Salvador Dalí bouleversé par sa rencontre avec Gala dans le tome 2 de la BD intimiste de Julie Birmant et Clément Oubrerie
Après un premier tome consacré à Dalí avant Gala, de l'enfance du génie catalan à Figueras jusqu'à son arrivée à Paris, Julie Birmant (scénario), récompensée du prix René Goscinny au dernier Festival d'Angoulême, et Clément Oubrerie (dessin) se penchent dans ce second volume sur la rencontre décisive du peintre moustachu avec sa muse de toute éternité, Gala.
En janvier 1929, Salvador Dalí a 25 ans et est toujours puceau. L'auteur cette année-là du tableau Le Grand masturbateur, se soulage dans des fantasmes érotiques torrides compulsifs.
C'est aussi un lâcheur, au dernier moment, il laisse son complice Luis Buñuel présenter seul à Paris leur film Un chien andalou, qualifié de "premier grand film surréaliste" par André Breton, le théoricien du mouvement dont on célèbre cette année les 100 ans. Sans un mot pour son complice Buñuel, Dalí regagne donc le petit village espagnol de Cadaquès, où il passe tous ses étés depuis sa naissance, pour "peindre ses visions" en vue d'une exposition.
Un désir trouble et réciproque
C'est là, lors d'une visite du poète Paul Éluard, que Dalí va faire la connaissance de son épouse Gala Éluard. Il est, dès lors, comme possédé par celle qu'il "attendait", bien qu'elle ravive chez lui de tenaces pulsions morbides vis-à-vis des femmes.
Au bord de la folie, il n'hésite pas à jeter le trouble pour se faire remarquer : il déchire ses vêtements comme un punk, accroche un anneau à son oreille et élabore pour séduire une fragrance animale à base de déjections de biquettes. Se dessine déjà, sous ses maladresses, le maître de la provocation qu'il deviendra.
Entre Gala et Dalí, la tension sexuelle est dévorante. Mais "l'autre versant du désir, c'est la mort", raisonne le peintre, qui y va à reculons. Or, la plus brûlante expression du désir de Gala, c'est qu'il la "fasse crever" ! Autant dire que les deux se sont trouvés. Par chance, Éluard est un homme partageur, qui donne élégamment sa bénédiction aux deux tourtereaux… qui ne consommeront qu'après de longues semaines de flirt, en conclusion de ce tome 2.
De son côté, André Breton tombe sous le charme de cet artiste "génial" capable de plonger le public de plain-pied dans ses délires, en transformant ses rêves en créations artistiques. À l'instar des surréalistes, qui entendent redonner toute sa place à l'inconscient, le jeune peintre donne en effet libre cours à ses visions hallucinatoires et à ses perceptions singulières, laissant même affleurer de faux souvenirs sans jamais les brider. Quant à sa théorie surprenante sur les raisons du succès de L'Angelus de Millet (un tableau porno, rien de moins), elle a tout pour séduire Breton.
Voilà pour le scénario, qui avance donc, comme le premier tome, non pas de façon linéaire, mais en nous plongeant, par le biais d'anecdotes méconnues, dans la psyché torturée de l'auteur des Montres molles, dont nombre de tableaux sont ici reproduits. En brouillant dans leurs images et leur récit les frontières entre inconscient et réalité, les auteurs poursuivent en finesse leur quête de vérité sur l'un des géants de la peinture. Qui deviendra au prochain tome un artiste roi du coup marketing au succès planétaire.
Dalí, tome 2 - Gala" de Julie Birmant (scénario) et Clément Oubrerie (dessin) est paru en septembre 2024 chez Dargaud
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