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Avec "Reprise en main", le réalisateur Gilles Perret tourne sa première fiction en Haute-Savoie

Le réalisateur haut-savoyard Gilles Perret est en tournage sur ses terres pour "Reprise en main", son premier long métrage de fiction qui raconte la lutte des ouvriers des usines de décolletage locales pour sauvegarder leurs entreprises menacées de délocalisation.

Article rédigé par Chrystel Chabert
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
L'équipe de Reprise en main en plein tournage à Scionzier en Haute-Savoie (S. Worreth /  France Télévisions)

Depuis le 16 août, le réalisateur haut-savoyard Gilles Perret tourne son premier long métrage intitulé Reprise en main. Connu pour ses documentaires où les histoires locales racontent le monde d'aujourd'hui, le cinéaste a choisi cette fois la fiction mais sans renier ses valeurs ni ses origines.

Une comédie sociale

Gilles Perret est né dans les Alpes, il y vit et connaît bien les problématiques de la vallée de l'Arve, berceau du décolletage, une industrie qui fournit des pièces pour le secteur automobile, aéronautique et médical. Cette activité florissante a été en quelque sorte victime de son succès. Beaucoup d'entreprises ont été rachetées par des fonds de pension anglo-saxons, surtout focalisé sur les notions de rentabilité rapide et maximale au détriment de l'humain. 

Reprise en main raconte l'histoire de Patrick, ouvrier passionné, qui travaille dans une des nombreuses entreprises spécialisées dans la mécanique de précision de la vallée de l’Arve en Haute-Savoie. Son usine vient d’être rachetée par un fond d’investissement. Face à la gestion calamiteuse des nouveaux propriétaires, il décide de se battre pour reprendre la main sur son destin. Aidé de ses copains d’enfance, il choisit de se transformer en financier pour reprendre la société afin de la remettre aux mains des salariés.

Tournage Gilles Perret

Social et combatif

Si le film parle d'un sujet d'actualité lié aux ravages de la nouvelle finance, pas question de plomber le public avec un film sombre. Le réalisateur parle d'une comédie sociale : "Les films sociaux au cinéma sont peu nombreux et en général, ça finit mal et c'est assez plombant, reconnaît Gilles Perret. Mais il ne se passe pas que des choses moches au tour des salariés dans le monde du travail. Il y a aussi de belles histoires. C'est ce qu'on a envie de raconter dans ce film où les gars relèvent la tête et reprennent en main leur destin, d'où le titre du film"

C'est le comédien Pierre Deladonchamps (qui est en ce moment à l'affiche de Eiffel aux côtés de Romain Duris) qui incarne cet ouvrier combatif : "Ce qui m'a plus, c'est l'idée que des employés puissent se rebeller un peu pour ne pas se laisser faire, pour garder leur industrie et ne pas se la faire piquer par un fonds vautour", confie l'acteur.

À ses côtés, on retrouve aussi Grégory Montel (révélé au grand public avec la série Dix pour cent). Lui aussi a été touché par la portée sociale et humaine du scénario de Gilles Perret : "Il y a un réel engagement. Un engagement sur ce qu'est aujourd'hui le capitalisme, le néolibéralisme, à quel point on ne s'appartient plus vraiment quand on est salarié d'une boîte. On n'est plus vraiment identifiable, on ne sait plus qui est le patron, où il est... Le film raconte ça".

Le réalisateur Gilles Perret (debout en chemise blanche) et le comédien Grégory Montel (assis, à droite)sur le tournage de Reprise en main. (S. Worreth / France Télévisions)

Un cinéaste engagé

Gilles Perret a commencé à travailler sur cette fiction il y a six ans avec la coscénariste Marion Grange. Le sujet qui tourne autour du monde du décolletage ne lui est pas du tout étranger. En 2006, il avait réalisé le documentaire Ma Mondialisation qui racontait l’histoire bien réelle d'un chef d’entreprise du décolletage, Yves Bontaz.

Issu du monde ouvrier, Gilles Perret est aussi un passionné de montagne. Il collabore régulièrement au magazine documentaire de France 3 Chroniques d'en haut. Il a reçu le grand prix du festival de Banff au Canada et le grand prix film de montagne des Diablerets (Suisse) pour L’homme qui revient de haut, un portrait de l’alpiniste Marc Batard.

Parmi ses documentaires les plus récents, J’veux du soleil co-réalisé avec François Ruffin en 2019 sur le mouvement des gilets jaunes et Debout les femmes (2021) toujours avec François Ruffin, sorte de "road-movie parlementaire" à la rencontre des femmes qui s’occupent des enfants, des malades et des personnes âgées.

Le décolletage, quésaco ?

Une petite mise au point sur ce qu'est le décolletage s'impose : née de l’industrie horlogère, cette activité s'est implantée au XVIIIe siècle dans la vallée de l’Arve, en Haute-Savoie, entre Genève et Chamonix. Le mot décolletage vient de la manipulation qui visait à l'origine à dégager "le collet" des vis, à l’aide de tours appropriés. Le décolletage s'est beaucoup développé au début des années 70, pour fournir les marchés de l’électronique, de l’électricité, de l’électroménager mais surtout l’industrie automobile. Dans ce domaine, la fourniture de pièces n’a cessé d’augmenter, entraînant dans les années quatre-vingt un fort développement des usines de la vallée de l’Arve.

Avec 905 entreprises françaises qui emploient 19 000 salariés, la France est le leader mondial du décolletage. 65% de ces entreprises sont installées en Haute-Savoie, plus particulièrement dans la vallée de l'Arve et autour de Cluses. Mais le secteur a connu de nombreuses crises. L'État a lancé cette année un plan de soutien à la filière du décolletage.

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