans, sans emploi, rêve de célébrité. Lorsque Sarah, une jeune et énigmatique voisine, se volatilise brusquement, Sam se lance à sa recherche et entreprend alors une enquête obsessionnelle surréaliste à travers la ville. Elle le fera plonger jusque dans les profondeurs les plus ténébreuses de la Cité des Anges, où il devra élucider disparitions et meurtres mystérieux sur fond de scandales et de conspirations.
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