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Cannes 2018 : la guerre du "Donbass" s'invite en ouverture de la section Un certain regard

Le réalisateur ukrainien, d’origine biélorusse, Sergei Loznitsa vient pour la 5e fois à Cannes, avec "Donbass". Après "My Joy", "Dans la brume" et "Une femme douce" en compétition, ainsi que "Maidan", documentaire projeté en séance spéciale sur le soulèvement ukrainien qui conduisit à la destitution du président Ianoukovitch, puis au conflit russo-ukrainien, c’est cette guerre qu'évoque "Donbass".
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
"Donbass" de Sergei Loznitsa
 (Pyramide Distribution)

Guerre hybride

Le Donbass est une région du sud-est de l’Ukraine ayant une frontière commune avec la Russie et où s’est concentré le conflit entre une population pro-européenne et une autre pro-russe. Les manifestations des "antimaidans" (du nom de la place Maidan de Kiev où est né le mouvement anti-russe) se sont transformées en insurrection armée, bientôt suivie de revendications séparatistes pro-russe soutenues par Moscou. C’est de ce contexte complexe dont traite "Donbass".

Mais Sergei Loznitsa ne cherche aucunement à expliquer cette guerre dont les motifs échappent totalement au spectateur. Il ne cherche pas à être didactique, mais justement à exposer un conflit qui échappe aux deux parties. Une belligérance dont les sources résident dans des préjugés, une inculture entretenue, des conflits d’intérêts, la corruption, et plus généralement la nature humaine… Pas vraiment des motifs politiques ou idéologiques, selon Loznitsa. Ce flou serait d’ailleurs aiguillonné par Moscou, accusé d’avoir introduit une large propagande en sa faveur, ainsi qu’une aide militaire aux insurgés pour y mener ce qui a été qualifiée de "guerre hybride".
Donbass B
 (Pyramide Distribution)

Affaire de style

Sergei Loznitsa est fidèle à son style radical, alimenté de longs plans fixes et plans séquences, aux décors urbains lépreux, de zones vagues, avec ici et là  des scènes baroques (banquet, mariage), peuplées de personnages antipathiques ou inconsistants, au pire hystériques. Son filmage en retrait, observateur, son image froide, le sordide des situations, son rythme languissant, contrastent avec des fulgurances de violences traumatiques. Il faut donc s’accrocher et l’on adhère ou pas, mais le cinéma de Sergei Loznitsa a une réelle personnalité.

L'ingérence russe dénoncée

Si "My Joy" et "Une femme douce" poussaient à l’excès ce style reconnaissable entre tous, à l’origine de l’adhésion de ses partisans, le cinéaste met un peu d’eau dans son vin avec "Donbass", sans que cela ne soit non plus un revirement. Comme lors de cette scène de lynchage subie par un "promaidan". Pas d’intrigue dans "Donbass", construit comme une suite de situations, identifiables à une série de sketches, qui stigmatisent le point de vue anti-russe du cinéaste. Le message est clair : Sergei Loznitsa dénonce l’ingérence russe en Ukraine, sous tous ses angles, comme il s’en prenait déjà rudement aux Russes dans "Une femme douce". Le changement dans la continuité.
"Donbass" : l'affiche
 (Pyramide Distribution)

LA FICHE

Genre : Guerre / Drame
Réalisateur : Sergei Loznitsa 
Pays : Ukraine / France / Allemagne / Pays-Bas / Roumanie
Acteurs : Boris Kamorzin, Valeriu Andriutã, Tamara Yatsenko
Sortie : 9 mai 2018

Synopsis : Dans le Donbass, à l'est de l'Ukraine, une guerre hybride mêle conflit armé ouvert et saccages perpétrés par des gangs. Dans le Donbass, la guerre s'appelle la paix, la propagande est érigée en vérité, la haine prétend être l'amour. Cela ne concerne pas une région, un pays ou un système politique, cela concerne l'humanité et la civilisation en général. Cela concerne chacun de nous.

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